Le nouveau code de gestion des pesticides en agriculture est un pas en avant, sans être la panacée, disent des écologistes. Par contre, l’UPA et les producteurs de grains y voient plutôt une couche supplémentaire de paperasse imposée par le ministère du Développement durable, de l’environnement et de la lutte contre les changements climatiques (MDDELCC).
Interrogée en marge d’une conférence qu’elle donnait à Montréal vendredi dernier, la ministre de l’Environnement, Isabelle Melançon a confirmé que le nouveau Code de gestion des pesticides sera plus restrictif pour son usage en agriculture.
« Il est conçu pour limiter l’utilisation des pesticides de façon intelligente. Nous avons fait plusieurs consultations avec l’UPA et les producteurs de grains. Ce code se base sur la science. Tout est en mouvement, ce n’est pas une finalité », a-t-elle déclaré lorsqu’elle a été appelée à dire comment ce code encadrera les néonicotinoïdes et le glyphosate.
Durant les derniers jours, le président des producteurs de grains du Québec, Christian Overbeek et le président de l’UPA, Marcel Groleau, ont déclaré craindre que ce nouveau code devienne une lourdeur administrative de plus pour les agriculteurs.
« Nous avons suggéré de ne pas ajouter un autre fardeau administratif qu’il faudra payer », a déclaré Marcel Groleau, en entrevue à l’émission « Puisqu’il faut se lever » de Paul Arcand, lundi matin.
Il fait porter aux agronomes la responsabilité de l’utilisation massive des pesticides en agriculture. « C’est sûr que l’industrie a intérêt à en vendre. Est-ce que les agronomes sont complices ? Les agronomes vont pouvoir en vendre, et c’est eux qui vont pouvoir faire la prescription. Si on voulait des agronomes non liés, il n’y en a pas assez sur le territoire. Ça aurait été plus crédible comme démarche. »
Un pas en avant
De son côté, la Fondation David Suzuki confirme avoir participé à des échanges informels où elle a soumis un mémoire et des recommandations pour interdire les pesticides les plus dangereux.
« C’est un important pas en avant, mais ce n’est pas la panacée. Nous avons exprimé notre inquiétude du potentiel de conflit d’intérêts, du fait que ce soit des agronomes qui donneront les prescriptions. Ils ont un code d’éthique à respecter, on espère que ce sera appliqué de manière rigoureuse », a mentionné Louise Hénault-Éthier, chef des projets scientifiques, chargée du dossier des pesticides à la Fondation David Suzuki.
Comité de surveillance
Dans cet esprit, chaque région aura l’obligation d’inscrire toutes les prescriptions formulées et les ventes confirmées par des agronomes dans un registre. De plus, un comité de surveillance, regroupant tous les acteurs impliqués, est en formation par le MDDELCC. Ce comité multipartite va faire un suivi et lever un drapeau rouge s’il observe une apparence de conflits d’intérêts.
« Ce nouveau code de gestion donnera une chance aux producteurs d’adopter de nouvelles pratiques. Des études démontrent que la lutte intégrée est préférable dans bien des cas, même si ce n’est pas un mode parfait. D’autres substances vont devoir être révisées », poursuit la scientifique.
Rien sur le glyphosate
Louise Hénault-Éthier souhaite que cette nouvelle directive soit l’occasion d’une réflexion sur les besoins réels en agriculture, pour contrer les infestations.
« Nous, on se dit que l’interdiction d’une substance toxique ne doit pas amener qu’elle soit remplacée par une autre substance par simple substitution. Par exemple, interdire l’atrazine entrainera plus d’utilisation du glyphosate. Ce n’est pas mieux, quand on connaît les conséquences de son ruissellement. Il faut une réflexion sérieuse sur le glyphosate, ça reste à faire.»