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Le Québec est-il de trop?

Lucienne Robillard a proposé de transférer à Ottawa la collecte des impôts. Et au moment d’écrire ces lignes, Martin Coiteux se montre ouvert à la proposition. Ne serait-ce pas une forme de rationalisation administrative désirable permettant de dégonfler la taille de la bureaucratie québécoise? Dans la grande entreprise de réduction des dépenses, ne faudrait-il pas en finir avec Revenu Québec?

La nouvelle avait quand même tout pour surprendre. Traditionnellement, devant le constat des dédoublements administratifs entre Québec et Ottawa, on proposait le rapatriement des pouvoirs à Québec. Mais le Parti libéral de Philippe Couillard est en rupture avec la grande tradition politique québécoise. Pour lui, c’est le Québec qui est de trop et qui doit se tasser. Il semble davantage inspiré par l’esprit de Pierre Elliot Trudeau que par celui de Robert Bourassa.

Pour Couillard, le Québec sera canadien ou ne sera pas !

Philippe Couillard s’est juré de faire la guerre au séparatisme. Il n’en fait pas mystère, pour lui, la quête d’indépendance est absolument néfaste. En cas de souveraineté, il n’est pas loin de prophétiser une catastrophe. Pour lui, le Québec sera canadien ou ne sera pas. Mais on est en droit de se demander s’il ne désire pas, en fait, en finir avec l’idéal pourtant plus modeste de l’autonomie provinciale, assurant l’épanouissement de la société distincte québécoise?

À toute chose malheur est bon: cette proposition a semblé réveiller la CAQ, qui semble vouloir en revenir, ces jours-ci, à un nationalisme plus affirmatif. Sa réaction était de bon sens: pourquoi ne pas plutôt rapatrier la collecte des impôts à Québec? Depuis des années, la CAQ nous expliquait que la question nationale ne relevait pas des vraies affaires. Elle constate aujourd’hui que l’autonomie, pour le Québec, est une question vitale.

Sans surprise, les souverainistes du Parti Québécois ont eux-aussi dénoncé la proposition de Lucienne Robillard. Pourquoi les Québécois ne pourraient-ils pas s’administrer eux-mêmes et s’épargner ainsi les lourdeurs administratives liées au système fédéral? Jean-Martin Aussant, pendant qu’il était en politique active, ne voyait-il pas dans la production d’un seul rapport d’impôt une marque d’affirmation québécoise?

Une possibilité s’est néanmoins dégagée: celle de la construction d’un programme commun, minimal mais substantiel, rassemblant les nationalistes québécois autour des intérêts vitaux du Québec. Le PQ et la CAQ n’ont pas la même vision de l’avenir politique du Québec. Mais ils se reconnaissent les deux dans le principe du Québec d’abord. Pour la nation québécoise, le gouvernement de Québec n’est pas un gouvernement sur deux mais celui qui incarne son destin.

Un tel programme commun ne serait pas de trop. Les Québécois se sont trop longtemps détournés de la question nationale. Ils la voyaient comme une vieillerie, comme une antiquité poussiéreuse. Ils doivent redécouvrir qu’ils ont des intérêts objectivement partagés. Elle doit peser dans leurs décisions collectives.

Un tel programme, s’il poussait à une collaboration entre les nationalistes, pourrait aussi leur permettre de reprendre le pouvoir. Car tant que les nationalistes seront divisés, de manière presque suicidaire, le PLQ, qui n’a pourtant pas sa base dans la majorité francophone, dominera la vie politique québécoise.

 

 

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