Un projet de recherche de 11,2 M$ pour freiner la dégradation des sols organiques cultivés au Québec

L’Université Laval a dévoilé le 24 avril dernier les activités scientifiques de la Chaire de recherche industrielle CRSNG en conservation et en restauration des sols organiques cultivés, qui développera et testera l’efficacité d'interventions localisées en conservation des sols organiques, afin de trouver des solutions concrètes pour freiner la dégradation rapide des sols organiques cultivés au Québec. Le programme vise à conserver ces surfaces responsables de 50 % en valeur marchande de la production maraîchère québécoise et à assurer l’essor des entreprises maraîchères qui les cultivent.

La Chaire de recherche industrielle est dirigée par Jean Caron, professeur de physique du sol au Département des sols et de génie agroalimentaire de l’Université Laval. Elle est mise sur pied grâce à un soutien financier de 11,2 M$ du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), du gouvernement du Québec, de la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) et de 14 entreprises maraîchères du sud-ouest de Montréal.

Les sols organiques sont essentiels pour assurer une partie de la subsistance et de la sécurité alimentaire de la population, puisqu’on y produit 80 % de la production canadienne de laitue et un volume important des légumes frais nécessaires pour notre saine alimentation. Ces sols constituent cependant une ressource limitée et fragile, puisqu’ils se dégradent par tassement, érosion et oxydation au rythme d’environ 2 cm par an. Avec une épaisseur moyenne de 100 cm, ils ont donc une durée de vie attendue de 50 ans.

« Au sud-ouest du Québec, ce taux de dégradation atteint de 1 à 4 cm par an et ces sols, très productifs et responsables de 50 % de la production maraîchère québécoise, disparaîtront très rapidement si aucune mesure concrète de conservation n’est mise en place. Nous devons donc trouver des solutions pour conserver cette zone de production stratégique pour l’horticulture québécoise et canadienne et pour le futur agroenvironnemental des prochaines générations. De plus, l’oxydation accélérée des sols amène une perte importante de carbone dans l'atmosphère, qui pourrait être largement réduite en mettant en place des stratégies de conservation et de restauration », explique le professeur Jean Caron.

La pérennité et l’essor des entreprises maraîchères de la région dépendent du maintien de l’écosystème des sols organiques cultivés dans cette région et de la durabilité des systèmes de production. C’est en Montérégie qu’on retrouve la plus grande concentration des superficies légumières et les plus importants revenus tirés de cette filière. En matière d’emploi, le secteur maraîcher génère de deux à trois fois plus d’emplois que les secteurs conventionnels (lait, porc, grandes cultures) pour chaque 100 000 $ de revenus investis, sans compter que ses activités ont un effet de levier sur les secteurs secondaire et tertiaire. La zone agricole (953 402 hectares) couvre environ 86 % du territoire de la Montérégie.

À l’aide de nouvelles approches jamais explorées auparavant sur la conservation et la restauration des sols organiques destinés à la culture maraîchère, l’équipe de recherche de l’Université Laval tentera de mieux comprendre les mécanismes qui contrôlent l'érosion éolienne, le drainage et le tassement des sols organiques dans les champs et de quantifier les processus dominants en conditions réelles de terrain.

Elle utilisera des technologies de mesures uniques, des mesures à haute résolution spatio-temporelle et des algorithmes interactifs complexes pour élaborer, tester et vérifier l’efficacité d’interventions localisées de conservation des propriétés des sols, d’amélioration de leur drainage et d’une réduction de leur érosion éolienne à l’aide de travaux réalisés en serre, en cabinets de croissance et au champ, chez les 14 partenaires, par plus de 70 étudiants des trois cycles universitaires, cinq professeurs collaborateurs et quatre assistants de recherche.

Les nouveaux savoirs seront intégrés dans un outil logiciel complet permettant aux partenaires producteurs de la Chaire d’optimiser leurs interventions de restauration et de conservation sujettes à une contrainte économique et agroenvironnementale de production maraîchère. « L’introduction de pratiques innovantes de gestion des sols amènera des changements dans certaines pratiques agricoles. Le défi d’un tel projet sera de concilier rentabilité agricole et restauration de la santé des sols en modulant les interventions localisées de conservation pour en augmenter à la fois la rentabilité et les bénéfices agroenvironnementaux », indique M. Caron.

