Mes nombreux déplacements en Mauricie ou ailleurs m’amènent plus souvent qu’autrement à faire le plein de mon véhicule. Et chaque fois, comme beaucoup d’entre vous, je me dis que l’on paie trop cher et que les pétrolières et les gouvernements s’en mettent plein les poches.
Le mois dernier, à une station-service de Trois-Rivières, je fais le plein d’essence et j’en profite alors pour m’acheter une bouteille d’eau. Un achat pour calmer ma soif, mais qui déclenche, une fois la bouteille d’eau en main, une autre réaction en chaîne. C’est avec étonnement que je prends conscience du prix et effectue rapidement la comparaison du prix demandé pour 500 ml d’eau avec celui du litre d’essence.
Très peu de gens contestent le prix exigé pour un litre d’eau. Est-ce parce qu’au dépanneur, en grande surface ou à la machine distributrice, on la retrouve parmi les boissons gazeuses ou sucrées et que l’on associe son prix à ces dernières? Un tel positionnement m’amène à m’interroger: à qui profite-t-il réellement?
Mon questionnement m’a amené un peu plus loin. Sur le site du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, j’y fais une découverte bouleversante. Connaissez-vous le Règlement sur la redevance exigible pour l’utilisation de l’eau et son guide d’application publié en 2015? De cette lecture, j’en sors complètement estomaqué et interloqué! Pourquoi me direz-vous? Simplement, pour trois raisons.
Mais qui paie l’autre partie des coûts ?
On apprend que ce règlement a, «de façon générale, pour objet de récupérer auprès des utilisateurs de l’eau, une partie des coûts publics et sociétaux de conservation, de restauration et de mise en valeur de l’eau et des systèmes aquatiques (p. 1)». Mais qui paie l’autre partie des coûts, me direz-vous?
La partie récupérée auprès des utilisateurs se fait par le biais d’une redevance. En effet, la redevance exigible est de 0,07 $ par mètre cube notamment pour les entreprises qui embouteillent de l’eau en bouteilles ou autres contenants ou qui fabriquent des boissons. De prime abord, le tarif me semble raisonnable jusqu’à ce que je découvre qu’un mètre cube équivaut à 1 000 litres. Eh oui! Vous avez bien lu, sept sous par 1 000 litres d’eau. Toute comparaison étant boiteuse, me direz-vous, mais ça me fait penser à la redevance de 1 sou la tonne exigée par Duplessis aux entreprises minières de la Côte-Nord.
Finalement, le Règlement stipule que ce sont uniquement les entreprises ou industries qui prélèvent ou utilisent plus de 75 000 litres et plus par jour directement de la ressource ou à partir d’un système de distribution d’eau qui y sont assujetties.
Le gouvernement est tenu complètement dans l’ignorance
Ma recherche m’apprend que les données précises sur la consommation totale d'eau par industrie sont inexistantes ou alors tenues confidentielles pour des raisons de concurrence. Le gouvernement est tenu complètement dans l’ignorance et il appartient à chaque entreprise de soumettre par voie électronique une déclaration de leurs activités de prélèvement ou d’utilisation d’eau. Et qui assure le suivi et le contrôle de ces déclarations? Aucune information n’est disponible sur le site du ministère alors que l’enjeu me semble de taille!
Si l'eau est un bien collectif comme le proclame le gouvernement, pourquoi tous les consommateurs incluant les grands utilisateurs n’en assument-ils pas totalement les coûts à pleine hauteur? Cette question se pose alors que plusieurs municipalités du Québec connaissent des problèmes importants de consommation d’eau et que le gouvernement doit les aider par le biais de trois programmes à remettre à niveau leurs infrastructures d'eau potable.
Je conçois très bien que, dans le cours de ses réflexions et de sa préparation pour le prochain budget du Québec, le ministre des Finances, M. Leitao, annonce à la fois une consigne sur les contenants de plastique notamment sur les bouteilles d’eau, mais également un rehaussement significatif de la redevance et l’abaissement du seuil de captage.
Il m’apparaît juste et équitable dans le débat actuel sur le financement public que les grands utilisateurs paient beaucoup plus qu’une partie des coûts publics et sociétaux de conservation, de restauration et de mise en valeur de l’eau et des systèmes aquatiques. Il est inconcevable que ces coûts ne soient pas assumés entièrement par ces utilisateurs et qu’une fois encore, le fardeau fiscal repose uniquement sur le citoyen.
M. Leitao, il est plus que temps d’agir, faites-le pour le bien collectif!