À l’occasion de la fin de la période de consultation portant sur le projet de réglementation des pesticides, qui se terminait le 5 septembre, les Producteurs de grains du Québec dévoilent le mémoire qu’ils ont transmis au gouvernement du Québec. En résumé, les Producteurs de grains du Québec recommandent une refonte majeure du projet de réglementation, incluant la publication d’études supplémentaires permettant de soutenir les orientations du gouvernement. En effet, à ce moment-ci, le projet de réglementation est soutenu par des bases scientifiques trop faibles, ses impacts économiques ont été largement sous-évalués et l’exercice de concertation promis par le gouvernement n’a pas été réalisé.
La réglementation annoncée par le gouvernement comprend l’interdiction de l’utilisation de plusieurs pesticides, dont trois néonicotinoïdes, sauf si un avis formel d’un agronome est émis. Tout d’abord, rappelons que les néonicotinoïdes représentent moins d’un 1 % de la pression exercée sur l’environnement. De plus, soulignons que l’approche d’interdiction des pesticides a donné des résultats mitigés ailleurs dans le monde. En effet, de récentes études sur le cas européen ont démontré que l’interdiction de ce type de pesticides provoque une utilisation accrue d’autres pesticides et l’augmentation de la résistance de certains ravageurs. Une réglementation coercitive pointue, telle que celle annoncée, n’est généralement pas un bon moyen pour faire face à des enjeux de pollution diffuse.
Sur le plan économique, l’étude d’impact dévoilée par le gouvernement en estime les effets pour les producteurs à 8,5 millions de dollars par année, ce qui est très loin des coûts réels. En effet, l’étude d’impact oublie de quantifier les effets négatifs liés au remplacement de ces produits par d’autres outils de gestion des cultures, que ce soit sur le plan économique ou environnemental. L’étude admet par ailleurs ne pas avoir évalué l’incidence du respect des distances séparatrices. Sans oublier que les répercussions négatives pour les vendeurs de pesticides se traduiront par une hausse des prix payés par les producteurs. Contrairement à ce qui est avancé par le gouvernement, cette réglementation générera donc des coûts qui pourraient atteindre plusieurs dizaines de millions de dollars annuellement.
Par ailleurs, ce projet de réglementation constitue un désaveu spectaculaire de l’approche de concertation et d’accompagnement de la Stratégie phytosanitaire québécoise en agriculture 2011-2021, à laquelle adhère pourtant le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques
Selon cette Stratégie, « L’élément clé de ce nouveau chantier est qu’il met l’accent sur la concertation et l’engagement de tous : le gouvernement, les producteurs agricoles, les conseillers, l’industrie agrochimique, les établissements d’enseignement et les chercheurs. Des efforts financiers et humains accrus seront nécessaires, notamment sur le plan de la recherche, de la formation et de la sensibilisation. L’acquisition et la transmission du savoir, de même que l’ouverture à de nouvelles façons de faire, sont des conditions essentielles à une intervention judicieuse et efficace en matière de phytoprotection. »
Selon M. Christian Overbeek, président des Producteurs de grains du Québec, « l’utilisation planifiée et méthodique des pesticides, appuyée par la recherche et les services-conseils, et favorisée par une stratégie de concertation entre le gouvernement et la communauté agricole, reste l’outil le plus efficace pour atténuer l’impact des pesticides sur la santé et l’environnement. Il n’y manque que les investissements nécessaires. À la place, le gouvernement frappe la communauté agricole avec une série de mesures qui impose des contraintes draconiennes, sous-estime les impacts réels et qui fait fi de compensations appropriées pour le secteur agricole. »
Le mémoire des Producteurs de grains du Québec souligne que l’encadrement excessivement lourd, et à terme l’interdiction pure et simple, est une approche tout simplement disproportionnée et inéquitable. Il explique, point par point, comment les dispositions contenues dans la nouvelle réglementation augmenteront significativement les coûts de production et les risques, alors que les fondements scientifiques de l’approche retenue par le gouvernement sont plus que discutables et que les mesures d’accompagnement prévues ne compensent qu’une fraction de l’impact négatif à très long terme pour la production. Au final, cette réglementation aura un effet économique négatif dépassant largement les avantages environnementaux espérés.
« Les producteurs de grains connaissent parfaitement bien l’importance de protéger l’environnement. Ils vivent sur ces fermes et dans ces milieux agricoles. Ce sont aussi des entrepreneurs qui doivent s’assurer de maintenir leur compétitivité et conséquemment leur pérennité et celle des régions. Pire encore, le ministère de l’Environnement a clairement indiqué qu’il souhaite non seulement interdire complètement l’utilisation de ces pesticides mais en ajouter plusieurs autres à la liste, sans précision ni plan précis. Ces mesures sont précipitées et injustifiées.
Le gouvernement reçoit aujourd’hui nos recommandations détaillées; nous l’invitons à considérer sérieusement nos propositions. Le secteur des grains ne pourra pas supporter, à lui seul, l’accumulation de ces contraintes sans conséquences négatives sur le plan économique. Autant dans l’intérêt de l’environnement que de l’économie québécoise, un changement d’approche est nécessaire. À défaut, des gestes supplémentaires de compensation à long terme seront incontournables », conclut M. Overbeek.
Le mémoire des Producteurs de grains du Québec est disponible à cette adresse : http://www.pgq.ca/programmes-et-services/agronomie/memoire-sur-les-projets-de-reglements-sur-les-pesticides/.
Source– Producteurs de grains du Québec