Difficulté dans les pêches à cause de la guerre en Ukraine et ce n’est pas un poisson d’avril!

«À la veille de l’ouverture de la saison 2024 de pêche au crabe des neiges dans le Saint-Laurent, les prix au débarquement offerts par les transformateurs s’annoncent bas. En 2023, le marché japonais s’est vu inondé de produits russes bon marché, privant l’industrie terre-neuvienne de l’un de ses grands acheteurs, et la forçant à se concentrer sur les États-Unis». C’est ce que nous apprend une note toute récente de l’IREC ( l’Institut de Recherche en Études Contemporaines).

Le marché américain, saturé depuis 2022 est pourtant la principale destination (93 %) des exportations internationales de crabes des neiges du Québec depuis près de vingt ans. La situation rend les pêcheurs et les transformateurs du Québec maritime particulièrement vulnérables devant la concurrence étrangère et la conjoncture mondiale. Il semblerait donc que la situation géopolitique qui prévaut suite à la guerre en Ukraine ait un impact sur nos pêches ici!

La note de l’IREC nous apprend qu’en 2023, les pêcheurs ont connu une baisse vertigineuse de leurs revenus globaux, et ce, malgré l’accroissement des contingents émis (quotas) et des volumes pêchés. Et pour cause : le prix moyen au débarquement est passé de 15,56 $ le kilogramme en 2022 à 5,05 $ en 2023, soit un déclin de 67,5 %.

Le prix au débarquement observé l’an dernier ajusté à l’inflation s’approche ainsi d’un creux qui n’avait pas été atteint depuis plus de douze ans, replongeant les crabiers québécois dans une situation similaire à la stagnation vécue entre 2005 et 2010.

«Au cours de cette période, le prix au débarquement avait atteint une moyenne de 4,83 $ le kilogramme, c’est-à-dire un prix qui compromettait la rentabilité des activités de plusieurs entreprises. La crise avait été telle qu’un plan de rationalisation (rachat de permis pour en diminuer le nombre) avait été instauré afin de rétablir des conditions viables pour le futur de cette pêcherie».

Le poids de la concurrence étrangère semble donc l’emporter sur tout mécanisme institutionnel

En conclusion l’IREC précise «En 2024, alors que certains s’attendent à un prix au débarquement semblable à l’an passé, la rentabilité des crabiers apparaît de nouveau compromise. Toutefois, les quotas généralement élevés leur permettront vraisemblablement de compenser en partie leurs pertes de profit par les quantités vendues, comme ils l’ont fait en 2023. En effet, le volume des débarquements est en hausse depuis quelques années et la saison de pêche actuelle devrait une fois de plus donner des captures abondantes, malgré un total autorisé plus modeste.»

Il est vrai que l’économie du crabe des neiges a toujours vogué au gré des conjonctures, et aux dépens de ses pêcheurs et de ses transformateurs. Même les outils de négociation collective des conditions de mise en marché, dont se dotent certains pêcheurs (le plan conjoint des crabiers de la zone 16, sur la Côte-Nord, en l’occurrence) afin de bénéficier d’une certaine stabilité et prévisibilité dans les prix au débarquement, ne parviennent plus à jouer leur rôle.

L’IREC souligne «Effectivement, en avril 2023, malgré la décision de la Cour supérieure du Québec qui tranchait en faveur des crabiers afin de faire respecter le prix fixé par la convention de mise en marché, les transformateurs, captifs des conditions du marché de Boston, sont parvenus à faire plier les pêcheurs pour qu’ils acceptent un prix inférieur, analogue à celui en vigueur dans les autres zones de pêche du Québec maritime et du Canada atlantique. En l’état actuel, le poids de la concurrence étrangère semble donc l’emporter sur tout mécanisme institutionnel dont disposent les pêcheurs pour encadrer les forces du marché et assurer la viabilité de leurs entreprises».

 

Votre commentaire