Un village du Bas-Saint-Laurent accélère son virage nourricier pour réduire sa dépendance aux aléas internationaux. Alors que les plus récents tarifs douaniers annoncés par Donald Trump font craindre une récession au Canada, le village d’Auclair accélère sa transition vers l’autonomie alimentaire. Une nécessité pour cette localité de 468 habitants, où l’accès à une alimentation saine se dégrade depuis la pandémie.
Suite à la fermeture du restaurant en 2023, le dépanneur est devenu l’unique commerce alimentaire du village. Or, ce dernier peinait déjà à maintenir une offre diversifiée : les fournisseurs, réticents à livrer de petites quantités sur de longues distances, réduisent leurs tournées. Avec les tarifs américains, une pression supplémentaire sur les prix risque de se faire sentir dans l’ensemble de cette petite communauté. Heureusement, Auclair n’a pas attendu les menaces de Trump pour renforcer son autonomie alimentaire.
En effet, la municipalité a récemment entamé l’écriture d’un Plan de Développement d’une Communauté Nourricière (PDCN), soutenu par le MAPAQ et la MRC de Témiscouata. Cette démarche vise à dresser un portrait des enjeux alimentaires locaux pour ensuite proposer des initiatives pertinentes. Depuis octobre, trois consultations citoyennes ont eu lieu et plus de 70 personnes ont répondu à l’appel. De plus, un sondage destiné aux citoyen.nes d’Auclair est en cours et accessible sur le site Web de la municipalité. D’autres rencontres citoyennes sont aussi prévues d’ici la présentation finale du plan en juin.
Selon Stéphan Dubé, l’un des responsables du PDCN, les tensions commerciales augmentent l’urgence d’agir : « Chaque projet concret est une assurance-vie contre les crises à venir. Tout en restant rigoureux, on va développer des initiatives le plus rapidement possible. Ça n’a pas besoin d’être hyper coûteux ou compliqué, il faut juste apprendre à sortir des sentiers battus. Par exemple, on pourrait imaginer fournir le dépanneur en légumes grâce au surplus du jardin communautaire ».
Cela fait quelques années qu’Auclair a planté les graines de sa résilience : un jardin communautaire et un frigo libre-service ont vu le jour après la pandémie. Dans la foulée, la municipalité a récemment acquis l’ancien restaurant pour en faire un pôle dédié à l’alimentation – transformation, conservation et restauration collective. À quelques pas de là, une serre éducative, installée près de l’école primaire, initiera dès l’année prochaine les élèves à l’agriculture tout en fournissant des légumes aux citoyens. La municipalité développe aussi un projet de logement pour la relève agricole et envisage de transformer l’église en espace communautaire. Toutefois, est-ce que tous ces beaux projets suffiront pour redonner à Auclair sa grandeur ?
La mobilisation des gens d’Auclair, à l’instar de nombreuses communautés québecoises, rend Stéphan optimiste : « Ça reste un gros défi, mais on a l’appui de beaucoup de monde. Il faut rester mobiliser et se donner des moyens pour agir. Si on fait ça, je suis convaincu qu’on va finir par reconnecter nos communautés, même si c’est juste un jardin à la fois.».