Au cours des dernières années, peu de médias, à mon avis, ont rapporté la détresse que vivent de nombreux agriculteurs et agricultrices du Québec. Au pays de monsieur Séguin, la situation n’est pas si rose qu’on puisse se l’imaginer. Plus souvent qu’on le pense s’y camouflent la détresse et l’anxiété.
La population en général, me semble-t-il, est peu renseignée sur le métier d’agriculteur ou d’éleveur ni sur les exigences du métier et les défis auxquels les agriculteurs et les éleveurs sont confrontés.
Qu’est-ce qui cause tant de détresse chez ces derniers? Vivre à la campagne, n’est-ce pas le rêve de tout bon citadin aux prises avec des nids-de-poule et des bouchons de circulation!
Les agriculteurs et les éleveurs côtoient une multitude de facteurs hors de leur contrôle! Tantôt, une région connaît la sécheresse alors qu’une autre est aux prises avec des pluies abondantes et des inondations ; tantôt c’est la signature d’accords commerciaux avec l’Europe ou les États-Unis qui ouvrent des brèches importantes dans la gestion de l’offre et donnent aux producteurs étrangers des parts significatives du marché québécois de l’alimentation, tantôt c’est l’imposition d’obligations environnementales supérieures à celles de leurs concurrents.
Aux nombreuses heures de labeur en raison d’une pénurie de main-d’œuvre s’ajoutent les factures à payer pour nourrir ou soigner le troupeau ou celles pour la machinerie à réparer ou à remplacer. À titre d’exemple, dernièrement, des éleveurs qui ont souffert l’été dernier de la sécheresse ont dû vendre, à contre-cœur, une partie de leur troupeau à défaut d’avoir le foin suffisant pour les nourrir.
Comme on peut le constater, de nombreux facteurs se combinent pour former, avec le temps, une montagne infranchissable. Un certain nombre d’entre eux subit le contrecoup de cette accumulation! D’années en années, le stress augmente et, chez certains, insidieusement le doute et l’anxiété s’installent et mènent fatidiquement à la détresse. Je me joins à la voix de plusieurs personnalités qui lancent un cri d'alarme au regard de la détresse psychologique de plusieurs agriculteurs et agricultrices.
S’il est vrai que des ressources sont disponibles pour leur venir en aide, force est de constater qu’elles se font encore trop rares.
Faut-il préciser qu’en sus d’un horaire de travail chargé, les agriculteurs sont peu enclins à se déplacer pour aller à la rencontre de ressources spécialisées. Dans leur coin de pays, ces personnes se terrent et se taisent croyant que le nuage de l’anxiété et de la détresse au-dessus de leur tête va finir par passer tout seul.
Dans certaines régions, avec la collaboration de l’UPA et d’autres associations, il existe des sentinelles ou des travailleurs de rang qui veillent au dépistage de la détresse psychologique chez les producteurs. Les efforts déployés sont fort louables, mais, à mon avis, c’est encore trop peu par rapport à la situation actuelle. Il m’apparaît important de compléter ce réseau de sentinelles et que puissent s’ajouter d’autres ressources à celles déjà existantes.
Ma connaissance du milieu rural m’incite à croire de la nécessité d’aller de ferme en ferme afin de déceler plus rapidement l’état d’esprit de certains de nos agriculteurs. Plus rapidement sera lancée l’alerte, plus rapidement nous éviterons l’inévitable causé par la détresse et l’anxiété!
Je me joins à l'appel de l’Union des producteurs agricoles du Bas-Saint-Laurent qui, depuis 2017, a déposé une demande au gouvernement du Québec pour débloquer des fonds, dans chacune des régions du Québec. Des fonds consacrés au dépistage de la santé psychologique de nos agriculteurs et agricultrices.
Monsieur le ministre, une réflexion s’impose avec vos collègues de la Santé, des Services sociaux et du Développement économique régional.
Le besoin est bien réel et la détresse est au quotidien dans nos territoires ruraux. Il suffit de s’y promener pour le constater.
Mettons-y fin, car nous n’avons plus les moyens de gâcher d’autres vies ou d’autres rêves.