Jean Garon est mort le 1er juillet 2014, cela fera bientôt 10 ans. Personne ne sait encore comment le gouvernement ou la ville de Lévis décideront de souligner sa mémoire au 1er juillet 2024 pour honorer son parcours : Claude André Saint-Pierre, agronome, a trouvé le moyen de souligner cette année sa mémoire en nous envoyant ce texte en rappelant la lecture pédagogique de ses mémoires : Pour tout vous dire, une coédition La Vie agricole/VLB
Jean Garon n’était pas un avocat comme je le pensais malencontreusement, mais un confesseur. En effet, je me suis trompé en pensant qu’il était un réel avocat. Sans jamais y croire, il a appris que la justice est importante dans une société. Je retiens donc qu’il a été avant tout un disciple de la justice du père Georges-Henri Lévesque qu’il admirait et adorait. Son second maître à penser était naturellement la débrouillardise de son père. Dès ses premiers pas à l’Université Laval, il est devenu un militant de la première heure de l’indépendance pure et simple, suite à un vote majoritaire à l’Assemblée nationale, et non pas après un référendum ou un renérendum.
D’où vient son air triste sur la page couverture ?
Sa vraie formation, celle qu’il ne reniera jamais, est donc celle d’un sociologue qui a fait un travail tout aussi remarquable que celui de nombreux agronomes. Son cabinet de ministre de l’Agriculture a toutefois été marqué par les sciences sociales et peu enclin à promouvoir le système capitaliste de l’Amérique. Certaines connaissances ou propositions des agronomes, des vétérinaires et des ingénieurs étaient souvent vilipendées et replacées de facto dans le contexte social et religieux du temps. Son action était donc fondée sur la confession et l’écoute des gens du pays afin de les convaincre et de les baptiser croyants québécois pure laine en l’indépendance. La pensée capitaliste n’avait pas droit de cité. Il a parcouru, aller-retour, tous les villages du Québec et il en est ressorti avec à son palmarès: sa loi de protection des terres agricoles et sa politique “Nourrir le Québec”.
On est des militants ! On est capable !
Je riais tout seul et je l’entendais me raconter à l’oreille ses périples, à chaque fois que je tournais une page de sa biographie. Pour lui plaire, il faudrait écrire un autre verset, soit celui de l’épitre de l’industrialisation effrénée et de la concentration du pouvoir de la chaîne alimentaire. Malgré notre dévoué ministre, le grand filet mondial de l’alimentation de l’homme s’étend du fond de la mer au faîte des continents. La traditionnelle sagesse des paysans, celle qui demande aux agriculteurs de bien gérer la nature, devra être confortée par un arbitre à qui on devra désormais confier le soin de la gestion scientifique de cette nature. Tout comme monsieur Jean Garon a appris à comprendre l’Agriculture, les citoyens du monde doivent apprendre à mieux lire la Nature. Il reste bien du travail à accomplir avant de bientôt nourrir dix milliards d’humains sur terre. L’enthousiasme de monsieur Garon servira à éveiller notre jeunesse.
Le temps presse !
Sa dédicace sur son livre se lit comme suit:
À Claude André St-Pierre,
Vive la République du Québec et son autosuffisance céréalière.
Vous avez été un précurseur.
Jean Garon, le 13 avril 2013.
Claude André St-Pierre, Agronome
924 Toronto. Québec, G1X 3R9
Jean Garon, 2013. Pour tout vous dire. VJB éditeur.[1]
[1] Tiré de : Claude André St-Pierre. 2015. Hommage à Jean Garon. Mon grand album : Une biographie spirituelle, pages 74-75.