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De la nécessité d’adopter une nouvelle approche pour assurer la prospérité future du secteur agroalimentaire canadien en réponse aux temps changeants

John Weekes

Alors que les répercussions des changements climatiques pèsent de plus en plus lourd sur la production alimentaire partout dans le monde, il est clair qu’il sera de plus en plus difficile de fournir un approvisionnement alimentaire adéquat à une population mondiale croissante. Pour s’attaquer à ce problème, le prochain gouvernement canadien devrait établir un plan stratégique mettant à l’avant-plan le secteur canadien de l’agriculture. De nombreuses possibilités s’offrent aux producteurs canadiens pour ce qui est d’augmenter leur production de façon durable sur le plan environnemental. Toutefois, pour y arriver, il faudra modifier le cadre juridique, y compris les règles du commerce international. L’agriculture est un important secteur pour la croissance économique du Canada dans le contexte de la reprise après la pandémie de COVID19. En effet, les recherches de l’Institut canadien des politiques agroalimentaires (ICPA) ont révélé qu’en Ontario, l’industrie agroalimentaire représente une plus grande part de l’économie que l’industrie de la fabrication de matériel de transport.

L’Union européenne et les États-Unis ne peuvent pas résoudre à eux seuls le problème de la pénurie alimentaire mondiale

Comment peut-on accroître la production alimentaire mondiale de façon durable sur le plan environnemental? On constate rapidement que très peu de pays sont des exportateurs nets de produits agricoles. Ceux-ci se trouvent dans le Nouveau Monde : le Canada, l’Argentine, l’Uruguay, le Chili et le Brésil, ainsi que l’Australie et la Nouvelle-Zélande. L’Union européenne (UE) et les États-Unis sont d’importants exportateurs de produits particuliers, mais ils sont aussi d’importants importateurs de produits alimentaires. De toute évidence, ils ne peuvent pas résoudre à eux seuls le problème de la pénurie alimentaire mondiale. De plus, ils réalisent une grande partie de leur production excédentaire en puisant dans leur capital naturel, par exemple en vidant les aquifères non renouvelables pour irriguer les cultures dans les zones sèches. Une fois que cette eau aura disparu, la production agricole qu’elle a soutenue disparaîtra aussi.

Dans de nombreux marchés, divers obstacles continuent de nuire à nos exportations.

L’obtention d’un accès efficace aux marchés étrangers pour y distribuer les produits alimentaires et agricoles du Canada a toujours été une priorité pour les négociateurs commerciaux canadiens, mais cela n’est pas une tâche facile. Bien que le Canada ait conclu un nombre impressionnant d’accords de libre-échange, les exportateurs dénoncent le fait que, dans de nombreux marchés, divers obstacles continuent de nuire à nos exportations. Par exemple, de nombreux fournisseurs canadiens qui exportent de la viande à l’UE estiment que leur accès tarifaire préférentiel apparent est limité par les règlements de cette dernière qui, selon eux, sont inutilement contraignants. Ce qui nuit davantage aux producteurs canadiens, ce sont les importantes subventions qui ont un effet de distorsion sur la production sur les principaux marchés des produits agricoles canadiens dans les pays dominants sur la scène politique, notamment les États-Unis, les pays de l’UE, la Chine et l’Inde. Le futur programme commercial du Canada devrait tenir compte de ces préoccupations que partagent d’autres exportateurs nets de produits alimentaires.

À la table du Sommet du G7, le Canada est le seul pays exportateur net d’aliments

Les producteurs agricoles des pays les plus peuplés ont beaucoup d’influence politique, mais ces pays ne dépendent pas de l’agriculture pour leur subsistance économique. Ces pays détiennent aussi beaucoup de pouvoir dans les affaires internationales, y compris dans les négociations commerciales. À la table du Sommet du G7, le Canada est le seul pays exportateur net d’aliments, ce qui rend difficile l’obtention d’un nouveau consensus sur la réforme des règles du commerce agricole avec nos partenaires traditionnels.

Le Canada devrait s’adresser stratégiquement à d’autres pays exportateurs de produits alimentaires pour étudier avec eux la façon de négocier de manière efficace afin d’établir des règles qui permettront à ces pays d’obtenir des revenus justes et stables pour leurs produits agricoles. Il est essentiel de veiller à ce que les règles entourant le commerce international favorisent les bons signaux de prix pour encourager la production d’aliments d’une manière durable sur le plan environnemental. Il ne s’agit pas d’un objectif inatteignable, mais il nécessitera un leadership politique, beaucoup de travail technique et une explication aux autres pays de la nécessité de cette approche pour nourrir le monde de façon durable.

Un rôle déterminant pour le Canada

Le Groupe de Cairns, qui réunit des pays exportateurs de produits agricoles, a joué un rôle de premier plan dans la réforme du commerce agricole au cours des négociations commerciales du Cycle d’Uruguay qui ont mené à la création de l’Organisation mondiale du commerce. Grâce à son leadership politique et à son analyse technique, l’Australie a été la force motrice à l’origine de la création de ce groupe, avec un solide appui du Canada et d’autres pays. Avec le bon leadership politique, le Canada pourrait prendre l’initiative de créer un nouveau groupe consacré au double objectif d’éliminer les obstacles restants au commerce agricole et de veiller à ce que les efforts visant à nourrir le monde se fassent d’une manière durable sur le plan environnemental.

À l’ère postpandémique, il devient de plus en plus évident que les plus grands défis mondiaux nécessiteront une coopération internationale. En prenant l’initiative maintenant, le Canada peut jouer un rôle déterminant dans l’établissement des assises du succès.

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