NDLR : Suite à l’entrevue donnée par Sylvie D’Amours, critique en matière agricole à la Coalition Avenir Québec (CAQ), à notre journal La Vie agricole dans le cadre de la rentrée parlementaire, le critique en matière agricole du Parti Québécois, André Villeneuve, a lui aussi rejoint La Vie agricole pour répondre point par point à Mme D’Amours ! Assurément le débat sur les grands enjeux politiques et économiques en agriculture se passe dans notre publication !
“Paradis, introuvable“ dit Villeneuve !
(LVA) En tant que porte-parole de l’opposition officielle en matière d’agriculture et d’alimentation, je tiens à répondre à certaines affirmations que madame Sylvie D’Amours, députée de la CAQ, a faites à la Vie agricole, de nous dire M.Villeneuve.
Sylvie D'Amours: « Le ministre Paradis, qui dit rencontrer des producteurs toutes les semaines, ne serait pas au courant de l’importation massive de protéines laitières par des transformateurs canadiens, et s’il l’est, pourquoi, tout comme la Fédération, il n’en a pas parlé »
André Villeneuve : Sur ce point, je suis tout à fait d'accord avec madame D'Amours. Le ministre a beau dire le contraire, il n'est assurément pas un homme de terrain. Tous les intervenants et je dis bien tous les intervenants que j'ai rencontrés abondent dans le même sens : le ministre est introuvable. Pour un ministre de l'Agriculture, c'est tout un handicap!
SD: « À Lachute cette semaine, l’expert parlait chiffres et les agriculteurs parlaient de leurs sentiments. Il y a là deux discours qui ne se rejoignent pas. Il faut les écouter et je me demande pourquoi le ministre Paradis n’a pas encore de Plan B »
AV : Pour ce qui est de la gestion de l'offre, nous n'avons qu'à regarder ce qui se passe en Europe pour constater que son abandon n'est pas la voie à suivre. À cet égard, les propos de Catherine Darrot, spécialiste française du monde agricole, sur l'abolition des quotas laitiers sont éloquents : « Je crois que ce n'était pas du tout une bonne décision. Pourquoi avoir supprimé un système qui marche et qui ne coûte pas cher? » Les pourfendeurs de l'UPA doivent admettre que l’organisation ne manque pas une occasion de défendre la gestion de l’offre.
SD: « Quand j’entends André Villeneuve du Parti Québécois se plaindre, j’aimerais lui rappeler que c’est Mme Marois qui a signé l’accord pour faire entrer 17 000 tonnes de fromages au Québec »
AV : Je tiens à rappeler à Sylvie D’Amours que le Québec n’est pas maître de son destin lors de telles négociations commerciales, mais plutôt subjugué à la volonté du Canada. Tant que nous ne serons pas indépendants, nous ne pourrons jamais négocier nous-mêmes les traités internationaux. Malgré cela, le gouvernement du Québec a toujours, à ce jour, la possibilité de ne pas ratifier l’AECG, ce que le Parti libéral refuse même d'envisager. D'ailleurs, il serait intéressant de savoir où la CAQ loge dans ce dossier. Notre position a toujours été très claire, le Québec ne devrait signer l'entente que dans la mesure où les producteurs de lait et de fromage du Québec auront reçu l'assurance de la part du gouvernement fédéral qu’ils obtiendront les compensations satisfaisantes, notamment en ce qui a trait à la gestion des nouveaux quotas d'importation.
SD: « Il est vrai qu’en tant que CAQ, on n’a pas encore statué sur le pluralisme syndical. Je ne peux pas m’avancer là-dessus tant qu’une décision démocratique n’est pas prise au parti. »
AV : Après avoir déblatéré sur le travail effectué à l'UPA par et pour ses membres, Sylvie D’Amours admet que son parti n'a pas de position quant à l’accréditation unique. Elle déclare que son parti devra statuer sur le sujet de manière démocratique (en ne se soumettant à aucun échéancier) mais nie ce même droit démocratique aux producteurs agricoles. Au Parti québécois, nous pensons justement qu'il revient aux agricultrices et agriculteurs du Québec de se prononcer de façon libre et démocratique sur leur avenir, tout comme l’accréditation unique a été entérinée par référendum.
SD: « L’UPA, lui défend les petites fermes par souci pour la relève mais aussi parce que plus de fermes, c’est plus de cotisations. »
AV : Il appartient aux agricultrices et agriculteurs du Québec de donner le ton et la couleur à l'agriculture de demain et cela en prenant en compte les aspirations des Québécois. On ne peut nier qu'il y a en ce moment une diversification sans précédent des produits québécois offerts aux consommateurs. L’essor faramineux, au cours des dernières années, des vins, des micro-brasseries, des fromages et des autres produits du terroir en témoigne. Le raisonnement de madame D’Amours fait fi de toute cette effervescence, fruit du travail des agriculteurs et de leurs fédérations accréditées avec leurs partenaires des filières. Dois-je rappeler à la députée de la CAQ qu’actuellement, on exporte plus de porc québécois dans le monde qu’on exporte d’électricité? Dire que l'UPA fait tout ce travail envers les agriculteurs dans le seul but de collecter plus de cotisation annuelle, comme l'affirme madame D'Amours, est un peu court et simpliste.
SD: « C’est que tous les partis sont unanimes sur le fait qu’il n’y a pas d’accaparement des terres au Québec »
AV : Dans un premier temps, j'aurais bien aimé que madame D'Amours me consulte avant de faire une telle affirmation. François Legault a appuyé le modèle Pangea, de Charles Sirois, co-fondateur de la CAQ. Ce n’est donc pas surprenant que Sylvie D’Amours nie que de plus en plus de terres deviennent la propriété de fonds d’investissement. On ne peut que constater qu’il y a une augmentation inquiétante de fonds privés qui investissent dans l'acquisition de bonnes terres agricoles au Québec. Il est donc primordial de collecter des données sur le phénomène et d’agir pour le ralentir. Il en va de l’avenir de la relève agricole, qui a besoin de ces terres pour s’établir.
SD: « Dans le dossier de l’érable, ça ne tient pas la mise en marché actuelle ! »
AV : Même si certains opposants ne sont pas satisfaits de la mise en marché collective dans les produits de l’érable, le système a néanmoins été approuvé par une majorité de producteurs. Cette forme de mise en marché permet une stabilité qui ne serait pas possible autrement lors de mauvaises années pour la production de sirop. Qu’on soit en accord ou pas avec la situation actuelle, j’invite Sylvie D’Amours à respecter la volonté démocratique des producteurs qui ont voté en faveur de la mise en marché collective. Cessons de tout voir en noir comme la CAQ. Utilisons les forces qui sont les nôtres. Faisons confiance à nos agricultrices et à nos agriculteurs. Et surtout assurons–?nous que l'État du Québec travaille pour et avec nous. J’invite Sylvie D’Amours et la CAQ à se joindre à nous afin de convaincre les libéraux que les agriculteurs doivent être encouragés au lieu d’être découragés!