La gestion de l’offre est aujourd’hui une monnaie d’échange selon Charlebois

Dans un texte en anglais publié aujourd’hui par l'Atlantic Institute for Market Studies sur le site TroyMedia, Sylvain Charlebois, professeur titulaire à la Faculté en  Management et en Agriculture à l'Université Dalhousie à Halifax.estime que :  «La gestion de l'offre 2.0 est enfin là.» Il y explique que l’industrie laitière montre enfin des signes de bon sens mais aussi que la gestion de l’offre est clairement devenue hier lors du G7 une monnaie d’échange.

 

Une nouvelle réalité mondiale évidente

Du G7 il dit d’ailleurs: «Alors que le président américain Donald Trump se dresse  sur Twitter contre les laiteries canadiennes, le Canada commence à réaliser  qu'il pourrait bien n'y avoir aucun accord de libre-échange nord-américain (ALENA) 2.0  après tout. (…) Au cours des derniers mois, ceux qui ont prêté attention  ont reconnu que notre système de gestion de l'offre,  qui protège les producteurs laitiers, peut s'adapter progressivement  à la nouvelle réalité concurrentielle mondiale.  Cela se passe sans cadre politique révisé et sans vision ni stratégie pour le secteur. Nos amis américains ne jouent manifestement pas le jeu».

Réinvestir ou quitter l’industrie

Sylvain Charlebois constate comme d’autres que le prix du lait à la ferme  baisse mais que les provinces ne réagissent pas toutes de la même façon :  «Certains rapports suggèrent que les prix du lait à la ferme  ont commencé à baisser dans plusieurs provinces, y compris au Québec.  Pendant des années, la formule de tarification pour les producteurs laitiers  était axée sur les moyennes, sans incitation pour les agriculteurs  à devenir plus axés sur le marché. Cela semble changer.  Si les prix du lait industriel chutent, les producteurs  laitiers devront réinvestir ou quitter l'industrie.  Forcer les agriculteurs à prendre une décision stratégique  quant à savoir s'ils doivent servir l'économie est extrêmement  souhaitable et attendue depuis longtemps.  Cela permettra aux producteurs laitiers motivés de développer  leurs activités et d'être reconnus par le système».

Il précise aussi que la croissance ne concerne pas seulement la production primaire :  «Récemment, Coca-Cola a annoncé qu'elle investirait 85 millions de dollars dans  son usine Minute Maid de Peterborough, en Ontario, pour fabriquer sa marque  Fairlife au Canada. (…) C'est un produit très innovant pour le marché canadien.  En retour, les agriculteurs offriront temporairement à Coca-Cola un prix spécial pour le lait.  Cet investissement est possible parce que les producteurs laitiers de l'Ontario souhaitaient  augmenter la capacité de transformation dans la province et appuyer ce qui est perçu comme  une incroyable opportunité (…) Des projets semblables ont déjà été refusés  par les producteurs laitiers, qui croyaient que cela perturberait notre système de quotas,  conçu pour répondre aux besoins du marché canadien».

Retour sur le projet Chobani

Sylvain Charlebois explique qu’en 2013, Chobani, «un producteur de yogourt grec basé aux États-Unis, a abandonné son projet de construction d'une usine à la fine pointe de la technologie de 76 millions de dollars à Kingston, en Ontario, qui aurait créé près de 1 300 emplois directs et indirects». Et que cela aurait pu être «un important facteur de changement pour l'économie locale». Il soutient que  les restrictions sur les quotas et l'approvisionnement en lait étaient des questions importantes dans la décision de Chobani de se retirer.

Des accords bénéfiques mais peu de soutien aux producteurs laitiers

«En vertu de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Europe et du Partenariat transpacifique révisé, le marché canadien des produits laitiers devient de plus en plus accessible. Ces transactions ont créé des opportunités pour maintenir l'équilibre entre l'offre et la demande. Pourtant, rien n'est fait pour soutenir notre industrie laitière, pour la rendre plus compétitive. La gestion de l'offre est essentiellement un idéal inaccessible. Les règles changent rapidement dans l'industrie, mais les systèmes dans lesquels travaillent les agriculteurs et les exploitations familiales ne sont pas réorganisés pour répondre à ces nouveaux défis et gérer des activités très différentes. Pour que les fermes laitières deviennent plus compétitives, les agriculteurs doivent développer de nouvelles compétences», écrit-il.

Une hypocrisie politique écrasante et un Québec oisif !

«Après des décennies et malgré une hypocrisie politique écrasante, de nombreuses laiteries canadiennes montrent enfin des signes de bon sens. Le Québec reste péniblement et obstinément oisif. Toutefois, d'autres provinces semblent voir les choses et prennent des mesures précises et ciblées pour démontrer comment la gestion de l'offre peut changer» poursuit-il.

«Il est évident que la gestion de l'offre est devenue une monnaie d'échange avec les États-Unis dans ce cycle de négociations commerciales. (…) Pour faire preuve d'un véritable leadership en matière de politique du commerce extérieur, Ottawa devra réfléchir à la façon de soutenir nos producteurs laitiers, car leur industrie est perturbée», conclut-il.

 

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