L’Institut Jean-Garon reste sceptique à propos de la consultation sur le zonage agricole

L’Institut Jean-Garon a émis des commentaires sur le fascicule 2 concernant les activités agricoles dans le cadre de la consultation du zonage agricole lancée en juin dernier par le ministre Lamontagne. La Vie agricole en a eu connaissance.

«En tant que porteur de l’héritage du « père » de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA) et de l’esprit du Rapport Pronovost sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire, l’Institut Jean-Garon considère de son devoir de réagir aux différents fascicules alimentant la consultation nationale sur le territoire et les activités agricoles lancée par le ministre André Lamontagne.», est-il écrit en préambule du document. L’organisation se livre ensuite à quelques critiques.

L’Institut Jean-Garon reconnaît que la consultation survient à un moment critique en ce qui a trait à la capacité du Québec à se nourrir le plus possible à partir de ses propres ressources et à occuper de façon dynamique son territoire. Si l’Institut se félicite de la consultation, il met de l’avant des conseils auprès du gouvernement.

«Pour nous, ce serait une erreur de faire porter la consultation en cours uniquement sur les forces et faiblesses de la LPTAA, aussi importante soit-elle. La Loi est une mesure défensive; elle n’est pas le facteur déterminant des dynamismes qui, depuis 45 ans, façonnent notre agriculture et, malheureusement, génèrent bien des effets pervers. Il faut la moderniser, la renforcer, mieux outiller la Commission qui l’administre», écrit L’Institut Jean-Garon.

Il suggère ensuite que le Québec se dote «d’une véritable politique agricole et alimentaire adaptée aux défis actuels, politique qui fait cruellement défaut actuellement malgré bien des mesures sectorielles qui semblent aller en ce sens, mais n’ont pas d’impact suffisant».

«Nous croyons qu’il aurait été possible d’exposer de façon plus explicite les dangers qui menacent le territoire et les activités agricoles, et de mieux refléter l’urgence de la situation. Ces dangers ne sont pas nouveaux, mais il suffit de jeter un coup d’œil à l’actualité des dernières semaines pour réaliser que, loin de s’atténuer, ils sont plus aigus que jamais», ajoute l’Institut Jean-Garon.

Sur les grands projets économiques, le cas Northvolt inquiète : «Ce n’est pas tant le projet Northvolt comme tel qui nous inquiète, mais la facilité avec laquelle le gouvernement a aplani les obstacles réglementaires sur sa route.  Il est particulièrement troublant de constater comment la protection des milieux humides a été mise de côté pour Northvolt alors qu’elle avait fait dérailler un projet domiciliaire sur le même site. Comment ne pas penser que la protection du territoire agricole aurait connu le même sort si elle avait été un obstacle au projet comme elle risque de le devenir lorsqu’il sera question d’une phase 2 ou de loger à proximité les milliers de travailleurs attendus?»

Sur la crise du logement, l’Institut se réfère à l’actualité autour de la municipalité de Crabtree : «Le cas de la municipalité de Crabtree est emblématique des pressions énormes qui s’annoncent sur le territoire agricole au nom de la crise du logement.  Une bataille se dessine entre le droit de construire vite et pour pas cher, donc sur les lisières agricoles des périmètres urbains, plutôt que de densifier, et garantir la sauvegarde de notre garde-manger. »

À propos de la filière énergétique, l’Institut Jean-Garon considère que Le Plan d’action d’Hydro-Québec visant à tripler la production d’énergie éolienne d’ici dix ans est «très préoccupant pour les défenseurs du territoire agricole».

La principale raison : «Parce que la volonté avouée d’Hydro est de produire cette énergie à proximité des endroits où elle est consommée, soit essentiellement dans les Basses-Terres du Saint-Laurent.»

«Énergie verte, crise du logement, grands projets industriels, toutes ces causes sont valables.  Leur convergence crée cependant une pression sans précédent sur le territoire agricole.  À la lecture des deux premiers fascicules de la Consultation nationale sur le territoire et les activités agricoles, il n’est pas évident que le gouvernement a pris toute la mesure de cette menace.», conclut l’Institut Jean-Garon.

Il y a eu quinze ans cette année, le rapport de la Commission sur l’avenir de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire québécois, le Rapport Pronovost, proposait une feuille de route pour l’établissement d’une véritable politique nationale de l’agriculture et de l’alimentation.

Beaucoup a été accompli dans la foulée de ce rapport mais pas l’essentiel :  revoir la façon dont nous soutenons notre agriculture.

«Nous parlons ici essentiellement de la filière maïs-soya-porc qui s’est constituée à partir de la fin des années 1970 portée par le régime d’assurance stabilisation des revenus agricoles, l’ASRA. Cette filière a été le moteur principal des changements survenus dans le paysage agricole québécois au cours de cette période : explosion de 250% de la culture du soya depuis 1981, concentration de superficies en maïs et soya en Montérégie et dans le Centre-du Québec, de l’élevage du porc dans ces mêmes régions et en Chaudière-Appalaches, émergence de quasi-monopoles, déplacement concomitant de la production laitière au Saguenay-Lac-Saint-Jean, au Bas Saint-Laurent et en Estrie, déclin des superficies en prairies pérennes.

(…)

Ce sont les politiques publiques qui déterminent en grande partie l’usage du territoire. Il faut les faire évoluer si on veut adapter nos façons de faire aux défis actuels.»

 

 

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