Régis Labeaume, le maire de Québec et président du Forum des élus de la Capitale-Nationale, rencontré cet après-midi par La Vie agricole, s’est dit très fier de présenter le premier Forum agricole et agroalimentaire de la Capitale-Nationale à Saint-Raymond qui se tient ce 28 avril. Cette rencontre fut l’occasion de parler librement de quelques grands enjeux agricoles qui concernent l’ensemble de la société québécoise.
“Mon principe de base c’est qu’une ville comme Québec entourée d’un milieu agricole rural c’est une richesse incroyable pour la qualité de vie. On a la possibilité d’aller à une demi-heure d’ici en milieu agricole. Vivre à Québec ça veut dire que tu as accès à une demi-heure facilement à une ferme, à une érablière, à une fromagerie, etc. Cette proximité-là ajoute à la qualité de vie. Mais même si ce sont des avantages, ce ne sont pas toujours des réalités la rencontre du rural et de l’urbain“ nous confie M.Labeaume.
Le grand marché un outil pour réunir deux solitudes: les ruraux et les urbains
Le maire de Québec s’est donc demandé comment profiter des avantages de la proximité avec le monde agricole et rural. “Le cœur du projet c’est la création du grand marché. Pour faire en sorte que les produits agroalimentaires y soient présentés. Ce qui est bon pour La Malbaie est bon pour Québec, ce qui est bon pour Portneuf est bon pour Québec. Ce projet va permettre à tous les producteurs de la région de faire connaître leurs produits“ dit-il voyant cette opération comme un soutien de la Ville de Québec à la vitalité des régions rurales de proximité.
“On connaît la difficulté de commercialiser des produits. On va les aider à le faire“ , ajoute-t-il.
Si le marché sera une gigantesque vitrine pour les producteurs, le Forum vise aussi à faire connaître les produits auprès des restaurateurs.
Retour d’un Happening agricole à Québec !
“Oui, il va y avoir un retour d’un happening agricole à Québec, mais différent. Le grand Happening agricole, ça sera le grand marché“, nous dit-il. Mais M. Labeaume nous assure qu’il n’y aura pas de retour du jugement des animaux à Québec. L’orientation choisie: c’est la promotion agricole à travers les produits du terroir.
L’agriculture urbaine ça ne dit rien aux maires des régions proches de Québec
“On a fait le choix de densifier, mais de ne pas construire dans des bassins versants. Quand tu fais cela, tu fais le choix de ne pas développer certains territoires. Aussi parfois tu peux être serré dans ton périmètre urbain et ce qui est à l’intérieur de celui-ci doit être développé. Quand ça devient serré, il faut qu’il se passe quelque chose. Quand je parle à mes collègues de Portneuf ou Charlevoix, l’agriculture urbaine, ça ne leur dit absolument rien ! Ils disent on a l’agriculture chez nous, essayez donc de nous aider à la place !“
Création d’une banque de terre pour réseauter
Dans son document publié le 7 mars 2016 et intitulé : “ Stratégie de développement des activités agricoles et agroalimentaires de la région de la Capitale-Nationale et de la Ville de Lévis“ que M. Labeaume nous a remis, on y retrouve le projet de création d’une banque de terre. On y spécifie : “ Malgré les besoins identifiés, de nombreux hectares de terre demeurent actuellement inexploités autant pour des raisons de coûts que par absence de mécanismes favorisant l’échange entre propriétaires et exploitants“. Il y a donc une volonté de répertorier et de faciliter l’accès à la terre. On y explique aussi que le taux de location des terres atteint des records plus élevés que dans le reste du Québec. Sur certains territoires, dont l’agglomération de Québec et de Lévis, le taux de location des terres agricoles est de 44 % alors que ce taux est de 31 % à l’échelle du Québec.
Syndicalisme agricole: “Un monopole c’est toujours contesté“
Questionné à propos de la situation survenue cette semaine lorsque l’UPA a demandé la tête du ministre de l’Agriculture pour contrer le risque de voir venir le pluralisme syndical, M. Labeaume nous a répondu : “ Je vais laisser le ministre avec ses dossiers. Ça a zéro conséquence sur ce qu’on fait au quotidien ici donc je vois cela comme un spectateur. Mais c’est toujours ça les monopoles. À un moment donné c’est toujours contesté ! “
“ Le libre-échange, ça va devenir compliqué !“
“ Les forces du libre-marché ça va devenir compliqué et en même temps ça remet en question ce qu’on a fait depuis longtemps. On vit la diminution des pouvoirs des gouvernements nationaux. Les traités internationaux ne sont pas un égarement, mais normalement la culture et l’agriculture ont toujours été protégées. Elles ont des places à part et c’est de bon aloi. Il faut donc aller chercher de la valeur ajoutée avec ceux qui veulent créer. “
“Gestion de l’offre, on peut se questionner !“
“ La menace pour le lait, pour les œufs, pour tout ce qui est sous contrôle de production ça va devenir difficile à l’avenir, on le sait tous ! “. dit-il.
Il précisera concernant les quotas, qu’il est effectivement important de se questionner.
“ Quand tu gères l’offre, ça donne lieu à des regroupements. Quand tu gères l’offre, tu donnes une plus-value incroyable au produit. Mais la gestion de l’offre c’était pour l’autosuffisance jadis. Garon a travaillé beaucoup à cela. Ça a pris une tournure qu’on ne pouvait pas deviner. Et le problème si on fait tomber la gestion de l’offre on va tomber dans des problèmes de qualité sanitaire. Mais il n’en demeure pas moins qu’on vit l’érosion continue des pouvoirs nationaux ! “
L’espoir du retour du balancier ?
Lorsque nous évoquons la perception de Mathieu Bock-Côté qui voit un possible retour du balancier vers la nation, M. Labeaume nous dira : “ C’est comme le débat grande surface-petite surface. Il y a un retour à la petite surface. Bien sûr, il va y avoir un retour de balancier. Moi que Amazon ne vende pas à Québec, je m’en fous comme l’an 40. Mais il y a des forces supra qui travaillent là-dessus et qui obligent à ouvrir les frontières. Je suis un libre-échangiste, mais en même temps quand je vois ce qui se passe sur les marchés financiers je suis révolté. Moi les sorties sur les Panama Papers, je trouve cela extraordinaire. Bravo ! “ conclut-il.