Circuits courts de commercialisation:La charrue avant les bœufs?

Sans contredit, les circuits courts de commercialisation ont la cote, mais lorsqu'on parle de ces ventes à la ferme, marchés publics, ASC et autres mécanismes visant l'accroissement de ces ventes directes et de ces achats locaux, il ne faut pas penser que l'étau dans lequel se trouve la production et la transformation de denrées alimentaires à la ferme s'est desserré véritablement.

Victoire, on nous laisse depuis peu vendre nos oeufs aux gens à l'extérieur de la ferme. Mais pas un mot sur le pouvoir de l'UPA de réduire cette possibilité à néant grâce à ses plans conjoints qui régissent la quantité de poules que nous avons le droit de posséder. Et pourquoi ne le feraient-ils pas? Ils ont après tout fixé en 1966 leur seuil de tolérance (à la production hors quota) à 250 pondeuses. Aujourd'hui ils ne nous en permettent plus qu'une centaine. Et demain??? Laurent Lessard dormira-t-il aussi lorsque ceci arrivera?

Parler de circuits courts de COMMERCISALISATION, sans (d'abord?) aborder l'épineux sujet des circuits courts de PRODUCTION et des circuits courts de TRANSFORMATION me semble en effet tenir plus de la diversion politique que d'une réelle avancée en faveur de cette agriculture à petite échelle qui POURRAIT nourrir les gens qui l'entourent.

Comment prétendre en effet qu'une viande est «locale» lorsque celle-ci doit parcourir 500KM pour aller se faire abattre au loin en compagnie d'autres viandes industrielles? Et l'éleveur revient-il chez-lui avec les carcasses de ses propres animaux ou celles d'un autre? Et que dire de tous ces résidus d'abattage qui ne retournent pas au sol qui a nourri ces animaux qu'on fait abattre qu'on doit faire abattre ailleurs? Et qui pourra offrir en circuit court, par exemple, des crèmes caramel locales, préparées à partir du lait (cuit!) de ses deux ou trois chèvres, si on lui exige, tout de même qu'il ne prépare pas de produits laitiers, un permis d'usine laitière comme on l'exige à Saputo!?

Ne vous laissez pas berner: la ferme de deux vaches, 200 poules et 500 poulets coûte toujours des centaines de milliers de dollars en droits de produire et demeure toujours impossible. Sans réforme agricole profonde, les circuits courts de commercialisation n'ont que très peu à offrir et ne participent que très partiellement à l'émergence d'une véritable agriculture locale et de véritables produits fermiers. 

Ne dormons plus.

Dominic Lamontagne

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