Pour diminuer l’usage des pesticides, il faut s’attaquer à la logique agroalimentaire, suggère l’écologiste Laure Waridel, devenue tout récemment marraine de l’Institut Jean-Garon.
« Tout ce que nous mangeons est loin de nous, ce qui occasionne des pertes et une réduction de la qualité. Il n’y a pas que les agriculteurs qui doivent réagir, il y a aussi les distributeurs et les consommateurs. Nous faisons tous partie du problème et des solutions », précise la directrice exécutive du Centre interdisciplinaire de recherche en opérationnalisation du développement durable (CIRODD).
En finir avec les pesticides
Coanimatrice du débat sur La stratégie québécoise sur les pesticides 2015-2018, tenu récemment à l’UQAM, Laure Waridel estime possible de produire de manière efficace tout en utilisant moins de glyphosate/ Roundup Ready, d’atrazine ou encore de semences enrobées.
« Il faut accompagner les agriculteurs dans la transition qui remplacerait l’agriculture industrielle. Même le milieu universitaire a pris conscience que c’est un autre système qui exige des connaissances et des parts de risques importants. Les programmes doivent s’adapter, se transformer », poursuit-elle.
Il ne faut pas se faire d’illusions
Pendant qu’une poussée vers une agriculture plus raisonnée, plus écologique prend de l’ampleur, les multinationales de l’agrochimie consolident leurs pouvoirs sur les semences, les intrants chimiques, les pesticides, les sources d’approvisionnement. Plusieurs intervenants du débat sont convaincus qu’elles ne laisseront pas le marché leur filer entre les doigts.
« Les grandes entreprises développent des volets bio-pesticides, car elles n’ont pas le choix de s’y mettre. Mais ce qui les intéresse c’est le contrôle du marché et faire de l’argent. À court terme c’est positif, car elles libéreront moins de pesticides polluants sur la planète. Mais à long terme, si on réfléchit à la justice sociale, il n’y a rien de positif à laisser la concentration des semences entre les mains d’une poignée de puissantes multinationales », ajoute Laure Waridel.
Un lien avec les maladies chroniques
La militante est d’avis que les données statistiques sur la hausse des maladies chroniques, dont les agriculteurs sont les premières victimes, devraient encourager tous les acteurs impliqués à trouver des solutions alternatives.
Laure Waridel encourage les agronomes à revoir en profondeur leur structure de fonctionnement et de financement.
« Il faut que leur mandat soit la réduction de l’utilisation des produits chimiques. Autrement, nous sommes pris dans un cercle vicieux. C’est un profond changement de paradigme qui doit s’instaurer dans la profession » estime la directrice du CIRODD.
Marraine de l’Institut Jean-Garon
Laure Waridel se réjouit de joindre les activités de l’Institut Jean-Garon, à l’invitation de son président Jean Pronovost. Elle entend réfléchir aux actions en faveur de la transition écologique de l’agriculture québécoise.
« Génération après génération, nos agriculteurs se sont fait dire quoi faire, comment cultiver. Ils se sentent souvent vulnérables et isolés. La mission de l’Institut peut très bien rejoindre celle du CIRODD. Nous travaillerons ensemble pour réduire les impacts négatifs des pratiques agricoles actuelles et pour valoriser les innovations », propose-t-elle.
Crédit-Photo : Isabelle Clément