«Le gouvernement nous a trahi, et il en a profité pour en faire l’annonce quand la majorité est en vacances.»- Bruno Letendre

L’annonce de l’attribution de nouveaux contingents tarifaires à l’ensemble des parties, en vertu de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne (AECG) fait plusieurs mécontents.  Les qualificatifs négatifs ne manquent pas autant chez les producteurs laitiers, les transformateurs fromagers que leurs organisations. 

On se souviendra que le 2 août dernier, le ministre du Commerce international du Canada, Francois-Philippe Champagne,  a rendu public la décision de créer deux nouveaux contingents tarifaires pour les fromages provenant de l’Europe : l’un de 16 000 000 kg de fromages de tous les types et un pour 1 700 000 kg de fromages de tous les types utilisés dans la transformation alimentaire (fromages industriels). à l’ensemble de la chaîne de valeur des fromages. Cette chaîne englobe les fabricants de fromage, les distributeurs et les détaillants. Quelque 30% du contingent sera expressément réservé aux petites et moyennes entreprises (PME).

Le contingent de 1 700 000 kg de fromages industriels sera, quant à lui, offert entièrement aux transformateurs de second cycle qui utilisent des fromages pour fabriquer des produits alimentaires. Un programme d’investissent  de 250 millions de dollars sera accessible pour atténuer les impacts négatifs des nouvelles importations de fromages.

Nouveaux contingents de fromages: seul le gouvernement fédéral semble content

Refusant toute entrevue, le ministre Champagne déclare par communiqué que «nous sommes sur la bonne voie pour l'application provisoire de l'AECG le 21 septembre. Je suis convaincu que nous avons préparé la voie à des opportunités intéressantes pour les Canadiens dans le secteur du fromage, en particulier pour nos petites et moyennes entreprises »

Au téléphone, son adjointe parlementaire, Chantale Gagnon, reconnaît que le mécontentement résulte du fait que « tout le monde voulait avoir sa part du gâteau. »

Trahison du gouvernement

Sur sa page Facebook, le président des Producteurs de lait du Québec, Bruno Letendre, qualifie de « très très décevant » le partage des quotas d’importation de fromages venant de l’Europe. « Pourtant nous avions rencontrés les principaux intervenants, voire les ministres, impliqués dans cette négociation(…) Tous nous ont répondu que oui ce sera la transformation (qui aurait les quotas). Nous avions convenu avec la transformation d'avoir un seul discours, donc une seule demande et surtout ne pas donner ces quotas aux détaillants. Le gouvernement nous a trahi, et il en a profité pour en faire l'annonce quand la majorité est en vacances. »

De leur côté, les Producteurs laitiers du Canada ne sont guère plus satisfaits, considérant que l’aide de 250 M$ est insuffisante.

« L’Association des transformateurs laitiers du Canada (ATLAC) et les Producteurs laitiers du Canada (PLC) maintiennent qu’une allocation plus importante des contingents tarifaires aux fromagers aurait élargi l’offre d’une plus grande variété de fromages aux consommateurs canadiens, permettant aux fromagers d’importer des fromages qui ne sont pas déjà produits au Canada. »

Ridicule

Quant aux fromagers artisans québécois, ils trouvent « absolument ridicule » la décision fédérale dans le dossier.

« Nous sommes des transformateurs du lait que nous produisons. Nous ne sommes pas intéressés à mettre en marché les fromages européens. De toute façon, la répartition des quotas va se faire entre les gros. Nous devrons travailler encore plus fort pour la fidélisation de notre clientèle. Et nous allons tenter de séduire des détaillants par toutes sortes d’activités »,  commente Jean Morin, propriétaire de la fromagerie du Presbytère de Sainte-Élisabeth de Warwick.

Perte de marchés

Enfin, la Laiterie Chalifoux de Sorel-Tracy, se dit « mi-figue, mi-raison » face à la décision fédérale. L’entreprise familiale, qui commerciale les produits Riviera et qui opte depuis deux ans pour une mise en marché de niche, compte bien profiter des sommes d’argent promises pour les PME pour éviter de trop grandes pertes de marché.

« On va saisir les opportunités et suivre le dossier de très près. Nous avons déjà déposé des demandes d’aide financière pour nous prévaloir d’une part des investissements consentis aux PME. Mais c’est sûr que cette manière de procéder va nous affecter », confie le directeur général Martin Valiquette.

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