Dans les douze derniers mois les médias français se sont intéressés à la fiscalité des coopératives agricoles dans l’hexagone et certaines découvertes laissent pantois ! Une enquête notamment de France Inter a dévoilé que les coopératives agricoles outre-Atlantique deviennent des multinationales «aux filières opaques» loin de leur première mission de regrouper des producteurs. «Derrière les coopératives il y a des marques qui génèrent des centaines de millions d’euros de bénéfices», rappelle France-Inter.
«Sur le papier, l’idée semble belle: les coopératives agricoles créées par les agriculteurs pour les agriculteurs, ont pour objectif de valoriser leur production, mais aussi leurs territoires et de faire redescendre la valeur ainsi créée vers les producteurs», de préciser le service d’enquête de France Inter. L’enquête rappelle qu’en France, les coopératives agricoles regroupent aujourd’hui trois agriculteurs sur quatre, une marque alimentaire sur trois et emploient plus de 180 000 salariés, mais qu’au fil des ans elles se sont rachetées entre elles, voire ont racheté des concurrents privés «pour devenir des multinationales générant parfois des milliards d’euros de chiffre d’affaires.»
Les coopératives agricoles sous la loupe en France!
Cette enquête met en lumière le cas de la coopérative Tereos (qui produit et transforme du sucre), qui selon France Inter, réalise 80 % de son chiffre d’affaires en dehors des maisons mères des coopératives. On parle d’un «organigramme tentaculaire et des optimisations fiscales à l’étranger».Comme ici les agriculteurs, censés diriger la stratégie de la coopérative, se demandent parfois ce qui se passe à la direction!
La perte de contrôle des producteurs ?
Véronique Le Floc’h, éleveuse laitière, membre du syndicat Coordination rurale, qui fut coopératrice pour Sodiaal s’étonne auprès de France-Inter que par exemple Yoplait, filiale de Sodiaal, avec dit-elle « 4000 euros de chiffre d’affaires à la minute» ne trouve pas le moyen de consolider ce que reçoivent les agriculteurs !
De son côté le sénateur UDI d’Indre-et-Loire Pierre Louault déclare : «Les producteurs qui ne sont pas tout à fait dans le discours de la coopérative sont mal vus, marginalisés, voire exclus. Tout ceci n’est pas très sain.»
Le modèle initialement vertueux des coopératives est-il en danger avec la mondialisation ?
Sodiaal se défend et rappelle être : «une coopérative française, dont la mission est de valoriser le lait de ses sociétaires, produit en France». Et elle dit regretter d’être considérée « à tort», dans la catégorie multinationale.
Déjà en 2018 dans le journal Les Échos on apprenait que « De plus en plus d’agriculteurs reprochent à leurs coopératives de s’être éloignées d’eux». Alors que les coopératives agricoles en France génèrent 40 % du chiffre d’affaires total de l’industrie agroalimentaire, les agriculteurs ont le sentiment que ces outils, qui sont les leurs et qu’ils financent, leur échappent. Il semble par ailleurs que plus la coopérative est grosse, plus les critiques sont présentes et virulentes.
Un débat naît alors à savoir si les coopératives face à une économie libérale de plus en plus la norme mondiale doit elle aussi faire des choix d’investissement similaire à ses compétiteurs du privé ! La création de filiales amenant de la souplesse et de l’efficacité rencontre alors la critique sur le chemin de la transparence.
Une coopérative a des devoirs, dont l’obligation de constituer une réserve et l’affectation des trop-perçus ou des excédents à la réserve et à l’attribution de ristournes aux membres au prorata des opérations effectuées entre chacun d’eux et la coopérative. Doit-elle au-delà de cela avoir de la prévisibilité sur les marchés internationaux et y agir ?
Ce qu’il faut savoir sur les coopératives au Canada:
Au Canada, les 9 000 institutions coopératives de crédit et autres coopératives détiennent des actifs d’une valeur totale de 266 milliards de dollars et un chiffre d’affaires de 47 milliards de dollars et elles emploient 156 000 personnes (Industrie Canada, 2009).
Il faut savoir par ailleurs que les coopératives présentent un taux de survie beaucoup plus élevé que les entreprises traditionnelles. Après 5 ans, ce sont 62% des coopératives qui sont toujours actives contre 35% et après 10 ans, l’écart se creuse passant de 44% du côté des coops comparativement à 20% pour les entreprises traditionnelles.