Site icon LA VIE AGRICOLE / LVATV.CA

Trois voix pour réinventer l’agriculture québécoise

Des livres sur la sécurité alimentaire et la viabilité de notre agriculture, il y en a à la tonne. Souvent, certains attirent l’attention pour un petit moment avant de tomber dans l’oubli. Mais Notre agriculture à la dérive, publié cette semaine par les éditions Leméac, se distingue par sa réflexion approfondie sur l’avenir de l’agriculture québécoise. Les auteurs, Guy Debailleul, professeur à la retraite de l’Université Laval, Michel St-Pierre, ancien dirigeant éminent du MAPAQ, et Suzanne Dion, géographe prolifique, présentent une esquisse claire et réfléchie de ce que devrait être notre agriculture.

Sans tomber dans l’alarmisme, les auteurs interrogent la gouvernance du secteur en ciblant notamment le monopole syndical de l’UPA, les défis liés à la protection des terres agricoles, et l’obsolescence des programmes comme l’ASRA. Ils appellent à une révision complète de ces programmes, qu’ils jugent discriminatoires envers les filières innovantes, freinant ainsi la diversification de l’agriculture. Selon eux, le soutien de l’État doit être repensé pour répondre aux besoins actuels du secteur.

Les auteurs proposent également des solutions concrètes pour améliorer l’agriculture, en commençant par établir un portrait des potentiels régionaux. Ce diagnostic, qui inclurait la qualité des sols et les conditions climatiques de chaque région, permettrait d’optimiser l’utilisation des ressources. Ils prônent également une démocratisation du secteur agricole, en encourageant la production hors quota et en mettant au défi la gestion de l’offre, véritable « vache sacrée » du Québec. Ces recommandations, loin d’être dogmatiques, visent à libérer le potentiel créatif et entrepreneurial des jeunes agriculteurs, tout en encourageant une agriculture plus flexible et innovante. Difficile d’argumenter contre.

Loin d’être nostalgique, cet essai reste ancré dans les faits. Les auteurs soulignent qu’il est impératif d’agir maintenant pour un Québec agroalimentaire plus influent. Un message d’espoir réaliste, qui invite à une transformation en profondeur du secteur. Ils démontrent que le statu quo est insoutenable et qu’une approche plus moderne et inclusive est nécessaire pour répondre aux défis économiques et environnementaux du 21e siècle.

Cet essai audacieux, écrit par trois personnes à la carrière bien établie et qui n’ont rien à perdre ni à gagner, ne manquera pas de susciter des réactions. Contrarier les détenteurs du pouvoir au Québec comporte toujours des risques, et l’UPA ne réagira probablement pas à un ouvrage aussi honnête et véridique. Pourtant, c’est exactement ce type de débat intègre et posé dont le secteur a besoin pour évoluer.

Merci à Guy, Michel et Suzanne d’avoir eu le courage de poser ces questions essentielles.

Quitter la version mobile