Il y a 3 ans, Jacques Laberge vendait son troupeau de vaches laitières, qu’est-il devenu ? Après avoir acheté avec sa femme une ferme abandonnée, dans les années 90, et avoir tout rebâti et agrandi; il a décidé de se retirer. M. Jacques Laberge, maintenant propriétaire de l’entreprise GYPSE du FJORD RECYC-MOBILE de Laterrière, dit lui-même : « J’ai fait des choix et je suis passé à autre chose. J’étais rendu au bout du rouleau et j’ai décidé de vendre mes 140 vaches.»
Le deuil de leurs belles Jersey, mais pas le deuil de l’agriculture !
Son fils François ne désirait pas prendre la relève. Ils ont trouvé pénible de se séparer de leurs animaux. Comme le dit M. Laberge: «T’as le motton quand tu rentres dans ton étable. Les vaches c’est pas le problème. T’as de plus en plus de normes. Je suis d’accord avec ça, mais il faudrait que ça nous paie de le faire. Normalement quand tu investis de l’argent c’est pour améliorer ton sort et que ce soit plus rentable. En agriculture, à toutes les fois que tu investis de l’argent c’est pour en perdre.»
Mais après ces trois années en dehors de l’agriculture, qu’en pense-t-il ?
Selon lui : « Il y a toujours de la place pour l’agriculture! Il faut nourrir la planète. On a actuellement deux enjeux : l’environnement et l’agriculture. Moi, avec l’usine, j’ai embarqué sur ces deux enjeux à la fois. La passion de l’agriculture est toujours là. Avant, tout ce qu’on entendait c’était qu’il fallait trouver des solutions, mais on ne parlait que d’herbicides et d’engrais chimiques. Je sors le gypse des différents sites d’enfouissement, j’en fais un amendement agricole riche en calcium et en soufre, puis on cultive avec ça. C’est très utile dans les productions de soya, de bleuet, de pomme de terre, de canola et même de foin. On en fait des produits et des engrais pour usages domestiques, agricoles et industriels. Présentement l’usine est rendue trop petite. On a un projet d’expansion, une 2e usine.»
Il plaide pour le libre choix syndical dans le monde agricole
Selon lui, L’UPA doit faire de la place aux jeunes et on doit avoir le choix du syndicat en agriculture comme partout ailleurs. Il mentionne : « À toutes les fois qu’on parle de la relève ce ne sont pas des jeunes qui en parlent. Je dis à tous mes clients qui sont jeunes: Impliquez-vous ! Prenez votre place ! L’UPA doit faire de la place aux jeunes. Avec les années j’ai constaté que dans le syndicat ce sont des personnes plus âgées qui prennent les décisions. Les jeunes sont instruits (agronomes, des comptables, etc.) et ils sont capables de rentrer dans le syndicat puis de gérer. Tu t’aperçois que ceux qui sont en place aussitôt qu’ils débarquent du syndicat, ils sont rendus à 60 ou 64 ans, ils vendent la ferme. Il faut arrêter d’attendre. Y a des décisions qui auraient dû être prises il y a 25 ans. Il faut que les jeunes embarquent et se disent : bientôt c’est moi qui vais avoir les termes et c’est qu’est-ce que je choisis? »
Il ajoute : « Je ne suis pas le gars qui veut que l’UPA disparaisse. Ce que je trouvais déplorable, c’est qu’on était obligé d’adhérer à l’UPA. On n’a pas le choix, car on a un seul syndicat. Même quand un autre syndicat va arriver, il va falloir travailler ensemble. Des regroupements, ça en prend, car si on est tout seul, on va tout perdre. Il faut qu’il y ait des syndicats, mais la mentalité doit changer. Il faut écouter le monde. Il faut prendre des décisions. Il faut arrêter d’avoir peur d’avoir peur.»
Il poursuit en disant : « Pendant 25 ans j’ai entendu dire qu’on n’avait pas le choix, mais pourtant on peut le prendre le choix. Si tu choisis de continuer à cultiver ben prends le choix pis participe. Moi j’ai fait un choix. J’ai vendu mes vaches puis j’ai démarré mon usine. Plusieurs producteurs de mon âge ne se voient pas faire autre chose. Moi j’ai eu la chance de travailler à l’extérieur dans le domaine de la construction en même temps que la ferme. J’ai dessiné le concept et j’ai fabriqué tout l’équipement de l’usine.»
Toujours selon lui, les jeunes sont proactifs et aventuriers, mais ils doivent être prudents, car on leur vend du rêve. Il dit : «Ça me fait encore plaisir d’aller traire les vaches chez des clients. Dans l’étable, les jeunes me parlent de leurs projets. Je suis un fournisseur, mais quand j’arrive chez un client je sais ce qu’il vit, car je l’ai vécu. Mon produit vient régler des problèmes que j’ai vécus. Les jeunes doivent être prudents, car partout on leur vend du rêve, l’idée d’une meilleure qualité de vie en famille. Ils rêvent toujours de prendre de l’expansion et de grossir. Le crédit est facile. Les fermes qui vont survivre ce sont celles qui ne seront pas surendettées. À l’école on a oublié de leur montrer à faire un budget. On a donné des cartes de plastiques à des enfants de 12 ans sans leur montrer à faire un budget.»