J’ai eu la chance de bien connaître le fonctionnement de la bureaucratie et aussi celui de l’industrie privée. Il y a des ressemblances, mais aussi des différences. Dans les deux cas on y retrouve certaines lourdeurs administratives, de la politicaillerie, des jalousies et compétitions internes de pouvoirs, des politiques internes mal appliquées, de la résistance au changement, des courses à la dépense avant la fin de l’année pour s’assurer de ne pas voir son budget diminué l’année suivante.
Il y aussi des employés totalement dépassés, mais qui demeurent en raison de leur ancienneté, des jeunes surdoués qui se font voler le crédit de leur travail par d’autres qui excellent en auto-marketing, des désenchantés qui empoisonnent l’atmosphère du bureau, des divisions qui se rapportent de façon inappropriée dans la structure de gestion, des politiques internes qui n’ont pas de sens pour certaines divisions ou mal appliquées parce qu’elles servent des intérêts personnels plutôt qu’organisationnels, etc.
Si vous ne reconnaissez pas cette description, vous n’avez jamais travaillé.
La différence entre les deux est que si vous changez la tête d’un ministère, peu changera. Pour faire place au changement, il faut changer les structures. Ce qui est souvent le cas, mais les changements ne sont pas toujours évidents ou réalisés.
Au privé, si rien ne change, on exigera des comptes, surtout si le conseil d’administration est à son affaire. Dans le privé, idéalement, la tête détient un pouvoir réel, mais elle a des objectifs mesurables de rendement à atteindre, sinon, c’est la guillotine, car la responsabilité et l’imputabilité sont claires tout au long de la chaîne.
L’ITA ne fait pas exception. Plusieurs ont fait remarquer qu’il est mal encadré par le MAPAQ. Il s’agit de deux cultures organisationnelles bien différentes. Les ITA historiquement ont été créés en 1962, deux ans avant la création du Ministère de l’Éducation (MELS) ce qui pourrait expliquer qu’ils sont demeurés au MAPAQ. L'ITA d'aujourd'hui n'est qu'une division obscure du ministèrem, l'obligeant ainsi à se conformer à de multiples contraintes administratives inappropriées et loin de son mandat. Son leadership potentiel pour former la relève est grandement limité.
A titre d’exemples, les nombreuses manigances pour contourner les exigences concernant le remplacement de deux employés qui partent à la retraite par un seul, élimine trop d’enseignants à temps plein, surtout si c’est mal appliqué. A chaque changement de gouvernement, on augmente le nombre de tablettés, ce qui diminue davantage les effectifs réels. Certains sont remplacés par contrats à court terme, lesquels s’impliquent moins au niveau de la vocation d’enseigner. Il y a aussi les mesures de protection des renseignements personnels qui empêchent même les cadres de l’ITA de connaître la liste de noms de leurs propres étudiants. Ainsi, ils ne peuvent suivre leurs cheminements, ni prendre des décisions pertinentes.
Idéalement, les ITA devraient avoir la même autonomie que la Régie, avoir un responsable de haut niveau qui irait présenter sa demande de budget avec des provisions budgétaires (allocations annuelles) sur 20 à 25 ans pour le maintien et la mise à jour ou le renouvellement des locaux spécialisés des écoles et de la ferme Lapokita. Il relèverait en tout ou en partie du MELS et serait redevable à un ministre. Les décisions seraient indépendantes, mais conformes aux autres agences et le responsable serait tenu à chaque année d’atteindre les résultats anticipés à l’intérieur des budgets alloués. Une gestion combinant les avantages du gouvernement et du privé, entre la mer et l’eau douce.