L’OAQ répond à Yan Turmine:Un agronome peut-il être entrepreneur au Québec?

Dans son commentaire intitulé « Un agronome peut-il être entrepreneur au Québec ? », monsieur Turmine commente la publication de règles entourant l’application des 17 recommandations du comité sur l’indépendance professionnelle.

  1. L’exemple de Myriam

Permettez-moi, dans un premier temps, de revenir sur le cas hypothétique proposé par M Turmine : « Myriam jeune agronome, diplômée au doctorat d’une prestigieuse université. Avec d’autres professionnels, elle a développé un produit entièrement naturel, sans danger pour les abeilles, qui remplace efficacement les fongicides dans l’enrobage des semences. Son produit vient d’être homologué au Canada, les ventes s’en viennent. Myriam se pose beaucoup de questions, et se demande si elle pourra continuer à porter son titre d’agronome, et continuer à prescrire et recommander l’utilisation de son produit au Québec. » Est-ce que les recommandations du Comité sur l’indépendance professionnelle mettent en péril son statut d’agronome promoteur d’une nouvelle technologie ?

Myriam ne souhaiterait-elle pas que ses clients soient informés que c’est son produit et qu’elle est la meilleure conseillère pour recommander ou non ce produit ? Devrait-elle s’inquiéter parce que ses clients pourraient ne pas recevoir le meilleur conseil, car des produits pourraient être mieux adaptés ou plus performants que celui qu’elle a développé ? Ne devrait-elle pas plutôt expliquer à son client qu’elle a participé au développement et la mise en marché de ce nouveau produit? Plusieurs agronomes entrepreneurs ont une situation qui s’apparente à celle de Myriam et l’Ordre reconnait leur importante contribution en agriculture et en agroalimentaire.

  1. Les règles d’éligibilité à la présidence à la vice-présidence de l’Ordre des agronomes

Ces règles sont incluses par l’Office des professions dans les règlements de tous les Ordres qui révisent leurs règles d’éligibilité à ces deux fonctions. Pourquoi cette règle a-t-elle été introduite ? Pour assurer l’indépendance de ces deux fonctions.

  1. Les recommandations du comité sur l’indépendance professionnelle

Elles ont été rendues publiques il y a plus d’un an et en y faisant une lecture attentive, vous pourrez constater que plusieurs d’entre elles s’appuient sur le Code de déontologie des agronomes. Une bonne lecture du Code de déontologie des agronomes permettra de mieux comprendre ces recommandations.

  1. L’agronome entrepreneur doit-il s’inquiéter ?

La réponse est non ! Les recommandations du Comité sur l’indépendance professionnelle sont claires et sont le fruit de réflexion d’experts indépendants que l’Ordre a mandatés pour se pencher sur l’indépendance professionnelle des agronomes et de faire des recommandations au Conseil d’administration de l’Ordre des agronomes. Depuis leur publication, l’Ordre a rencontré de nombreux intervenants, employeurs et associations d’employeurs pour présenter et expliquer les orientations de l’Ordre en matière d’indépendance professionnelle. Nous avons très bien expliqué que toutes les pratiques en lien direct avec le produit sont proscrites, et pour préciser cette directive, plusieurs exemples se trouvent dans les communications de l’Ordre.

  1. La rémunération à la performance

L’enquête sur la rémunération des agronomes a clairement démontré que la rémunération à la performance est présente dans pratiquement tous les domaines où les agronomes travaillent. Le désir des employeurs de reconnaitre les efforts de dépassement d’agronomes à leur emploi est légitime. Les règles énoncées par l’Ordre laissent une très grande latitude aux employeurs pour développer et mettre en place des programmes de rémunération à la performance de qualité et non celle de quantité. L’agronome entrepreneur, l’agronome propriétaire de son entreprise et l’agronome gestionnaire peuvent aussi être rémunérés selon la performance de l’entreprise, de l’équipe ou du département et ce que ce soit sous forme de dividendes ou de prime à la performance. Vise-t-on des agronomes en particulier ? La réponse est non, même les agronomes qui se disent « non liés » peuvent recevoir une rémunération à la performance et celle-ci doit répondre aux mêmes exigences que tous les autres secteurs d’emploi.

  1. La déclaration d’intérêt

La recommandation #5 du comité sur l’indépendance professionnelle recommande d’inclure une déclaration d’intérêts dans chaque mandat professionnel conclu avec un client. Le Comité de mise en route de ces recommandations et le Conseil d’administration ont jugé nécessaire d’inclure cette déclaration d’intérêts dans le formulaire de renouvellement de l’inscription au tableau des membres de l’Ordre pour susciter la prise de conscience de ces aspects importants du conflit d’intérêts.

  1. La trace des pesticides sur la pratique de l’agronomie

La polémique entourant l’utilisation des pesticides a laissé une marque profonde sur la pratique des agronomes. Cette marque a fait progresser la profession en mettant de l’avant la traçabilité, l’imputabilité et la justification de tous les actes posés par les agronomes. En déclarant ses intérêts financiers, familiaux ou autres, l’agronome montre sa transparence et démontre que ses recommandations sont faites en toute indépendance. Finalement et pour répondre à la dernière question de M Turmine : « est-ce que la prospection et la sollicitation de nouvelle clientèle sont des activités facturables ? » La réponse est non. La prospection de nouvelle clientèle pour tous les professionnels (avocats, ingénieurs, comptables, etc.) n’est jamais facturée. Elle est incluse dans les frais encourus par le professionnel.

En espérant que ce texte apportera des précisions quant aux interrogations soulevées par M. Turmine

Michel Duval, président de l’Ordre des agronomes.

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