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Il faudrait pourtant qu’on se parle de gouvernance

Le monde agricole québécois ne pourra plus faire bien longtemps l’économie d’un vrai débat sur la gouvernance, ce délicat partage de pouvoirs et de responsabilités qui, dans un monde idéal, a comme finalité le bien commun. Malheureusement, le moins qu’on puisse dire, c’est que c’est mal parti.

Depuis le Rapport Pronovost de 2008 sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire au Québec jusqu’au récent rapport de l’Institut sur la gouvernance, en passant par le rapport Gagné sur l’industrie du sirop d’érable, tous ceux qui ont examiné l’état des lieux avec un certain recul ont conclu à l’existence de sérieux problèmes dans la façon dont s’exerce cette gouvernance au sein du monde agricole.

L’opacité plutôt que la transparence domine, les conflits d’intérêts sont de plus en plus apparents et il semble de plus en plus difficile de se parler sans tomber dans les accusations, les dénonciations, sinon les poursuites.

Ce n’est pas sain et la réponse à ce malaise n’est certainement pas de se mettre la tête dans le sable comme le fait le ministère de l’Agriculture (la question de la gouvernance n’est même pas à l’ordre du jour des consultations sur la future politique bioalimentaire du Québec) ni de monter sur ses grands chevaux comme le fait l’UPA dès que quelqu’un mentionne le problème du monopole syndical.

L’UPA n’est pas la seule à refuser le dialogue.  L’Institut Jean-Garon dont une des missions est de susciter des débats ouverts sur les grands enjeux agroalimentaires du Québec s’est souvent heurté, autant à gauche qu’à droite, à de déconcertants ‘’on ne veut même pas en parler’’. Il y a des intégristes du bio comme il y a des intégristes de l’UPA et c’est bien dommage.

L’équilibre rompu

L’unanimité n’a jamais existé au sein du monde agricole, loin s’en vaut, mais il fut un temps où l’équilibre des forces était tel que l’émergence de grands consensus était possible. Ces consensus ont permis la mise en place de plusieurs des grandes politiques qui régissent encore ce vaste secteur, comme la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et celle sur la protection du territoire agricole. Ce n’est définitivement plus le cas aujourd’hui.

Il y a à cela plusieurs raisons, notamment le poids énorme des grands groupes tant au niveau de la production, de la transformation que la distribution qui a modifié en profondeur les rapports de force. Mais, selon nous, la cause profonde de l’actuelle crise de gouvernance est la perte de l’équilibre qui existait alors entre un ministère de l’Agriculture fort et un syndicat unique tout puissant.

Ce n’est pas l’UPA qui a affaibli le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation.  Elle n’a fait qu’occuper le vide qui s’est créé à coup de reculs, de compressions et d’abandons de responsabilités par des gouvernements successifs.  Le ‘’UPA bashing’’ n’est certainement pas la solution, mais parce qu’elle est la plus forte, la plus grosse et la plus puissante, c’est sans doute à elle à débloquer la situation.

Or, elle semble incapable de le faire.  Elle a en effet discrètement fait savoir à l’Institut que ce ne serait pas une bonne idée pour lui de soulever un débat sur le monopole syndical, un faux problème selon elle. Il est bien dommage que l’UPA ne comprenne pas qu’elle ne va nulle part en se murant dans une défensive obtue.  Le judo , cet art de profiter d’un élan contraire pour se propulser en avant serait bien mieux indiqué.

Reste le MAPAQ dont la mission naturelle serait de prendre la tête de ce nécessaire débat sur la gouvernance, mais après quelques velléités en ce sens de la part de l’ex-ministre Paradis, il est retombé dans sa douce léthargie face à ces tensions qui divisent le monde agricole. 

Définitivement, un débat serein et éclairé sur la gouvernance n’est pas pour demain.

 

 

 

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