Le phosphore est un élément chimique essentiel à la vie. Un apport inadéquat en phosphore ralentit la croissance des plantes et en diminue le rendement. Au cours de leur période de croissance, les plantes absorbent le phosphore présent dans le sol, qui est par la suite retiré des champs au moment de la récolte des cultures. C'est pourquoi de l'engrais contenant des composés de phosphore est souvent ajouté au sol.
Toutefois, l'engrais phosphaté qui n'est pas absorbé par les plantes au cours de la campagne agricole demeure dans le sol et peut se lier encore plus fortement au sol que l'engrais fraîchement épandu. La disponibilité du « phosphore résiduel » pour les plantes est encore une énigme. Comme il est fortement lié au sol, il est possible que les analyses de la présence du phosphore dans le sol ne permettent pas de le détecter. Ces analyses servent à mesurer la teneur en phosphore inorganique facilement assimilable en vue de déterminer les besoins en engrais. Les chercheurs d'Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) mènent des études sur le phosphore résiduel aux quatre coins du Canada dans le cadre d'un projet sur le phosphore dirigé par Noura Ziadi, Ph. D., au Centre de recherches d'AAC à Sainte-Foy.
« La disponibilité des parcelles à long terme est essentielle à l'étude des nouveaux problèmes qui surviennent, comme la surapplication possible d'engrais phosphatés. Bien que nous sachions que les plantes n'absorbent pas l'entière quantité d'engrais épandue, nous ne savons pas comment les composés de phosphore contenus dans le sol interagissent avec les autres éléments du sol, les microbes et les plantes au fil du temps. » déclare Barbara Cade-Menun, Ph. D., chercheure scientifique, Agriculture et Agroalimentaire Canada
Barbara Cade-Menun, Ph. D., du Centre de recherches sur l'agriculture des prairies semi-arides (CRAPSA), à Swift Current (Saskatchewan) dirige l'une des études du projet sur le phosphore. Les membres de son équipe mènent des études sur un ensemble de parcelles agricoles établies en 1967. Jusqu'en 1995, on a ajouté à ces parcelles des engrais phosphatés et azotés. Par la suite, chaque parcelle a été divisée en deux; une seule partie reçoit maintenant un apport en phosphore. Les chercheurs peuvent ainsi étudier de façon contrôlée les effets à long terme du phosphore résiduel.
La croissance des plants de blé sur les parcelles sans apport en phosphore a grandement surpris les chercheurs. Bien que les analyses du sol révèlent de très faibles teneurs en phosphore pour ces parcelles, leur rendement et la concentration en phosphore des grains étient identiques à ceux des parcelles fertilisées.Les plants non fertilisés ont pu absorber le phosphore résiduel ainsi que le phosphore provenant d'autres sources comme le phosphore organique des matières végétales en décomposition.
Cette étude devra être reproduite avec d'autres cultures dans d'autres types de sol et de conditions environnementales. Les résultats enregistrés suggèrent toutefois que les producteurs pourraient redéfinir leur utilisation de l'engrais phosphaté. L'absorption par les plantes du phosphore se trouvant déjà dans le sol permettrait aux producteurs de réaliser des économies et réduirait les risques de perte de phosphore dans les plans d'eau avoisinants.
Le Centre des sciences structurelles de la Saskatchewan de l'Université de la Saskatchewan et le Centre canadien de rayonnement synchrotron ont contribué aux travaux de Mme Cade-Menun.
Les principales découvertes
- Pendant une période de 15 ans (1995-2010), le rendement des plants de blé des parcelles du CRAPSA n’ayant pas reçu d’apport en phosphore était identique à celui des plants fertilisés.
- Ces plants ont pu absorber le phosphore résiduel accumulé dans le sol, ce qui remet en question les idées reçues concernant l’apport en engrais additionnel.