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Changer pour mieux avancer

Pierre-Olivier Gaucher a dû changer sa façon de cultiver la terre pour pouvoir continuer d'en vivre. Le producteur de Contrecoeur s'est converti à «l'agriculture écologique intensive», lui qui est un précurseur de cette façon de faire qui commence à se répandre au Québec et en Ontario.

Au début des années 2000, il produisait des petits fruits selon ce qu'il appelle «l'ancienne» méthode. Celle qu'utilise pourtant encore la majorité des producteurs au Québec et qui dépend encore beaucoup trop de la pétrochimie à son goût.

Puis en 2005, il a plié les genoux. Il a tout vendu pour éviter la faillite. «Tout le monde a été payé, mais nous avons dû faire une rétrocession, raconte-t-il. Ça n'avait pas de sens, mais il a fallu que j'aille jusqu'au bout de la connerie. Il m'en restait peut-être encore assez pour brûler du diesel, mais j'ai décidé d'arrêter.»

Pourtant, deux ans auparavant, il voyait bien qu'il se dirigeait dans le mur avec cette façon de faire. «J'étais allé visiter une ferme dans l'État de New York et en revenant, dans l'auto, j'ai eu une longue discussion avec mon partenaire d'affaires, se souvient-il. Avec les sols et l'eau que nous avons, et une saison qui nous permet d'enlever tous les insectes, il y avait certainement quelque chose de mieux que nous pouvions faire. On était d'accord, mais on a continué comme ça…»

Pierre-Olivier Gaucher a ensuite fait quelques voyages en Europe où il est allé s'inspirer des façons de faire en agroécologie. En revenant, il a adapté ses connaissances aux conditions climatiques différentes que nous avons au Québec.

Son procédé consiste notamment à planter en semis direct au travers une couverture végétale permanente qui provient des espèces de céréales de ses cultures précédentes. Il peut y en avoir jusqu'à 10 ou 12 qui sont mélangés, mais jamais il ne laissera son sol à découvert.

Le tout, dit-il, permet de redynamiser les sols et de les rendre pratiquement autosuffisants. Le couvert permet notamment de remettre en circulation les éléments nutritifs du sol pour rendre la culture suivante à terme.

Son modèle, pour lequel il est un précurseur au Québec, offre également l'avantage de profiter de chacune des journées d'ensoleillement en variant les cultures. Par exemple, il plante à l'automne des variétés qui résisteront à l'hiver pour pouvoir les récolter au printemps. Il tire ainsi profit du maximum de journées où on peut faire de l'agriculture au Québec. 

Cette façon de faire, observe Pierre-Olivier Gaucher, est beaucoup moins susceptible aux aléas de la météo. En limitant l'utilisation de la machinerie, elle entraîne bien entendu une diminution des coûts à la ferme.

La qualité de la production permet également des bénéfices. «J'ai vu des gains de 900 litres sur un troupeau de 75 vaches, en raison de la qualité du fourrage», indique celui qui agit comme consultant pour la société Terralis.

Pour lui, la façon de faire traditionnelle, qui a recours aux produits chimiques et aux labours, ou même le biologique, qui requiert énormément de machinerie, est un non-sens. «La zone vivante, où il se fait 85% des échanges et où se trouve 75% de la vie active dans le sol, se fait dans une hauteur qui correspond aux dents d'une fourchette. Si tu viens bouleverser le sol sur cinq, six ou huit pouces, c'est comme s'il venait de passer un tsunami sur ta maison, illustre-t-il. Les spécialistes ne connaissent que 0,5% de la vie microbienne des sols.»

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