ALENA 2017: le Canada est difficile à suivre

Les trois  pays membres de l’ALENA ne pourraient être plus différents dans leur approche face à la renégociation de 2017.

Trump, le leader américain, n’a d’objectif  avoué que de sortir gagnant de cette négociation. Il ne parle pas de gagnant-gagnant, il parle strictement d’un seul gagnant : les USA.  Pour sa part, le Canada est moins transparent dans ses objectifs de négociation que les Américains. De plus, il semble avoir plus d’objectifs sociaux qu’économiques, sinon il semble demander le statu quo. Serait-ce une approche adaptée à la situation particulière des États-Unis avec son leader imprévisible, par exemple, d’en rendre public le moins possible, mais de demander mer et monde une fois les portes closes? Considérant le personnage, ce pourrait être une bonne stratégie, car moins il en saura, mieux ce sera et moins il pourra « tweeter » sur le sujet et rehausser les attentes des États-Unis, ni d’en faire une question d’orgueil.

Les Américains demandent de mettre fin à la gestion de l’offre (GO), fin à la protection des industries culturelles (reconnues mondialement comme un secteur non économique) et de remplacer des arbitrages internationaux indépendants (reconnus mondialement aussi comme valables)  par des décisions unilatérales américaines. Ils veulent rapatrier la construction d’automobiles chez eux, empêcher les Canadiens de soumissionner auprès des contrats des villes et états américains, maintenir le « Buy American », limiter la vente de parties d’automobiles, etc. En passant, Il y a peu de nouveau dans ces ambitions.

Face à la centaine de demandes de changements économiques des Américains, oh surprise, les Canadiens eux, semblent prioriser des mesures sociales. Parmi les dix demandes officielles, cinq sont sociales, soit un nouveau chapitre sur les normes de travail, un nouveau chapitre sur l’environnement, un nouveau chapitre sur l’égalité des sexes, un chapitre sur les autochtones et une libre circulation des professionnels. Trois des mesures canadiennes demandent le statu quo, soit conserver le chapitre 19, conserver l’exception culturelle et conserver la gestion de l’offre. Inspiré par un changement apporté à l’AECG, le Canada demande de mettre un terme aux mesures  qui permettent à des compagnies privées de poursuivre des gouvernements (Chapitre 11).  La seule mesure économique que demande le Canada est d’éliminer le « Buy American ».

S’agit-il d’une stratégie astucieuse du genre, si on ne demande rien, on peut refuser de concéder quoi que ce soit? Serait-ce que des normes de travail égales dans les trois pays enlèveraient certains avantages injustes aux Mexicains, voire aux États-Unis qui utilisent des travailleurs illégaux? Serait-ce une approche identique pour la demande canadienne des normes environnementales dans le sens de ne pas permettre de sacrifier l’environnement pour devenir plus concurrentiel?  Quant aux  considérations identiques sur l’égalité des sexes et sur les autochtones, une motivation potentielle est moins évidente? Finalement, la libre circulation des professionnels est une bonne chose pour tous et facile à comprendre. Ma tendance aurait été de demander une foule de choses “inutiles”  que j’aurais gracieusement concédées en cours de négo pour tenir mordicus à ce qui compte vraiment .

Le Canada qui a réduit la promesse de 4$ milliards en 2015 pour les fromageries canadiennes en 350$ millions et l’a diluée davantage, car l’offre est disponible  à tous les produits laitiers dont la majorité ne subira aucune perte suite à l’AECG comme le beurre et le lait concentré; ce même gouvernement qui vient d’accorder contre l’avis de tous, 50% des nouveaux contingents européens de fromages aux détaillants,  annonce aujourd’hui que la négociation de l’ALENA sera difficile et que la défense de la gestion de l’offre ne sera pas évidente.  Il demeure décidément difficile à suivre.

Toutefois, reconnaissons que puisque Trump s’est prononcé publiquement sur le lait, ce sera difficile de ne pas bouger en négociation. C’est le degré de concession en GO qu’acceptera le Canada qui intéresse. Dans les circonstances, il est normal de s’inquiéter, car il y a peu sur la table à concéder.

 

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