Les réalités derrière la gestion de l’offre selon Ghislain Gervais

Dans le cadre des Rendez-Vous des Affaires de la Fédération des chambres de commerce du Québec ce midi, le président de La Coop fédérée, Ghislain Gervais*, s’est adressé à une quarantaine de membres de la FCCQ à Montréal. Cette présentation portait sur les réalités derrière la gestion de l’offre. Dans son discours, M. Gervais a dressé un portrait détaillé de la gestion de l’offre, de son impact positif et majeur sur l’économie québécoise et canadienne. Il a également exposé en détail les conséquences de son éventuelle abolition sur l’agriculture, l’industrie agroalimentaire, l’emploi et les régions, jamais très loin de l’approche adoptée par Bégin, Patelli et Turmine dans leur livre : UNE CRISE AGRICOLE AU QUÉBEC, publié cet automne, ni très loin du discours répandu depuis quelques mois par l’Institut Jean-Garon.

«Le Canada s’engagera éventuellement dans la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain avec les États-Unis et le Mexique. Or, cet exercice est porteur d’importantes préoccupations pour les producteurs agricoles et l’industrie agroalimentaire canadienne. » a dit M.Gervais en ouverture de discours.

Il suffit de penser, a-t-il dit, à la taille des fermes américaines, les milliards versés en subventions aux exploitants et les modes de production qui y sont pratiqués et qui défient l’imagination. « En soi, cette comparaison suffirait à justifier notre inquiétude et celle de toutes les régions du pays».

Il a ensuite rappelé que l’agriculture est une activité économique importante au Canada. Elle est d’abord et avant tout «une activité profondément humaine, une histoire d’hommes et de femmes qui, d’une génération à l’autre, se sont succédé et ont porté à haut niveau leurs standards en offrant à leurs concitoyens un accès à des produits de haute qualité».

La gestion de l’offre, un choix de société

Pour lui «la gestion de l’offre est un choix de société, un choix de valeurs. En ce sens, notre philosophie agricole et agroalimentaire s’impose comme une partie de notre identité collective, l’expression du respect que nous portons à la personne, à la famille, aux animaux, au territoire et à l’environnement», a-t-il précisé.

Interpellant le premier ministre Justin Trudeau, il dira : «chaque jour, nos agriculteurs modernisent leurs pratiques, recourent à des technologies plus performantes et plus écologiques, diversifient leur offre de produits et participent à notre rayonnement mondial, tout en faisant la démonstration de la pertinence d’un modèle – celui de la gestion de l’offre – qui permet aux producteurs, aux transformateurs et aux consommateurs d’y trouver leur compte, tout en assurant la sécurité alimentaire de tous».

Il s’est inquiété des « prédateurs agro-économiques qui rêvent de maximiser davantage leurs profits en entrant dans nos fermes et nos supermarchés sans tenir compte du dommage que cela causerait à nos économies régionales».

«Dans la négociation qui s’annonce, les choix politiques et économiques que fera le Canada auront des répercussions sur de nombreuses générations de Canadiens à venir», a-t-il dit.

Trump et Bernier derrière la popularité du monde du lait et de la gestion de l’offre

«On m’a invité à venir vous parler des réalités derrière la gestion de l’offre qui n’est en fait qu’un moyen pour stabiliser les revenus des producteurs en faisant correspondre l’offre à la demande sur le marché canadien. D’emblée, je dois dire que La Coop fédérée est pour la libéralisation des échanges puisque nous exportons pour plus d’un milliard de dollars de produits de porc et de grains dans près de 50 pays. Nous croyons fermement que la libéralisation des échanges favorise généralement la croissance économique des partenaires commerciaux impliqués. Nous croyons aussi fermement que les pays sont justifiés de protéger leurs secteurs sensibles, d’autant plus, s’il s’agit de denrées agricoles qui ont davantage des caractéristiques de bien de nécessité que de marchandises. D’ailleurs la très grande majorité des pays le font pour des raisons de sécurité alimentaire ou pour des impératifs socioculturels. C’est pourquoi nous supportons également la gestion de l’offre», a-t-il poursuivi.

Il a ajouté ensuite : « Ce dossier a beaucoup occupé l’avant-scène de l’actualité au cours des dernières semaines. La montée de lait, si vous me permettez le jeu de mots, du président américain en avril dernier au Wisconsin en présence de producteurs de lait, et le programme politique d’un candidat à la direction du Parti conservateur faisant l’apologie d’un libéralisme économique débridé, ont contribué à rendre le sujet populaire.»

Ghislain Gervais a rappelé aussi qu’une récente étude du Boston Consulting Group, «une firme qui n’est pas réputée pour sa complaisance vis-à-vis des politiques agricoles canadiennes, a clairement démontré que dans tous les pays qui ont abandonné leurs systèmes de gestion de l’offre, les premières victimes sont les producteurs agricoles et les régions sans que les consommateurs n’en tirent de réels bénéfices».

Il a souligné que la stabilité des approvisionnements rendue possible par la gestion de l’offre a permis à des entreprises comme Agropur et Saputo de croître et de gagner une stature internationale et d’attirer des entreprises internationales sur nos marchés. «Pas si mal pour un système pas efficace! », a-t-il ponctué !

La Coop fédérée dans l’esprit du livre UNE CRISE AGRICOLE AU QUÉBEC !

Précisant que la libéralisation des marchés ne se fait jamais à coût nul, il a rappelé que les gouvernements doivent constamment soutenir avec des fonds publics les agriculteurs quand les prix payés à la ferme sont à la baisse.

Sur le même ton que dans le livre UNE CRISE AGRICOLE au Québec coédité par La Vie agricole et VLB Éditions, Ghislain Gervais a prêché pour le maintien de la vitalité des régions grâce au système de gestion de l’offre : «La gestion de l’offre a un impact positif sur l’occupation du territoire et de l’environnement. (…) L’abolition de notre système de mise en marché ferait disparaître une grande partie de toutes les petites fermes familiales actuelles, hypothéquerait la vitalité des régions du Québec et du Canada. On estime que 40 % de l’industrie laitière canadienne serait à risque et qu’entre 4500 et 5000 fermes pourraient disparaître. Il faudrait aussi compter les pertes de métiers, d’emplois directs et indirects qui disparaîtraient dans toutes les petites communautés. Il y aurait une hausse marquée du nombre des municipalités dites dévitalisées.»

 «Par exemple, si nous ouvrons nos frontières au lait américain, nous ouvrons la porte à des produits laitiers qui auront été produits par des vaches qui reçoivent des injections de divers produits comme la Somatotropine, une hormone de croissance qui stimule la production du lait. Les producteurs de lait canadiens ont refusé de faire usage de ce produit et il a été interdit d’usage au Canada depuis 1998».

«Il faut cesser de mettre l’agriculture comme monnaie d’échange dans les négociations commerciales et revendiquer l’exception culturelle associée à ce bien de nécessité vitale Le domaine de la culture et des arts a réussi avant nous à s’extraire de ces débats. Notre secteur est patrimonial. C’est le fruit d’un héritage et d’une certaine identité et il répond aux attentes des consommateurs d’aujourd’hui.», a-t-il conclu.

 

*Ghislain Gervais est aussi : Président du conseil d’administration d’Olymel s.e.n.c. Président du conseil d’administration de Groupe BMR

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