LONGUEUIL, QC, le 27 mai 2011 /CNW Telbec/ – L’abeille est menacée à travers le monde et la « Journée de l’abeille », décrétée ce dimanche 29 mai au Canada, sonne l’alarme. La santé de l’abeille est affectée par plusieurs facteurs en interaction : les maladies, les parasites, un environnement moins favorable, parfois même hostile, l’utilisation de certains pesticides et des pratiques apicoles parfois mal adaptées à toutes ces nouvelles problématiques réunies.
Au Québec, les pertes hivernales de ruches peuvent atteindre 40 % du cheptel dans certains cas. En 30 ans, le nombre de ruches exploitées est passé de 80 000 à 35 000 et le Québec ne produit plus que 25 % à 40 % de sa consommation annuelle.
L’abeille n’a été importée en Amérique du Nord qu’à partir de la colonisation. Apis mellifera n’est pas une espèce indigène du continent américain, elle origine plutôt d’Eurasie. Qu’est-ce que l’abeille a de si particulier par rapport aux autres animaux domestiqués si ce n’est qu’elle nous procure du miel et de la cire depuis plusieurs millénaires?
Ce n’est pas uniquement pour son précieux miel qu’on lui réserve une telle journée dans le calendrier. Si l’abeille a droit à ce traitement de faveur, c’est peut-être avant tout parce qu’elle assure, par son travail de pollinisation, une part importante de la production mondiale d’aliments dédiés aux humains (rapport du Programme des Nations-Unies pour l’environnement).
Si on analyse les causes de ces hécatombes, les maladies et les parasites – Varroa destructor en particulier – sont mis à l’index. Il ne faut surtout pas sous-estimer l’impact d’un environnement en pleine évolution. Les paysages ruraux dans plusieurs grandes régions ont grandement été bouleversés. Les prairies ont pratiquement disparu, le trèfle blanc est plus rare.
Les méthodes culturales ont changé et il est préconisé de faucher les champs de foin et de luzerne avant floraison. Les grandes cultures céréalières souvent peu mellifères ont pris le dessus. La disparition de nombreuses petites fermes familiales a favorisé l’émergence d’immenses superficies cultivées supprimant les bordures de champs et de fossés propices à l’implantation de nombreuses plantes sauvages.
L’abeille se nourrit essentiellement de nectar – qui est transformé en miel dans la ruche – et du pollen qu’elle récolte sur les fleurs. Le manque de diversité florale dans les écosystèmes entraîne des carences de pollens qui conduisent à des ruches moins populeuses, plus vulnérables.
Des produits phytosanitaires de plus en plus agressifs et de nouvelles molécules actives utilisées dans les traitements systémiques – c’est-à-dire qui répercutent leur toxicité dans toutes les cellules de la plante – sont fortement suspectés d’entraîner le dépérissement des colonies. On peut déplorer que les homologations de produits antiparasitaires ne prennent pas toujours en compte l’absolue nécessité de protéger les pollinisateurs, dont fait partie l’abeille domestique.
La Fédération des apiculteurs du Québec admet que produire des céréales, des fruits et des légumes entraîne inévitablement l’utilisation de pesticides. Jusqu’à preuve du contraire, cela paraît un incontournable.
Il est cependant primordial pour la survie de l’abeille – et peut-être de l’humanité selon Einstein – que tout soit mis en œuvre pour développer des matières actives non dommageables pour les êtres vivants non ciblés. Toutes les alternatives possibles de stratégie phytosanitaire doivent être envisagées, en particulier la lutte intégrée. C’est pourquoi la Fédération voit d’un bon œil l’implication de l’UPA dans la stratégie phytosanitaire du gouvernement du Québec, qui repose principalement sur l’adoption de la gestion intégrée des ennemis des cultures. C’est-à-dire le recours à toutes les techniques nécessaires de prévention et de protection des cultures pour réduire les populations d’organismes nuisibles en minimisant l’utilisation des pesticides tout en respectant la santé et l’environnement. L’utilisation plus large des prédateurs naturels des ravageurs pourrait aussi être privilégiée dans bien des cas.
La « Journée de l’abeille », c’est l’occasion de reconnaître le rôle que cet insecte joue dans notre assiette alimentaire en tant que pollinisateur. Les populations ont des choix à faire pour à la fois vivre en santé et manger à leur faim. Les distributeurs de pesticides ne doivent pas décider seuls des moyens à prendre pour nourrir l’humanité.
La « Journée de l’abeille », c’est aussi tenter de faire réfléchir à notre avenir. Si l’abeille est reconnue comme un bio-indicateur, tous les problèmes environnementaux qui l’affligent tendent à faire penser que la santé des humains pourrait être compromise.
Devant cette situation inquiétante, la Fédération des apiculteurs du Québec ne baisse pas les bras. Elle croit fermement qu’il est encore possible de renverser la vapeur en s’attaquant à chacune des problématiques à partir d’un plan d’action bien établi. La concertation entre les apiculteurs, les agriculteurs, les professionnels du milieu, les différents organismes concernés et les compagnies de pesticides pourrait améliorer grandement les choses.
La « Journée de l’abeille », c’est aussi l’occasion de se fixer des objectifs et de sensibiliser la population à poser des gestes concrets pour la survie des insectes pollinisateurs.
Renseignements:
Source et renseignements :
Christian Macle, apiculteur
Porte-parole de la Fédération des apiculteurs du Québec, comité Santé des abeilles