L’été est arrivé et, avec lui, s’amorce une nouvelle saison de barbecue. Pour plusieurs d’entre nous, cela nous ramène aux grillades, saucisses merguez ou hamburgers partagés avec la famille, les parents et les amis. Comme rapporté tout dernièrement par Radio-Canada ou d’autres médias, connaît-on exactement ce qu’on mange ! De la saucisse merguez contenant outre le bœuf et l’agneau, du porc et du cheval et ce, en quantité tout aussi importante que les deux ingrédients qui doivent la constituer normalement. De l’huile d’olive contrefaite ou un poisson à la place de celui qu’on croyait acheter ! Est-ce normal ?
Plusieurs cas de fraude alimentaire nous sont rapportés fréquemment. Tout dernièrement, une entreprise de l’Ontario a été condamnée par l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) à la plus importante peine jamais imposée au Canada pour avoir enfreint les lois sur l'étiquetage. Cette dernière devra débourser 1,5 million de dollars en amendes pour avoir vendu des légumes importés en prétendant qu'ils étaient des produits locaux.
Dans une lettre d’opinion publiée par La Presse en juin dernier, Sylvain Charlebois, doyen de la faculté de management et professeur titulaire en distribution et politiques agroalimentaires à l’université Dalhousie nous apprenait des faits troublants. Selon lui, «au Canada, une étude récente basée sur des tests d’ADN a démontré que plus de 36 % des échantillons analysés indiquaient le mauvais type de poisson sur l’emballage, soit plus d’un paquet sur trois». Il semble que le problème d’étiquetage soit le prétexte plus souvent invoqué. Le professeur Charlebois nous mentionne que ce phénomène risque de se multiplier au cours des prochaines années.
De plus, il rappelle que la fraude est un phénomène planétaire et non uniquement canadien. Par conséquent, il nécessite en raison de sa complexité de mettre à contribution des actions concertées entre les paliers de gouvernement et les régulateurs déjà en place comme l’ACIA. Des techniques émergentes comme les tests d’ADN devraient permettre de démasquer rapidement les fraudeurs et d’atténuer les cas de fraude.
Mais je partage également l’opinion du professeur Charlebois pour que l’ACIA impose des sanctions financières correspondantes à un montant supérieur au gain escompté par la fraude en question. C’est inacceptable que les fraudeurs ne soient pas suffisamment punis, car, dans certains cas, à défaut d’étiquetage indiquant la présence de tous les ingrédients, ils mettent en péril la vie des consommateurs notamment ceux qui souffrent d’allergies et d’intolérance à certains aliments.
À l’instar du ministre Paradis, il propose que le consommateur puisse, de plus en plus, jouer un rôle de premier plan. M. Charlebois croit que «le meilleur moyen d’instaurer de la discipline au sein de la chaîne alimentaire est de mieux outiller le véritable PDG de l’industrie alimentaire : le consommateur». Cette idée m’apparaît fort intéressante et surtout fort judicieuse. La fraude alimentaire ne date pas d’hier et connaissant l’humain, il sera toujours tentant de recourir à l’escroquerie pour faire plus d’argent.
C’est pourquoi permettre au consommateur de jouer un rôle accru me semble la voie à privilégier. Actuellement disponible en Europe, un outil donne un rôle accru au consommateur et lui permet de télécharger sur son téléphone intelligent une application mobile assurant la véracité des informations affichées sur les étiquettes telles que l’origine des aliments, les dates d’abattage et d’emballage.
Afin de combattre la fraude et assurer une plus grande sécurité alimentaire, je crois que la voie à privilégier pour le ministre Paradis est bien celle-ci. La chaîne de distribution alimentaire et les producteurs du Québec devraient s’insérer dans cette tendance, car, dans un avenir plus ou moins lointain, les technologies nous y amèneront et permettront au consommateur de valider, en temps réel, avec leur téléphone intelligent toutes les informations allant de la certification biologique aux ingrédients utilisés par les transformateurs.
Le consommateur est un joueur-clé et il ne faut pas sous-estimer son rôle dans la lutte à la fraude et à la sécurité alimentaire.