par Yan Turmine
Aux États-Unis, l’actualité nous rapporte que plusieurs associations de producteurs de lait songeraient sérieusement à demander au gouvernement américain un système de gestion de l’offre. Cette volonté serait liée au bas prix du lait payé aux producteurs depuis des années. Cette situation du marché a amené plusieurs producteurs laitiers à fermer leurs portes, et aux autres à augmenter leur production afin de survivre.
Mais qu’en est-il de la volonté réelle des producteurs américains de se doter d’un système de gestion de l’offre ? Il y a quelque temps j’assistais à une réunion technique aux États-Unis. Des techniciens et des producteurs provenant des états unis et d’ailleurs était présents. Au cours de la journée, une séance plénière était organisée. L’objectif de la séance plénière était de discuter d’éléments techniques pour augmenter les performances sur les fermes. Assez rapidement quelques producteurs laitiers américains lancent la discussion sur la question des prix trop bas du lait payés aux producteurs. L’animateur de la séance essaye de ramener le débat, mais en vain le sujet de l’heure pour nos voisins est le prix du lait. Le débat s’anime d’un cran lorsqu’un des participants, un producteur influent du nord-est des États-Unis, ose parler d’un contrôle éventuel de l’offre de lait. Il était assez évident pour la grande majorité des producteurs présents (du moins ceux qui s’exprimaient), la solution pour régler les bas prix offerts se trouve plus par l’augmentation de la demande que part une gestion de l’offre. Parmi les solutions avancées, augmentation des exportations et stimulation de l’offre intérieure. La rancœur des producteurs américains qui s’exprimaient semblait être souvent dirigée vers les autorités et vers les transformateurs qui ne semblaient pas selon eux mettre les efforts nécessaires pour ouvrir les marchés ou stimuler les marchés intérieurs. En aucun cas ils ne remettaient en question leur surproduction de lait, pour eux c’était normal de produire autant qu’ils le peuvent.
Juste un apéritif
Ce débat fut en fin de compte intéressant, d’une part par son côté animé, mais aussi par la démonstration d’une réalité qui était bien présente chez les participants de cette réunion. Les producteurs américains sont loin d’une gestion de leur offre. Pour eux la conquête des marchés reste la seule solution à leur problème. Sans une gestion de l’offre ou une limitation de leur offre, ainsi que leur désir profond de continuer à augmenter leur production, les producteurs américains ne régleront rien. La seule chose qu’ils vont réussir, c’est d’étendre et d’exporter leurs problèmes. Cette réalité exprimée n’est pas une très bonne nouvelle pour les producteurs canadiens. Il va falloir rester très vigilants. Pour les Américains notre marché n’est qu’un autre marché où ils pourront y déverser leur surplus dans l’attente de conquérir de plus grand marché, juste un apéritif.