Elles sont quatre compagnies, puissantes comme des États, à dominer le commerce mondial des céréales. Les «ABCD»* ont réalisé des bénéfices exceptionnels depuis 2021 grâce à la flambée des prix sur les marchés de gros et sont accusées de manquer de transparence sur fond de crise alimentaire mondiale. Les cours du blé, du maïs ou des huiles végétales ont atteint des sommets en mai 2022 sur des marchés bouleversés par la pandémie, puis par la guerre en Ukraine. Ils sont depuis redescendus, mais restent historiquement élevés. «Leur puissance, souvent occulte, n’égale que leur discrétion», résume au Figaro Bruno Parmentier, ingénieur et économiste, spécialiste des questions alimentaires.
Quatre compagnies de l’Agroalimentaire dominent le monde : Archer Daniels Midland, Bunge, Cargill et Louis-Dreyfus. À elles quatre «elles contrôlent 70 à 90 % du commerce mondial des céréales», comme l’a expliqué au journal Le Figaro, Jennifer Clapp, économiste spécialiste de la sécurité alimentaire à l’université de Waterloo. Le Figaro parle même de compagnies « puissantes comme des États» : Bonne ou mauvaise nouvelle?
La transparence que l’on reproche à bien des organisations publiques peut probablement s’appliquer aussi à plusieurs entités privées, mais sont-elles pour autant néfastes au développement du secteur alimentaire?
La pandémie et la guerre en Ukraine a mis en lumière des problématiques et des inquiétudes quant à l’alimentation mondiale. Les grands joueurs du secteur auront intérêt à jouer à jeu plus ouvert.
Par ailleurs, si dans le futur, le contrôle de l’agroalimentaire mondial sera aussi le défi du groupe chinois COFCO, une chose est sûre, de ce côté-ci de l’Atlantique, le géant américain, Cargill «plus grand négociant agricole au monde, est monté au plus haut en 157 ans selon l’agence Bloomberg, atteignant 6,68 milliards de dollars de bénéfice net à l’issue de son exercice annuel décalé 2021/22 achevé le 31 mai», de spécifier le Figaro dans son dossier sur l’alimentation mondiale.
Bénéfices records
35% de hausse pour le chiffre d’affaires de Cargill en un an, 60 % pour ADM, il s’agit bien de bénéfices records pour les négociants. La post-pandémie et la guerre en Ukraine placent ainsi ces compagnies au cœur de l’économie mondiale.
Il faut savoir que le prix d’achat des céréales n’est pas nécessairement le prix de vente puisque le système est boursier. Faut-il voir les profits de ces compagnies comme un problème pour l’égalité à l’accès à la nourriture dans le monde ou un atout en raison de leur participation au soutien d’organismes communautaires? (près de 200 millions de dollars juste pour Cargill)
La prochaine problématique : l’eau
Les coûts de l’alimentation explosent en raison du prix des céréales à la revente, mais aussi en lien avec les coûts de production impactés aux producteurs : coûts des intrants depuis la guerre en Ukraine, coûts des transports en raison de l’explosion du prix de l’énergie et ce n’est sûrement pas fini sachant que l’accès à l’eau entraînera des conséquences compliquées pour les productions agricoles et agroalimentaires futures et sûrement in fine le prix à la consommation.
Une autre réalité doit être prise en compte : la population mondiale a doublé en 50 ans et il faut voir la science et l’aide technologique comme un atout plutôt qu’un problème pour notre alimentation future. Mais la lecture médiatique des problématiques est souvent en conflit avec la technologie et la science.
Si le prix des terres est un souci pour la relève au Québec, au moins elles restent propriété de producteurs, qui certes contribuent toutefois par eux-mêmes à l’explosion des prix des terres arables. Dans le reste du monde, la propriété des terres agricoles n’est pas aussi bien protégée qu’ici et est souvent aux mains des géants de l’agroalimentaire ou de fonds d’investissement.
Il faut parfois regarder dans la cour du voisin pour se rendre compte qu’on est pas si mal lotis chez soi!
*«ABCD» : Archer Daniels Midland, Bunge, Cargill et Louis-Dreyfus.