Champagne oriente notre industrie alimentaire vers une compétitivité à long terme, mais pour les consommateurs en quête d’une assistance immédiate, le Ministre a manqué plusieurs opportunités.
La question des prix alimentaires, en particulier, a été mise en lumière et a pris une tonalité hautement politisée. Les résultats d’une récente enquête indiquent que 82 % des Canadiens attribuent la hausse des prix alimentaires à une recherche excessive de profits, les épiceries devenant le point focal du discours politique. Il est donc impératif que les épiceries et le gouvernement accordent la priorité à la reconstruction de la confiance des consommateurs.
Cette semaine, le ministre François-Philippe Champagne a dévoilé un plan visant à stabiliser les prix avant l’Action de grâce, comme promis. Les spéculations laissaient entendre qu’Ottawa pourrait recourir à une taxe exceptionnelle ou même envisager des contrôles des prix dans l’industrie de la vente au détail alimentaire. Heureusement, aucune de ces mesures extrêmes ne s’est matérialisée, du moins pas encore.
Bien que le plan offre certains avantages aux consommateurs, tels que des réductions et des politiques d’alignement des prix, il renforce principalement le statu quo de l’industrie, bon nombre des mesures mentionnées étant pratiques courantes dans l’industrie. Le ministre a évoqué des gels de prix, mais n’a pas abordé la question des périodes de “black-out”, une opportunité manquée qui mérite attention.
La période annuelle de “black-out”, qui s’étend de novembre à février, interdit aux fournisseurs d’augmenter leurs prix. Paradoxalement, cela favorise la collusion dans toute la chaîne d’approvisionnement, entraînant des hausses de prix importantes en octobre et en février, affectant finalement les consommateurs avec des prix de détail fluctuants. Historiquement, cette pratique visait à permettre aux épiceries de gérer leurs stocks sans se soucier constamment des ajustements de prix. En 2023, la plupart des magasins disposent de systèmes de tarification numérique, rendant la période de “black-out” obsolète.
Ces gels de prix accordent notamment un avantage concurrentiel à quelques grands acteurs, en particulier Loblaw et Walmart, en raison de leur contrôle important de la chaîne d’approvisionnement, renforcé par un portefeuille solide de produits de marque privée et une domination logistique. En effet, l’industrie alimentaire a en quelque sorte normalisé la fixation des prix en amont de la chaîne, une question que le ministre Champagne devrait aborder avec diligence.
Une mesure immédiate d’aide aux consommateurs aurait pu être la décision du ministre d’éliminer les taxes sur les collations vendues dans les épiceries. La montée de la “réduflation” a involontairement soumis de nombreux produits aux règles de taxation de l’Agence du revenu du Canada (ARC), les classant comme des collations, même lorsqu’ils incluent des options plus saines. En 2022, on estime que plus de 4 600 articles alimentaires/collations vendus dans les épiceries étaient soumis à cette taxe. De plus, on estime que le gouvernement collecte chaque année entre 300 et 900 millions de dollars de taxe de vente dans les épiceries à l’échelle nationale, dont la moitié est liée à la taxe sur les petits articles alimentaires tels que classifiés par l’ARC. Cela représente une somme substantielle d’argent collectée auprès des Canadiens et envoyée à Ottawa.
L’introduction du Hub de données, bien que depuis longtemps attendue, représente une avancée significative. L’industrie alimentaire canadienne fonctionne actuellement avec une accessibilité limitée aux données, entravant une analyse significative. Le Hub de données promet de corriger ce déséquilibre d’informations en rendant les données plus accessibles, en particulier pour les petits acteurs de la vente au détail et de la fabrication alimentaire. Cependant, il convient de reconnaître qu’il n’apportera pas un soulagement immédiat aux consommateurs.
De plus, le Code de conduite des épiceries, bien que non universellement adopté par tous les acteurs de l’industrie, représente une avancée positive. Ce code vise à renforcer la compétitivité de l’industrie et à éliminer les déséquilibres de la chaîne d’approvisionnement causés par certaines épiceries. Il convient de noter que le ministre a manqué l’occasion de mentionner l’engagement unanime de toutes les épiceries à accélérer l’adoption et la mise en œuvre du Code. Ce cadre réglementaire a le potentiel de renforcer l’industrie et de promouvoir l’équité.
Malgré les développements politiques d’Ottawa, les données publiques disponibles indiquent que les dynamiques du marché s’attaquent déjà au problème de l’inflation alimentaire au Canada. On constate une diminution notable des taux d’inflation alimentaire, actuellement à 6,8 %, et les mois de juillet à août ont connu des coûts plus bas dans de nombreuses catégories alimentaires, à l’exception des poissons et des fruits de mer. Le Rapport sur les prix alimentaires 2023, publié il y a moins d’un an par l’Université Dalhousie, l’Université de Guelph, l’Université de la Saskatchewan et l’Université de la Colombie-Britannique, prévoyait un taux d’inflation alimentaire de fin d’année d’environ 5 %, une prévision qui correspond étroitement aux attentes actuelles.
Pour ceux qui font face actuellement à des défis économiques à l’épicerie, un soulagement immédiat du gouvernement fédéral pourrait ne pas être à l’ordre du jour. Cependant, il y a de l’espoir que ces mesures stratégiques ouvriront finalement la voie à un paysage alimentaire plus équitable et abordable pour tous les citoyens canadiens.