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La pénurie de main d’œuvre, un défi de société

L’agriculture comme beaucoup d’autres secteurs vivent de sérieux problèmes de main d’œuvre. Beaucoup d’entrepreneurs agricoles sont confrontés de plus en plus à cette problématique de recruter du personnel, que se soit permanent ou saisonnier. Aujourd’hui la main d’œuvre est un élément majeur dans la décision d’investir, la capacité de l’entrepreneur à trouver des solutions pour pallier au problème de main d’œuvre fait la différence entre un projet réussi ou son abandon. Nos gouvernements sont extrêmement sensibles à cette problématique, car c’est le niveau de vie du pays qui est en jeu et le genre de pays où l’on veut vivre. La volonté ou les réticences des gouvernements face à certaines solutions expliquent bien ces enjeux sociaux à long terme.

Au Canada et au Québec, nous avons une excellente économie, si l’on se compare à l’ensemble de la planète. Pendant que certaines régions du monde sont prises avec du chômage chronique, ici tout ce qui bouge (même ce qui ne bouge pas fort) peut travailler. Ici notre bien être est lié à une activité économique qui concerne une très grande partie de la population, la richesse qui découle de cette activité économique est mieux répartie que dans d’autres pays, où elle se concentre dans certaines catégories de la population. Le plus grand succès de notre économie c’est que celle-ci est encore en croissance, cette croissance se traduit en cette volonté que beaucoup d’entrepreneurs agricoles veulent en faire plus, grossir leur ferme ou se diversifier, les projets ne manquent pas. Répondre à cette croissance de l’économie amène cependant de plus en plus de défis qui impacteront notre bien être individuel et collectif.

Il y a des solutions : l’automatisation, les gains de productivité et l’éducation en sont les principales, ce sont cependant des actions à long terme.

L’agriculture est d’ailleurs un exemple pour ces solutions, regarder ce qui se faisait il y 25 ans, toute une différence!

Imaginez si l’agriculture québécoise n’avait pas fait ces gains de productivité, si elle n’avait pas modernisé ses pratiques, l’on ne parlerait pas d’autosuffisance, mais plutôt d’approvisionnement.

Les investissements actuels pour augmenter la productivité, telle l’automatisation de certaines tâches, sont les solutions pour pallier au manque de main d’œuvre de demain. Ces investissements demandent cependant un niveau d’éducation supérieur, il est difficile de demander à quelqu’un d’utiliser efficacement un robot de traite s’il a de la misère à lire et s’il maitrise mal des concepts simples de mathématique. Nos gouvernements ont bien compris cela, et ils investissent depuis longtemps.

Une autre façon de pallier à la pénurie de main d’œuvre, c’est la démographie. Au Québec cela se traduit par l’immigration, puisque notre natalité n’est pas suffisante. Cette solution, intéressante à court terme est assez complexe et peut avoir des conséquences majeures sur notre bien-être collectif. L’immigration a été un succès en agriculture, l’on a qu’à penser au immigrants européens qui sont venus s’établir au Québec dans les année 60 et 70. L’utilisation de plus en plus répandue de travailleurs temporaires étrangers en agriculture est une solution, cependant elle devrait être temporaire, il ne faudrait pas que l’on bâtisse des modèles d’affaires sur la disponibilité de ce type de main d’œuvre, l’on se retrouverait alors dans une situation sociale problématique comme la connaissent certaines régions du monde. On a qu’à penser à l’Afrique du Sud ou certains états américains qui sans cette main d’œuvre pauvre et socialement exclue, verraient leur agriculture disparaitre.

Un très bon exemple du problème et de sa complexité, c’est le commentaire de notre premier ministre, Francois Legault, « Moi, mon obsession, c’est d’augmenter le salaire moyen au Québec. […] Chaque fois que je rentre un immigrant qui gagne moins de 56 000 [dollars], j’empire mon problème. ». Sur le coup, j’ai réagi négativement à cette déclaration, comme bien du monde, comme entrepreneur je trouvais cela déraisonnable et surprenant d’un ancien entrepreneur. Cependant monsieur Legault n’est plus entrepreneur, il est premier ministre, il se doit d’avoir une vision à plus long terme sur notre économie, et dans une perspective à long terme sa déclaration est plus qu’intéressante et mérite réflexion. Je pense qu’individuellement et collectivement, je préfère augmenter mon économie avec moins de monde, mieux payé qui peut profiter de notre société que de le faire avec des personnes qui par leurs conditions ou statuts de travail sont exclues de notre société. Cependant pour chacun des entrepreneurs que je connais le défi est journalier et il est immense.

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