En approuvant le programme proAction comme le demandait les Producteurs de lait, la Régie des marchés agricoles a, du même coup, rejeté la contestation de certains producteurs qui auraient voulu continuer à pratiquer l'écourtage des queues des bovins (décision 11287 le 30 août 2017). Deux producteurs MM. Renaud Lachance et Réjean Bessette demandaient aussi que la Régie permette un débat public sur le sujet.
Le règlement précise que le producteur visé par le plan conjoint doit avoir une certification au programme proAction qui confirme que sa production est conforme aux normes de « salubrité, bien-être animal et traçabilité ».
La Vie agricole a rencontré, sur sa ferme, M. Lachance qui fait l'écourtage (il dit écourter et non couper les queues) depuis plus de 20 ans pour des raisons de salubrité pour ses animaux et de sécurité pour ses employés.
Il y aurait 55 fermes au Québec pratiquant la caudectomie selon M. Lachance qui a monté, avec cinq autres producteurs, un site web http://www.queueecourtee.com et une page Facebook https://www.facebook.com/Queueecourtee/ pour informer le public. Les vétérinaire, les Producteurs de lait… M. Lachance dit que personne ne veut les rencontrer.
« La ferme Drapeau et Bélanger de Sainte-Françoise (Centre-du-Québec) fait l'écourtage des queues, cela ne l'a pas empêché de remporter le prix Jeunes agriculteurs d'élite du Canada en 2016 »,dit-il.
Des administrateurs de PLQ pratiquant la coupe des queues ?
M. Lachance ajoute que deux administrateurs actuels des Producteurs de lait du Québec font aussi cette pratique. M. Lachance ne milite pas pour que cela soit une pratique généralisée, ce n'est pas indiqué dans toutes les unités de production (bio, élevage, etc).
M. Lachance admet que le sujet est « sensible » auprès des consommateurs mais il invite tous ceux qui voudraient voir comment sont ses animaux dans l'étable. Les vaches sont en stabulation libre (Il ne retournerait pas à une étable attachée, précise-t-il) et ne vont pas dehors. « Dehors sans queues pour chasser les mouches c'est ça qui serait cruel » dit-il. Pour M. Lachance le bien-être animal est une préoccupation pour le producteur aussi car un animal bien traité donne un meilleur rendement. La ferme de M. Lachance c'est 225 vaches donnant entre 35 et 39 litres par vache par jour. Avec un robot traiteur c'est moins de stresse pour l'animal.
Comment se fait l'écourtage des queues? M. Lachance explique : « On met un élastique aux jeunes veaux et après trois semaines, ça tombe. On ne coupe pas avec un sécateur! »
Où était l’UPA sur le sujet ?
La décision de la Régie est basée sur des études scientifiques. Le Conseil national pour les soins aux animaux d'élevage (CNSAE) a élaboré un code « avec rigueur scientifique » http://www.nfacc.ca/codes-de-pratiques/bovins-laitiers.
Ce code indique qu'on « ne doit pas amputer les queues des animaux laitiers, sauf pour des raisons médicales ». L'idée que cela améliorerait la sécurité des travailleurs et la santé des animaux est invalidée par ce code.
Le code a été adopté en 1990 et mise à jour en 2009 « avec la collaboration du Conseil national pour le soin des animaux d’élevage, de la Fédération canadienne d’assistance aux animaux, des Producteurs laitiers du Canada (PLC), des Producteurs de lait du Québec (PLQ) ainsi que de scientifiques, vétérinaires, experts, producteurs et citoyens ».
L'information contenue dans le code « est sujette à une révision périodique tenant compte des changements dans les pratiques de transport, les exigences et la réglementation gouvernementales ». M. Lachance aurait bien voulu voir l'UPA intervenir. « On paie des cotisations mais on ne nous consulte plus » déplore-t-il.
Pour PLQ la position de M.Lachance est très marginale
« ProAction vise à certifier que l'ensemble des producteurs de lait au Canada respecte le code des bonnes pratiques ». Le porte-parole des Producteurs de lait du Québec, M. François Dumontier estime que comme le code est basé sur un consensus scientifique assez large, il sera respecté.
« J'assiste à toute les réunions depuis onze ans et je peux vous dire que M. Lachance a eu l'occasion à plusieurs reprises de présenter son opinion, de poser des questions ». M. Dumontier ajoute : « On connaît bien sa position. Il n'est pas très majoritaire dans ce point de vue » et souligne qu'à son avis cette pratique était devenue très marginale.
Il y aura des visites qui se feront sur les fermes et le respect du code des bonnes pratiques en vigueur depuis le 1er septembre comptera pour l'accréditation pour le programme proAction, donc pas seulement le bien-être animal. Selon M. Dumontier cela pourrait éventuellement être contenu dans une loi.
Autres pratiques moins barbares ?
Le producteur laitier Lachance attire l'attention sur d'autres pratiques. Le code permet la taille des dents des porcs (http://www.nfacc.ca/codes-de-pratiques/porcs-code#section3) et de la queue des porc et des moutons (http://www.nfacc.ca/moutons-code#section5).
Le code permet, fait remarquer M. Lachance, même le marquage au fer rouge et l'écornage. « Ça je ne ferais pas ça devant un consommateur » mais ajoute-t-il « ceux qui sont contre l'écourtage des queues, qu'ils viennent me voir, je vais tout leur montrer sur la ferme ».
Selon le programme proAction l'amputation de la queue est interdit depuis le 1er septembre 2017. M. Lachance précise qu'il a six mois pour en appeler de la décision de la Régie. Au moment d’aller sous presse, MM. Bessette et Lachance défendaient leur point de vue sans avocat mais maintenant ils vont chercher à avoir un appui juridique, disent-ils.
Liens
USA
http://www.fwi.co.uk/livestock/farmers-reminded-tail-docking-is-illegal.htm
En France
En Espagne
https://www.fawec.org/fr/fiches-techniques/32-bovin/133-effet-de-l-ecornage-et-de-l-ebourgeonnage-sur-le-bien-etre-des-bovins
En Suisse
https://www.blv.admin.ch/blv/fr/home/tiere/tierschutz/nutztierhaltung/rinder/eingriffe-rind.html
Vétérinaires
https://www.veterinairesaucanada.net/documents/amputation-de-la-queue-des-bovins-laitiers
Lachance à Radio-Canada en mars