Suite à la nomination de Marcel Groleau à la tête de Solidarité rurale du Québec (SRQ), La Vie agricole a interrogé Benoit Girouard, président de l’Union paysanne et ancien membre de SRQ
La Vie agricole: On vient d’apprendre que Claire Bolduc a quitté la présidence de Solidarité rurale et qu’elle a été remplacée par Marcel Groleau président de l’UPA. Quelles sont vos premières réactions ?
Benoit Girouard : Eh bien mes premiers mots iront à Claire qui a relevé tout un défi pendant 8 ans à la tête d’un organisme à la mission vaste et qui a manœuvré avec intelligence. Pour ce qui est de la suite, les membres restants de Solidarité rurale auraient mieux fait de voter la dissolution de l’organisme que de mettre l’UPA à leur tête.
LVA: N’y a-t-il pas eu un vote sur cette possibilité justement ?
BG : Oui il y a eu une proposition de dissoudre l’organisme lors de l’AGA. Résultat 12 pour, 12 contre. Un portrait réaliste des blocages internes de l’organisme depuis longtemps. Un vrai panier de crabes.
LVA : Un panier de crabes ?
BG : Pour avoir brièvement siégé à Solidarité rurale, l’Union paysanne c’est rendu compte rapidement qu’il était quasi impossible de faire évoluer l’organisme de l’intérieur. Sa structure qui donnait une prépondérance à des groupes fondateurs comme l’UPA, la Coop fédérée et l’Ordre des Agronomes court-circuitait une remise en question des modèles. On a quitté en sachant que l’entité vit sur du temps emprunté.
LVA : Que voulez-vous dire par temps emprunté ?
BG : Lorsque vous avez un organisme dépendant à 75% du financement de l’État qu’elle critique parfois durement. Que cet organisme fait parfois de l’ombre à la Fédération québécoise des Municipalités (FQM) qui n’aime pas ça. Pas besoin d’être devin.
LVA : Vous ne croyez pas que la nomination de Marcel Groleau pourrait relancer Solidarité rurale?
BG : Le monde rural se souvient des porcheries industrielles, du BAPE sur l’eau, du droit de produire, du blocage des plans conjoints pour les producteurs agricoles en région, de Colbex-Levinoff, etc. J’ai vu l’UPA court-circuiter toute critique du modèle agricole au sein de Solidarité rurale souvent avec l’appui de l’Ordre des Agronomes et de la Coop fédérée. Vous me demandez si le loup va bien s’occuper de la bergerie ?
LVA : Y a-t-il des voies d’avenir pour Solidarité rurale?
BG: Difficile à dire. Probablement en devenant un mouvement d’action basé sur les régions. Y’a trop de corporatisme dans l’organisme. Le monde rural à besoin d’une voie indépendante des lobbys nationaux afin de se représenter elle-même. Mais soyons lucide avez-vous déjà vu des corporations redonner le pouvoir aux citoyens ?
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