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Qui nourrira les Chinois aujourd’hui et demain ?

La question qui était posée à Zhan Su, professeur titulaire de la Chaire Stephen-A.-Jarislowsky en gestion des affaires internationales du département de management de l’Université Laval lors du déjeuner de l’ACRA qui précédait le congrès de l’UPA à Québec le 4 décembre dernier, était de savoir qui nourrira la Chine aujourd’hui et demain ? D’emblée M. Su a reconnu que la situation actuelle et les conflits commerciaux en cours n’ont rien de bon notamment pour l’exportation du canola ou des porcs canadiens. Mais, dit-il, «il faudrait mieux connaitre les Chinois pour mieux comprendre».

«La Chine est gourmande, c’est inscrit dans son histoire, mais elle a été privée à cause de situations économiques du passé et de certaines famines fréquentes avant les régimes communistes de 1949 et même au-delà jusqu’au début des années 80». Pour M.Su, il faut pour commercer avec la Chine comprendre son histoire pour comprendre sa psychologie actuelle.

Le régime totalitaire actuel serait en partie dû aux craintes que les Chinois ont de leur passé. « Je vous rappelle que dans les années 79/80 tout était rationné en Chine et même dans une grande ville comme Pékin», de dire le professeur.

Le passé douloureux permettrait donc de tolérer le totalitarisme pour survivre sur le plan économique.

La Chine, une nécessité dans l’économie du futur !

La Chine aujourd’hui consomme plus de 50 % du porc produit dans le monde. Les défis sont donc majeurs pour les entreprises de l’agroalimentaire chinoises, mais depuis 2008, les Chinois sont plus soucieux de la qualité sanitaire et nutritionnelle, ce qui ouvre un marché fort intéressant pour le Canada. L’agriculture de la chine c’est 7,5 % de son PIB, mais ils ont besoin d’importer, car la Chine vit aussi avec son passé pas très sécuritaire dans le domaine agroalimentaire. Les Chinois manquent de confiance dans les industries de l’agroalimentaire chinoises: «C’est là, la chance canadienne», de dire M.Su.

La jeunesse pour avenir

Il faut savoir que la génération des années 90 sera responsable de la croissance de la consommation en Chine d’ici 2030. En 2017, les ventes de produits agroalimentaires commandées par internet ont concerné plus de 150 millions de consommateurs en Chine. En 2018, c’était déjà 200 milliards de mets consommés en ligne.

Profiter des faiblesses de la chine

Le pays ne détient que 6,5 % des réserves d’eau de la planète et 8,5 % des terres arables du globe. Il est donc évident que si le Canada joue bien son jeu, il fait partie de la solution. Un élément peu connu dévoilé par le professeur Su est la taille moyenne des fermes en Chine qui n’est que 0,6 ha même s’il y a bien certaines grosses exploitations comme des fermes laitières de 10 000 vaches. Et la terre appartient à l’État, il n’y a donc pas de privatisation autorisée ce qui limite considérablement le développement de grandes unités.

«Le maintien en Chine de petites exploitations est bon pour le Canada exportateur, de plus les techniques d’irrigation sont reconnues inefficaces en Chine et le capitalisme d’État est un frein au développement de grandes structures terriennes», d’expliquer Zhan Su, démontrant ainsi les stratégies de développement possibles pour le Canada.

«On y retrouve une utilisation massive de pesticides : la Chine utilise 30 % des pesticides du monde et la chine consomme 40 % des pesticides du monde». Alors si le Canada est souvent décrié par ici pour l’utilisation de fertilisants, on notera que lorsque les produits arrivent en Chine ils sont plutôt vus comme sains : tout est donc une question d’échelle de valeurs !

La Chine, un grand acteur agricole

La Chine joue toutefois un rôle majeur dans l’industrie agricole mondiale : il faut savoir que la Chine c’est 90 % de la production céréalière mondiale. Le pays est 1er producteur, de blé, de riz, de pommes de terre, de porc et de volaille. Et 2e dans la production de  maïs

La Chine n’a pas dit son dernier mot : elle finalise son 13e plan agricole (2016/2020) pour parvenir à l’autosuffisance alimentaire, ce qui a amené la Chine à mettre 120 millions d’hectares sous protection permanente.

La faiblesse des Canadiens

Le Canada malgré ses avantages évidents comme ses réserves d’eau et les bonnes conditions sanitaires de ses produits agricoles entretient certaines faiblesses, dont sa dépendance aux États-Unis.

Et Zhan Su rappelle de se méfier de nos croyances : « Les Chinois n’attendent pas la démocratie comme le croient les Occidentaux. Oui, le conflit entre les États-Unis et la Chine est une opportunité, mais le Canada dépend trop des Américains. Les opportunités d’affaires en Chine pour les Canadiens sont donc actuellement limitées et le Canada a intérêt à penser diversification pour son agriculture».

M.Su a abordé en conclusion de sa conférence la situation de la compagnie Huawei dont une des dirigeantes chinoises a été arrêtée au Canada ce qui devient une problématique majeure pour le Canada dans ses relations avec la Chine. «Si les tribunaux ne reconnaissent pas culpabilité de Mme Meng Wanzhou le Canada s’en sortira pas si mal, mais si la décision d’extradition redevient politique le Canada risque d’être perdant dans les deux cas, qu’il se plie aux volontés des Américains ou des Chinois», dit-il.

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