Communiqué: le modèle agricole québécois au coeur d’une vision d’avenir

Longueuil, le 8 novembre 2010 — Le gouvernement du Québec s’apprête à déposer un livre vert sur la future politique agricole et agroalimentaire québécoise. Or, tout semble converger vers une proposition s’appuyant sur les recommandations du rapport de la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois (CAAAQ) déposé en février 2008 et qui semble depuis guider les initiatives gouvernementales.

À ce sujet, une nouvelle étude de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC) présente une analyse du rapport de la CAAAQ et de la démarche ayant mené à ses conclusions. « L’IRÉC confirme que l’analyse de la CAAAQ est basée sur une lecture partielle du monde agroalimentaire québécois. En identifiant les véritables problématiques auxquelles le secteur doit faire face, on arrive à une conclusion très différente, beaucoup plus orientée sur nos forces et sur leur pertinence face aux nouveaux défis du monde agricole », a déclaré le président général de l’Union des producteurs agricoles (UPA), M. Christian Lacasse.

Selon l’étude de l’IRÉC, la dynamique d’ensemble de l’industrie agroalimentaire plonge les agriculteurs dans des rapports économiques où s’affrontent des géants qui disposent de moyens faramineux pour fixer les règles du jeu. En réponse à cette dynamique, l’État québécois a rétabli un certain équilibre en se tournant vers un « arrangement institutionnel » avec le monde agricole, favorisant le développement d’un modèle original, l’action collective, en guise de réponse aux problèmes que posait pour les agriculteurs l’évolution de l’industrie agroalimentaire. « Cela étant, les arrangements et les compromis sociaux qui ont donné à l’agriculture québécoise l’essentiel de ses caractéristiques actuelles sont-ils périmés parce que les menaces auxquelles ils répondaient se sont effacées ou, au contraire, ont-ils perdu de leur efficacité parce que ces menaces se sont accentuées en prenant de nouvelles formes et en gagnant en puissance? Le rapport de la CAAAQ élude totalement ce questionnement », écrivent les auteurs.

« Les pressions passées, présentes et futures s’exerçant sur les agriculteurs de chez nous militent dans le sens d’un renforcement du modèle agricole québécois. Ce modèle a justement été mis en place pour rétablir l’équilibre entre les agriculteurs et le combat de géants que représente l’agroalimentaire mondial. L’heure n’est pas au morcellement du rapport de force politique et commercial des producteurs alors qu’on assiste au phénomène inverse chez tous les autres intervenants de la chaîne agroalimentaire », a continué Christian Lacasse, soulignant que c’est ce modèle qui a favorisé une agriculture québécoise jeune et dynamique, mieux outillée qu’ailleurs pour passer au travers des soubresauts du marché et saisir les opportunités.

Selon l’étude de l’IRÉC, le rapport de la CAAAQ manque en effet sa cible en laissant entendre que les institutions mises en place freinent le développement, et en refusant de s’interroger sur la dynamique du nouvel ordre agroalimentaire mondial. Pis encore, le rapport de la CAAAQ propose des mesures et des orientations qui vont accroître la vulnérabilité de l’agriculture québécoise, notamment en suggérant de rouvrir la porte à des ententes de gré à gré entre les agriculteurs et leurs clients. « C’est ni plus ni moins prôner le retour à une asymétrie des rapports de négociation (entre agriculteurs et géants de l’alimentation) contre laquelle s’est édifié tout l’arrangement institutionnel précité. S’adapter de cette manière, c’est s’exposer à des forces qui priveront le Québec de sa capacité d’assurer sa souveraineté alimentaire », peut-on lire dans l’étude.

Pour l’IRÉC, « il y a lieu de se questionner sur l’insistance que met le rapport à poser la représentation syndicale unique comme un frein au développement de cette cohésion. Au contraire, pour bien jouer de tous ses atouts, le monde agricole québécois a besoin d’une vision commune et d’une capacité de concertation qui peut lui permettre de faire contrepoids à des puissances économiques n’ayant qu’un but : soumettre la production aux seules lois de la concurrence et du profit en faisant le jeu de corporations dont les centres de décision et les intérêts sont, de bien des manières, éloignés du Québec et de ses valeurs ».

« S’adapter pour innover, un thème fétiche de la CAAAQ, doit-il signifier de renoncer au droit des peuples à se nourrir et de déterminer la place que les pays tiennent à réserver à leur classe agricole? » poursuivent les auteurs. La réponse du président général de l’UPA est claire. « Morceler le rapport de force des producteurs nie la réalité et va à l’encontre de leurs intérêts. L’heure est à la cohésion, au renforcement de leurs outils collectifs et au maintien d’une agriculture à dimension humaine, réalisée par une multitude de fermes ancrées dans toutes les régions, fournissant à la population des aliments sains, produits dans une perspective de développement durable et d’équité. C’est justement ce que l’UPA suggère dans sa vision de la future politique agricole et agroalimentaire, Le Pouvoir de se nourrir ».
L’étude de l’IRÉC et le document Le Pouvoir de se nourrir sont disponibles sur www.upa.qc.ca.


Source :
Éliane Hamel

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