La résistance s’organise suite à la pensée magique du projet de Loi 41

L’Association Québécoise des Agronomes en Fournitures d’Intrants (AQAFI) a organisé sa première assemblée le 27 septembre dernier à Saint-Hyacinthe, plus de 260 agronomes ont participé à cette activité, démontrant l’intérêt d’avoir une telle association. La modification du code de déontologie et le projet de loi 41, qui mettent des restrictions majeures à la pratique de l’agronomie pour les agronomes œuvrant au sein de compagnies d’intrants sèment l’inquiétude et la grogne. Traditionnellement, les agronomes sont plutôt discrets, ils préfèrent consacrer leur temps à leur travail plutôt qu’aux affaires politiques de leur profession, les restrictions annoncées les poussent à s’organiser, afin de les dénoncer et ramener le gros bon sens dans les réformes que le public veut.

Essentiellement, ce qui irrite plusieurs personnes dans le projet de Loi 41 et la modification du code de déontologie c’est qu’un employé d’une compagnie d’intrants ne pourra plus faire d’acte agronomique lié aux intrants qu’il vend. Ce sera valide pour les pesticides dans un premier temps dans le projet de Loi 41, et pour tous les intrants dans la modification du code de déontologie. C’est un changement majeur qui fait fi du travail de plus de 36% des agronomes au Québec (près de la moitié si l’on compte les agronomes qui travaillent dans les institutions financières).

Rappelons que plusieurs professions gèrent très bien la vente d’intrants et les services professionnels par la même personne. La gestion des conflits d’intérêts n’est pas une chose simple, les professionnels ainsi que les ordres doivent y porter une attention particulière. La commission Charbonneau nous l’a rappelé, pourtant les professionnels visés n’était pas vendeurs d‘intrants, ils étaient supposément « non liés ».

La pensée magique du projet de Loi 41

La plupart des intrants en agriculture sont déjà réglementés, surtout les pesticides. De penser qu’en interdisant les agronomes travaillant pour des compagnies de ventes de faire la prescription va en réduire l’utilisation relève de la pensée magique. Le risque c’est de voir plutôt une augmentation incontrôlée de leur utilisation. Le gouvernement et l’ordre devraient plutôt mieux contrôler les prescriptions : tout agronome devrait respecter les règles concernant les pesticides et leur application, faute de quoi des sanctions sévères seraient appliquées. Les utilisations hors étiquettes (applications non réglementées, mélange de pesticides non homologués, etc..) devraient faire l’objet de suivis serrés engageant réellement la responsabilité du professionnel qui l’a fait.  La réglementation sur les pesticides est de la responsabilité des gouvernements, si ceux-ci décident que telle ou telle molécule n’est plus désirable, qu’ils l’interdisent ou qu’ils en réduisent les champs d’application, ce n’est pas en séparant la vente du conseil agronomique que l’on va rendre ces molécules plus acceptables : on ne fait ainsi que balayer la poussière sous le tapis.

Le projet de Loi 41: ridicule

Le secteur des médicaments vétérinaires peut nous montrer l’exemple. Il y a une trentaine d’années, disons que c’était un peu la foire. Les gouvernements et l’ordre des vétérinaires ont pris le taureau par les cornes et ont eu pour première action : le respect de la réglementation, notamment au niveau des prescriptions, en amenant au respect des homologations par un contrôle des utilisations hors étiquettes. Avec le temps cela s’est traduit pas une utilisation moindre de médicaments et un meilleur contrôle de la réglementation, ce qui a ouvert la porte à l’élimination de plusieurs médicaments. Pour ce faire l’on n’a pas eu besoin de dissocier la vente de la pratique professionnelle.

Avec la création de l’AQAFI, des voix vont s’élever pour faire voir le ridicule d’une partie du projet de Loi 41 ainsi que de la modification en cours du code de déontologie des agronomes. Ces voix sont celles de centaines d’agronomes de terrain qui tous les jours exercent leur métier fièrement.

 

 

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