A-t-on encore besoin d’un ordre des agronomes au Québec?
Au congrès de l’UPA en novembre dernier, le sujet de la réforme de la Loi sur les agronomes a refait surface. L’UPA a profité de la tribune de son congrès et de la présence du ministre de l’Agriculture pour réitérer son opposition à la réforme envisagée, particulièrement de ne plus exclure du champ d’exercices des agronomes, les actes posés par un agriculteur.
Selon l’UPA, un producteur ne pourrait plus prendre de décisions sans avoir recours aux prescriptions d’un agronome, un cauchemar administratif et financier. Le champ d’exercice revendiqué par les agronomes est très vaste, voire trop vaste, la réforme de la loi risque effectivement de donner de grands pouvoirs aux agronomes, sur des sujets qu’il n’y a pas lieu d’être. Le risque de dérive corporatisme est assez grand, avec des coûts financiers et administratifs dont on n’a pas besoin. Les producteurs agricoles n’en ont réellement pas besoin.
La loi actuelle définit de façon très large le champ d’exercice des agronomes, il se lit comme suit : « L’exercice de la profession d’agronome comprend tout acte posé moyennant rémunération, qui a pour objet de communiquer, de vulgariser ou d’expérimenter les principes, les lois et les procédés, soit de la culture des plantes agricoles, soit de l’élevage des animaux de ferme, soit de l’aménagement et de l’exploitation générale des sols arables, soit de la gestion de l’entreprise agricole ».
Avec cette définition assez large, l’ordre des agronomes s’est mis à revendiquer de multitude champs d’exercices, en gestion, en environnement, en chimie, en construction et j’en passe.
L’ordre des agronomes a sûrement oublié depuis longtemps le proverbe « qui trop embrasse mal étreint ». Plusieurs de ses champs d’exercices sont soit partagés ou contestés avec d’autres ordres. Le rôle des technologues dans la pratique agronomique est loin d’être clair, quoi qu’en dise l’ordre des agronomes.
Avec le temps, par besoin et par manque d’agronomes, plusieurs champs d’exercices ont été occupés par des techniciens, ceux-ci sont devenus par formation et par la pratique très compétents, j’en ai d’ailleurs côtoyé beaucoup au cours de ma carrière. Mais encore là, l’ordre des agronomes refuse de voir cela, et leur exige une supervision, même si celle-ci est faite par un jeune agronome sortant de l’école.
L’ordre des professions demande d’ailleurs, depuis des années, à l’ordre des agronomes de préciser ses champs d’exercices. La réponse de l’ordre a été d’étendre encore plus son champ de pratique et de revendiquer plus ardemment son exclusivité.
Les ordres professionnels de plus en plus contestés
On est pourtant dans un monde d’ouverture, les ordres professionnels dans le monde, sont de plus en plus contestés et sont vus, notamment par l’OMC et l’Union européenne, comme du corporatisme.
Et s’il n’y avait pas d’ordre des agronomes au Québec, que se passerait-il ? Il n’y a pas d’ordre des agronomes au Canada et aux États-Unis, en France non plus. Peu de pays ont un ordre professionnel pour l’agronomie.
La réglementation gouvernementale assure la protection du public et met les balises de la pratique agronomique : c’est d’ailleurs mieux ciblé et plus efficace.
Un ordre professionnel des agronomes : est-ce encore utile?
De plus avec les médias sociaux et l’intelligence artificielle qui s’amène à grande vitesse, tout un chacun pourra avoir des conseils agronomiques. La réponse de l’ordre des agronomes du Québec : elle s’apprête à exclure près de la moitié de ses membres du conseil agronomique, sous prétexte qu’ils vendent des intrants.
Le ministre au congrès de l’UPA a dit qu’il consulterait avant de redéposer son projet de loi, il pourrait aussi consulter pour voir si un ordre professionnel des agronomes est encore utile en 2022. L’objectif étant de mieux protéger le public avec le moins de corporatisme possible.
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