On a vu ces derniers mois, les prix des denrées agricoles exploser. Cette explosion des prix, reflet d’une demande accrue pour certains, spéculation pour d’autres, risque de modifier profondément le secteur agricole d’ici et d’ailleurs. Ces bons prix injectent dans le milieu agricole beaucoup de nouvel argent. Ils rendent l’activité agricole beaucoup plus intéressante. Cependant, ce nouveau contexte provoque spéculations et déséquilibres majeurs pour certaines productions tels le porc et le boeuf.
Sans faire de calcul complexe, on peut estimer que c’est plus de 750,000,000 de dollars qui seront injectés en argent nouveau dans les entreprises agricoles dans la prochaine année si les prix de la saison 2011-12 se comparent à la saison 2010-12. C’est beaucoup d’argent, mais cela ne veut pas dire que cet argent se répartira également entre les productions. Pour le secteur des céréales, ce sont de bonnes années, elles permettent enfin de réinvestir dans le matériel, les terres. Les productions animales ont vu leurs prix monter, mais leurs intrants qui sont composés principalement de grain ont monté encore plus creusant ainsi leur déficit encore plus.
Les règles environnementales de la dernière décennie ont favorisé, voir obligé, les fermes en production animale à avoir des superficies de terres importantes pour l’épandage des lisiers. Ceci a mis beaucoup de pression sur le modèle d’élevage hors-sol, qui est une ferme qui détient uniquement des bâtiments d’élevage et qui achète à l’extérieur ses intrants. Le contexte économique actuel rajoute de la pression sur ce modèle hors-sol, en le rendant pratiquement plus viable économiquement. Un producteur de porc qui cultive son maïs, est en mesure de profiter de la plus value que les prix actuels lui donnent, tout en baissant son coût de production, grâce à la valeur fertilisante du lisier. Certes, le maïs subventionne le porc, mais il permet à cette entreprise dans son ensemble de survivre et d’attendre l’ajustement des prix dans le porc. L’entreprise hors-sol n’a pas cette possibilité; elle voit ses coûts de production exploser, et en plus la disposition de ces lisiers reste une charge.
Dans un contexte où le gouvernement cherche à moderniser ses programmes de soutien, il devrait tenir compte de ce nouveau contexte, adapter ses programmes, mettre au centre de son soutien les fermes d’élevage qui cultivent et utilisent leurs grains. De tels programmes, même largement bonifiés, coûteraient globalement moins cher au gouvernement et permettraient à l’ensemble de la société de profiter de cet accroissement des prix agricoles.
Source: Yan Turmine