Encore une fois, les fracas et les menaces de l’unique syndicat agricole accrédité, l’Union des producteurs agricoles (UPA), à l’endroit des décisions du ministre québécois de l’Agriculture Pierre Paradis ont été rapportés sans nuances dans différents médias, comme en témoignent l’article publié dans le journal La Presse du 14 décembre et celui du Journal de Montréal du 13 décembre. Cette fois-ci, ce sont les changements au Programme de crédit de taxes foncières agricoles qui justifieraient une telle flambée de propos.
La motivation cachée de l’UPA dans ce dossier repose sur le fait que les changements apportés mettront fin à l’obligation des producteurs d’avoir payé leur cotisation à l’UPA pour être éligible au programme gouvernemental de remboursement des taxes foncières. Voilà ce que le monopole évite délibérément d’aborder: il n’accepte pas de perdre ce lien d’autorité sur les producteurs agricoles! Pourtant, l’UPA d’aujourd’hui n’est pas le monde agricole, pas plus que ce monopole syndical ne représente l’ensemble des visions agricoles du Québec et des entrepreneurs agricoles.
D’ailleurs, la demande de ne plus subordonner au paiement de la cotisation syndicale cet accès au programme gouvernemental est soutenue par de nombreux agriculteurs et a été formulée par le Conseil des entrepreneurs agricoles.
Bien sûr, le Conseil des entrepreneurs agricoles juge inappropriés les propos du ministre qui a qualifié les entrepreneurs agricoles de « multimillionnaires ». Selon le recensement de 2011, 53 % des fermes ont un chiffre d’affaires annuel de moins de 100 000 $, ce qui ne laisse qu’un revenu net très faible en fin d’année. Seulement 14 % des fermes, quant à elles, réalisent des ventes annuelles supérieures à 500 000 $, soit tout juste 4 000 agriculteurs pour tout le Québec.
Pour répondre aux préoccupations soulevées par certains agriculteurs, le Conseil des entrepreneurs agricoles croit qu’il est temps de ramener un débat serein sur le véritable enjeu : exiger du ministre de prévoir une clause de garantie de protection contre les hausses de taxes abusives pour les entrepreneurs agricoles potentiellement affectés par un bond prodigieux de leur compte de taxes. Cette mesure de protection ne devrait pas être difficile à obtenir puisque le gouvernement Couillard évalue de son côté l’impact négatif des changements à 113 $ en moyenne, celui-ci se limitant à 1 % des entreprises agricoles!
Il est clair que le régime d’opposition systématique de l’UPA et le dialogue de sourds qu’il entretient auprès du ministère de l’Agriculture sont au désavantage des producteurs. On voit qu’il est facile pour ses dirigeants de convaincre certains producteurs d’user de fortes pressions contre tout projet ou individu. Cependant, quels sont les gains concrets obtenus pour les agriculteurs ?
De nombreuses autres voix agricoles s’élèvent. Pour le futur de l’agriculture québécoise, il est grand temps que celles-ci soient reconnues au sein de la Loi sur les producteurs agricoles afin de mettre terme à la dynamique négative présente dans le secteur agricole et perpétuée par le régime de ce syndicat unique accrédité.
Jacques Cartier, président du Conseil des entrepreneurs agricoles (CEA)