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Accaparement des terres agricoles dans le monde : il faut agir maintenant!

LONGUEUIL, le 28 mars 2012 /CNW Telbec/ – Alors qu’on apprenait récemment que des investisseurs privés procèdent à des acquisitions massives de terres agricoles au profit de caisses de retraite, l’Union des producteurs agricoles dévoile aujourd’hui une étude de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC) sur le phénomène de l’accaparement des terres.

Après les terres agricoles d’Afrique et d’Asie, nos propres terres seront-elles aussi la proie des grands gestionnaires de fonds? Comment expliquer les quelque 203 millions d’hectares, l’équivalent de la superficie du Groenland, de deux fois l’Égypte ou de trois fois la France, ayant fait l’objet de transactions majeures ces dix dernières années? Notre patrimoine agricole est-il destiné, lui aussi, à grossir le portefeuille des investisseurs toujours en quête de valeurs sûres? Est-il déjà trop tard?

Réalisé pour le compte de l’Union des producteurs agricoles, un nouveau rapport de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC), intitulé « L’accaparement des terres et les dispositifs d’intervention sur le foncier agricole », apporte un éclairage nouveau sur ces questions en identifiant, notamment, les pratiques spéculatives de plusieurs acteurs financiers comme un des facteurs pouvant expliquer cette explosion de transactions foncières. « En bref, la crise financière de 2008 a généré les conditions pour une véritable « ruée » vers les terres, considérée comme une valeur refuge par les gestionnaires de fonds en temps de crise[i] », a déclaré M. Robert Laplante, directeur de l’IRÉC.

Le rapport explique l’engouement des gestionnaires de fonds et de plusieurs investisseurs institutionnels pour les terres d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud par des lacunes évidentes sur le plan de la protection du patrimoine agricole. « Dans certains cas, ce sont même les autorités gouvernementales qui facilitent la vente de leurs terres pour attirer des investisseurs sur leur territoire », a ajouté M. François L’Italien, chercheur à l’IRÉC et auteur du rapport.

Pour l’IRÉC, les causes profondes du phénomène s’expliquent assez facilement. « L’augmentation de la demande de produits de base, en particulier la nourriture et les biocarburants, ainsi que la financiarisation du secteur agricole, a transformé les terres en actifs sûrs et rentables pour le portefeuille des investisseurs. Là se situe, selon nous, l’origine véritable du phénomène et c’est de cette façon que le Québec sera éventuellement entraîné dans la tourmente si rien n’est fait », a expliqué M. L’Italien.

Un phénomène aux portes du territoire agricole québécois

Le Québec a très peu de moyens, actuellement, pour mesurer l’accaparement des terres sur son territoire. Le phénomène est-il inexistant pour autant? Au contraire, car les causes de l’accaparement des terres ailleurs dans le monde sont tout aussi actives en Amérique du Nord. Pour l’IRÉC, reporter l’élaboration d’une stratégie permettant d’évaluer le phénomène au Québec et d’y répondre efficacement pourrait même entraîner des effets néfastes sur le modèle agricole québécois. Diverses pistes de solution au niveau, notamment, des ressources financières existantes dans le monde agricole québécois (à l’image du Fonds de solidarité FTQ et celui de Fondaction de la CSN), sont conséquemment abordées dans le rapport.

« Malgré nos lois et règlements visant à protéger notre patrimoine agricole et malgré la valeur foncière relativement peu élevée de nos terres, comparativement à certains pays occidentaux, il reste que le Québec n’est pas isolé du reste du monde et que plusieurs grandes fortunes québécoises et acteurs financiers privés comme Canadian Farmland Corp., Agriterra et Solifor[ii], se positionnent déjà dans le marché des actifs fonciers au Québec et au Canada », a commenté le président général de l’Union des producteurs agricoles, M. Marcel Groleau. « D’où la nécessité d’établir à très brève échéance, au Québec, un mécanisme de surveillance des transactions foncières agricoles », a-t-il ajouté.

Pour l’Union des producteurs agricoles, il y a lieu d’agir rapidement pour protéger l’une des composantes les plus fondamentales de notre modèle agricole. « Partout dans le monde, l’accaparement des terres marque la fin du concept de propriétaire exploitant. Est-ce l’agriculture que nous souhaitons? Voulons-nous vraiment d’une agriculture essentiellement pratiquée sur des terres qui n’appartiennent pas à ceux et celles qui les cultivent? Nous sommes face à un enjeu qui interpelle l’ensemble de la société et nécessite une prise de conscience et des actions concertées. » a complété M. Groleau. Parmi les pistes de solutions à explorer, la mise en place d’un Bureau d’enregistrement et de surveillance visant à répertorier et autoriser toute transaction foncière en exerçant un droit de préemption sur la base d’unités régionales, se présente comme une avenue prometteuse. Cette approche, développée en France sous la forme de Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) a d’ailleurs fait ses preuves, comme l’illustre l’étude de l’IRÉC.

Il reste que le meilleur rempart contre l’accaparement des terres demeure une politique agricole efficace et dynamisante pour le secteur. Plus le secteur agricole québécois sera robuste et prospère, moins l’échappatoire que représentent ces nouveaux acheteurs sera séduisante.

Le rapport de l’IRÉC est disponible à l’adresse : http://www.upa.qc.ca/fr/Salle_de_presse/Publications.html

[i] En 2011, les fonds de pension capitalisaient au total plus de 23 000 milliards $ d’actifs, dont plus de 100 milliards $ étaient investis dans les produits de base. Sur ce dernier montant, ce sont 5 à 10 milliards $ qui auraient été consacrés à l’achat de terres, et ce montant pourrait doubler d’ici 2015 selon plusieurs observateurs (GRAIN, 2011).

[ii] Filiale du Fonds de solidarité FTQ

Source :
Éliane Hamel
Directrice, Service des communications

Union des producteurs agricoles

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