Prix des œufs:le Canada à l’abri… pour combien de temps?

« Alors que les prix des œufs explosent aux États-Unis, le système de gestion de l’offre canadien fait discrètement ce pour quoi il a été conçu : garder les tablettes bien garnies et les prix relativement stables… pour l’instant. »

Aux États-Unis, la situation est préoccupante. Dans certains États, une douzaine d’œufs se vend maintenant plus de 14 $, un sommet historique. La grippe aviaire continue de faire des ravages, forçant l’abattage de plus de 10 % du cheptel de poules pondeuses au pays. Avec une offre en chute libre, les consommateurs se battent pour trouver des œufs abordables.

Au Canada, le portrait est différent, mais les défis demeurent. En un an, le prix des œufs a augmenté en moyenne de 11 à 12 % à l’échelle nationale. Il devient difficile de trouver une douzaine d’œufs de catégorie « A » à moins de 5 $ dans plusieurs provinces. Depuis janvier, certaines régions ont connu des hausses de prix atteignant 10 %. La grippe aviaire inquiète aussi, mais son impact y est plus contenu. Le Rapport sur les prix alimentaires du Canada 2025 avait déjà prévu cette tendance, identifiant la grippe aviaire comme un facteur clé de la hausse du prix du poulet et des œufs.

La Colombie-Britannique est la seule province où l’offre d’œufs est actuellement insuffisante. Depuis le début de cette vague de grippe aviaire, plus de 14,5 millions de poulets ont été abattus au Canada, dont plus de 80 % en Colombie-Britannique. L’Ontario suit loin derrière, mais la situation y semble sous contrôle pour l’instant.=

Un marché plus stable au Canada

Le marché canadien des œufs se distingue de celui des États-Unis par plusieurs facteurs qui atténuent les fluctuations d’approvisionnement et de prix. D’abord, la géographie joue un rôle clé. L’immensité du territoire canadien favorise une répartition plus étendue des fermes avicoles, ce qui ralentit la propagation du virus.

Ensuite, la gestion de l’offre – ce système de quotas qui régit la production – a un effet stabilisateur. Contrairement au modèle américain, plus exposé aux aléas du marché, la gestion de l’offre permet une meilleure coordination entre les acteurs de l’industrie. Dès qu’un cas de grippe aviaire est détecté, les mesures de biosécurité sont rapidement renforcées pour limiter les impacts. Il est difficile de quantifier précisément l’influence du système sur la stabilité des prix, mais tout indique qu’il a permis d’éviter des perturbations plus graves.

L’exemple de l’Alberta, qui envoie actuellement des œufs en Colombie-Britannique pour pallier les pénuries, illustre bien cette flexibilité. L’industrie des œufs est ainsi mieux adaptée aux ajustements que d’autres secteurs sous gestion de l’offre, comme celui du lait.

Cela dit, le prix des œufs au Canada continuera d’augmenter, mais sans commune mesure avec la flambée observée aux États-Unis. Alors que les consommateurs américains font face à des hausses de 60 %, 80 %, voire 100 %, la hausse prévue au Canada devrait être plus modérée, atteignant jusqu’à 6 % à l’échelle nationale cette année. La Colombie-Britannique pourrait toutefois voir des hausses plus marquées, avoisinant les 15 %.

Malgré ces défis, les œufs restent une source de protéines animales abordable et efficace. Aux États-Unis, certaines chaînes de restaurants, comme Waffle Warehouse, imposent déjà des suppléments sur les œufs pour compenser la flambée des coûts. Rien de tel n’a été observé au Canada pour le moment. Cependant, avec la fin des exemptions de TPS ce weekend, est-ce que certains restaurants ont discrètement ajuster leurs prix?

Si les prix des œufs augmentent des deux côtés de la frontière, la gestion de l’offre canadienne, la coordination de l’industrie et certains avantages géographiques ont permis d’éviter les pires chocs observés aux États-Unis. L’accessibilité demeure une préoccupation, mais pour l’instant, les ménages canadiens sont mieux protégés face à cette nouvelle vague d’inflation alimentaire.

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