Taxes foncières: un bras-de-fer qui en cache plusieurs autres

Je ne suis pas un admirateur de Pierre Paradis, contrairement à plusieurs opposants à l'UPA. J'estime que c'est un beau parleur, qui aime bien provoquer l'UPA en paroles et donner des bonbons aux opposants, mais ne fera de réformes sérieuses en pratique, entre autre parce qu'il n'a pas l'oreille du Bureau du Premier ministre, où l'on n'est sûrement pas intéressé à un conflit majeur avec l'UPA, le plus gros lobby au Québec. 

Dans ce dossier particulier du remboursement partiel des taxes foncières, il me paraît clair que Paradis obéit en grande partie à des objectifs d'austérité budgétaire: la réforme est conçue pour faire faire des économies au gouvernement sans s'attaquer au problème de fond. L'UPA a donc beau jeu de crier au meurtre, de menacer de refaire le coup des motoneigistes, de faire une guerre de chiffres et de légalité, de convoquer à son secours des soi-disant experts en service commandé, avec les données qu'elle leur fournit, donc pas plus crédibles que les chiffres du gouvernement. 

D'accord, il y a un problème de fond: la hausse vertigineuse et spéculative de la valeur des terres, surtout dans le sud du Québec (dont l'explication reste à préciser): le remboursement partiel des taxes foncières coûte de plus en plus cher au gouvernement, les municipalités voudraient bien pouvoir en profiter aussi, les agriculteurs n'aiment pas voir monter en flèche leurs comptes de taxes même s'ils sont bien contents d'encaisser leur surévaluation quand ils vendent leur terre, et l'UPA en profite pour sonner la charge contre un ministre qui ose toucher à l'ASRA et qui laisse croire qu'il pourrait toucher à leur monopole de représentation et de mise en marché. En d'autres mots, tout le monde essaie de tirer profit de la situation sans s'attaquer vraiment à la négociation de solutions à la question de fond: comment traiter la taxation des terres agricoles dans le contexte actuel, et surtout, dans l'optique d'une politique agricole quelconque, qui nous fait toujours tragiquement défaut car ce sont toujours les multinationales agro-alimentaires qui mènent le jeu.

En attendant, ce n'est pas faux de dire que les méga-fermes, responsables des trois quarts de la production commerciale agricole, sont des méga-entreprises millionnaires largement subventionnées (le terme "milliardaires" est sans doute un peu fort et malicieux!), qui ont des revenus bien supérieurs à la moyenne et qui, au surplus, n'assument que très partiellement les coûts sociaux, environnementaux et en santé publique que génèrent leurs activités: en d'autres mots, ce sont des hommes d'affaires et non des quêteux ni des bienfaiteurs. Il y a des conséquences à vouloir devenir toujours plus gros. On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre.

 

 

 

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