Un transfert réfléchi pour conserver la paix de l’esprit

Le transfert d’une entreprise agricole, ça se prépare. Bien des propriétaires l’ont appris à leur dépends et bien des jeunes ne peuvent parvenir à réaliser leur rêve en raison des complications qui peuvent survenir en cours de route. Heureusement, il existe maintenant un outil utile et éprouvé qui permet à tous d’y trouver leur compte, en minimisant les tracas qui se rattachent à ce genre d’opération.

Tiré d’un modèle développé par la firme Raymond Chabot Grant Thornton pour les entreprises de tout genre, le modèle a été repris et adapté par Chantal Bourgeois pour le monde agricole. Première directrice principale au sein de l’entreprise à Saint-Hyacinthe, Mme Bourgeois est également copropriétaire d’une entreprise avicole avec sa sœur et son beau-frère, exploitant la terre qui appartient à sa famille depuis six générations.

«Il y a longtemps que je cherche des moyens pour faciliter le transfert des entreprises agricoles à notre relève, car je crois qu’il est primordial de conserver nos acquis au Québec plutôt que de vendre nos entreprises saines et florissantes à des intérêts étrangers», explique la détentrice de l’Ordre du mérite agricole, édition 2010.

Pour Mme Bourgeois, il ne faut jamais oublier que le milieu agricole est un milieu axé sur l’humain car il s’agit très souvent d’entreprises familiales. Le transfert à la relève se doit d’être harmonieux malgré ses complexités, car les membres de la famille sont très proches, souvent même voisins.

D’ailleurs, cinq des sept étapes pour un transfert réussi qu’elle a imaginées sont axées sur la communication entre les propriétaires et leur relève plutôt que sur l’aspect financier de l’opération.

Sept étapes simples
Tout d’abord, il importe d’établir un portrait complet de la situation de l’entreprise, ainsi que de déterminer la vision des intervenants et leurs interactions réciproques. «L’histoire de chaque ferme est différente et unique. Il faut être en mesure de déterminer la situation réelle de l’entreprise avant d’entreprendre le processus de transfert».

Ensuite, on doit mobiliser les acteurs stratégiques qui agiront dans le transfert. «C’est à cette étape que les gens s’assoient et discutent ensemble du projet. Dans notre cas en particulier, nous avons décidé de transformer la ferme laitière de mes parents en une entreprise avicole. Nous n’avons rien détruit, nous avons simplement fait évoluer la ferme. Mais il fallait expliquer notre vision à mes parents pour ne pas les inquiéter ou les brusquer», précise Mme Bourgeois.

Puis, il faut analyser les besoins financiers et les capacités financières de chacun. «Et ce n’est pas juste une question de sous. Il faut que les deux parties expriment leurs besoins, que les parents déterminent quelles sont leurs attentes et comment les enfants désirent investir dans l’entreprise».

En quatrième lieu, les acteurs doivent déterminer vers où ira l’agriculture telle qu’ils la voient, quels seront les obstacles possibles, les besoins potentiels en terme de ressources, les axes de développement à prioriser.

Les cinquième et sixième étapes sont consacrées à l’aspect financier du transfert. On y traite des aspects fiscaux de la transaction ainsi que du plan de financement. «Plusieurs points doivent être abordés comme la structure légale de l’entreprise, les testaments, la convention entre les actionnaires, le patrimoine familial, etc.»

Enfin, on peut mettre en place le transfert. Cette étape peut s’étendre sur une longue période. «Dans notre cas, nous dînons tous les samedis midis avec nos enfants respectifs pour discuter et prendre des décisions, car nous sommes en processus de transfert. Nos deux familles, à ma sœur et moi, comptent sept enfants âgés de 27 à 14 ans et certains sont intéressés à prendre la relève. Et il ne faut pas oublier que les plus jeunes peuvent un jour vouloir s’y joindre».
Mme Bourgeois rappelle qu’il est important également de prendre des pauses au cours du processus si on en ressent le besoin.

Présentation publique
Le processus a été présenté pour la première fois aux agriculteurs lors de l’édition 2012 du Rendez-vous avicole de l’AQINAC et il le sera à nouveau au cours d’autres événements regroupant des propriétaires d’entreprises agricoles.
Pour en faciliter l’utilisation, il est présenté sur un napperon au design très dynamique et coloré, conçu par le fils de Mme Bourgeois. «Ce que nous voulons, c’est que les gens ait l’occasion d’avoir le processus sous les yeux pour se rappeler qu’un transfert de ferme, ça se planifie à long terme», conclut Mme Bourgeois.

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