L’Action de grâce oubliée…

Quand j’étais enfant, je faisais office de servant de messe à l’église paroissiale de St-Rémi, une magnifique église en Montérégie sise au milieu d’un noyau de ville, entourée d’une campagne fertile parmi les meilleures terres qu’on a vite surnommée “les Jardins du Québec”. C’était dans les années 70 et 80 où l’on célébrait encore religieusement la fête de l’Action de grâce, en octobre.

 

Le Dimanche précédant cette fête au calendrier civil, toute la paroisse se réunissait pour une messe spéciale afin de rendre grâce à Dieu pour l’abondance des récoltes et les fruits de la terre. Des agriculteurs et des producteurs maraîchers rapportaient au pied de l’autel des échantillons divers de graines, d’épis, des fleurs, des fruits et des légumes. Un peu intrigué par cette pratique aux allures païennes, je m’étais risqué à demander au curé quel était le sens de cette pratique un peu sortie de nul part. C’est là qu’on m’expliqua le plus sérieusement du monde qu’il était important de dire merci à Dieu pour le bénéfice des récoltes. Du tac au tac, j’avais poursuivi la discussion en demandant à ce curé rempli de bonnes intentions: “Mais qu’arrive-t-il alors lorsque les récoltes sont détruites par le verglas ou un gel trop hâtif ?”

Silence de mort… Je n’ai jamais reçu une réponse à ma question insolente. L’Action de grâce canadienne n’a rien à voir avec le déploiement de la “Thanksgiving” de nos voisins américains. D’ailleurs, cette fête canadienne est devenue – malheureusement – un simple congé au calendrier bien que certaines familles aient gardé celle-ci comme prétexte à un souper ou des réunions en famille.

Au XXIè siècle, alors que l’Action de Grâce ne veut plus rien dire, il serait peut-être temps d’en profiter pour laisser définitivement le côté divin de l’affaire et dire plutôt MERCI à nos agriculteurs qui font vivre cette industrie trop souvent dans l’isolement et l’incompréhension de notre société civile. Trop de gens ont une vision bucolique, méprisante ou déphasée de l’agriculture. On ne le soulignera jamais assez: l’agriculteur n’exerce pas un métier ni une profession. Il occupe une fonction essentielle dans une société devenue ingrate et ignare des choses réelles et vraies. Car on a beau rêver de la Côte Ouest ou des grandes mégalopoles de l’Asie, la pratique de l’agriculture représente – à mon humble avis – la véritable noblesse de notre passage sur cette Terre. Sans elle, nous ne sommes rien. Sans ceux et celles qui la pratiquent, nous n’existons plus. Voilà la réalité. Et comme on épand le fumier sur nos terres, l’être humain retournera à la terre pour mieux l’enrichir. Tel est notre destin ultime. Merci à ceux et celles qui font de nous ce que nous sommes à tous les jours: des êtres vivants

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