Le projet en recherche et développement collaboratif sur les modèles d'interventions localisées en conservation des sols organiques, qui sera réalisé dans le cadre de la Chaire, permettra une meilleure gestion du sol, du drainage et de l’érosion, de meilleures performances agronomiques, une réduction de la pollution des eaux souterraines ainsi qu'une augmentation de la séquestration du carbone, tout en maintenant la productivité d’entreprises de haut niveau. Quatre étudiants au doctorat, cinq étudiants à la maîtrise et 55 étudiants au baccalauréat seront formés dans un secteur d'activité essentiel au développement de l'agriculture canadienne.

Les producteurs maraîchers de la région au sud-ouest de Montréal, plus particulièrement de la MRC des Jardins-de-Napierville, collaborent fièrement avec l’équipe de recherche de l’Université Laval depuis plus de 12 ans, en raison de son expertise spécifique de longue date dans le secteur des sols organiques. Ensemble, ils témoignent de l’expertise ciblée et complémentaire de l’équipe de recherche pour mieux comprendre les mécanismes d’évolution des sols et pour trouver des moyens de gérer et d’assurer la durabilité des systèmes de production.

Les partenaires agricoles qui soutiennent la Chaire à la hauteur de 7 M$ sont les suivants  : Delfland inc., Les Fermes R.R. et Fils inc., C. Isabelle et Fils inc., La Production Barry inc., Le Potager Montréalais ltée, Le Potager Riendeau inc., Les Fermes du Soleil inc., Les Fermes Hotte et Van Winden inc., Les Jardins A. Guérin et Fils inc., Maraîchers J.P.L. Guérin et Fils inc., Production horticole Van Winden inc., Productions maraîchères Breizh inc., R. Pinsonneault et Fils ltée, Vert Nature inc.

« La création de cette nouvelle Chaire de l’Université Laval s’inscrit au cœur de l’action innovante et scientifique dans le domaine de l’environnement agricole en mettant sur pied une plateforme technologique d’interventions localisées pour la conservation et la restauration des sols organiques. Elle est la pierre angulaire sur laquelle repose l’avenir de l’écosystème agricole québécois tant sur les plans alimentaires qu’économiques », souligne Michel J. Tremblay, vice-recteur adjoint à la recherche, à la création et à l’innovation de l’Université Laval.

 « Les partenariats de recherche du CRSNG appuient des collaborations qui permettent d’appliquer de nouveaux faits scientifiques à une vaste gamme de nouvelles applications. Les résultats viendront amplifier l’impact de l’entreprise intégrée et globale de conservation et de restauration des sols organiques cultivés et favoriseront la réduction de l’impact environnemental des entreprises agricoles en sols organiques », mentionne Marc Fortin, vice-président, Direction des partenariats de recherche, Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada.

« Les sols organiques sont essentiels pour la pérennité de l’agriculture pour les générations à venir. Ces sols sont une ressource limitée et fragile, donc la conservation et la restauration des sols organiques cultivés sont des enjeux auxquels il est urgent de s’attaquer. Nous avons au Canada, parmi les meilleurs chercheurs du monde. La mise sur pied de la Chaire de recherche industrielle, dirigée par Jean Caron, permettra de travailler avec les producteurs maraîchers pour relever des défis importants pour l’agriculture, contribuant à la croissance de notre économie et à l'amélioration du niveau et de la qualité de vie des familles canadiennes », note Jean-Claude Poissant, Secrétaire parlementaire de la ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire

« La conservation des sols organiques est critique pour les populations au Québec et partout au Canada. Les changements climatiques mettent en péril nos précieuses ressources alimentaires et il est plus important que jamais de les protéger. La FCI est heureuse de fournir aux chercheurs de l’Université Laval les équipements de pointe nécessaires pour appuyer l’essor des entreprises maraîchères qui exploitent les sols du Québec », a indiqué Roseann O’Reilly Runte, présidente-directrice générale de la FCI.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *