Réflexion sur un Nouveau Monde à l’heure de la balkanisation

L’entente Canada-Europe représente une belle réalisation particulièrement innovatrice pour les deux parties, mais avouons qu’elle est moins unique pour les Européens, si on compare à la formation et au développement de l’Union européenne, une union librement consentie et en constante évolution depuis 60 ans. 

L’idée d’avoir fédéré de façon pacifique et en si peu de temps, autant de nations distinctes autrefois ennemies, voire en guerre depuis des siècles, relève de l’invraisemblable. Le bon fonctionnement de l’UE n’est pas parfait, il évolue parfois en dents de scie, mais à long terme de façon constructive. Tant que le dialogue demeurera leur nouvelle arme de « construction massive », l’Europe avancera de plus en plus vers l’atteinte de ses objectifs les plus ambitieux.

Le préambule du traité de Rome signé en 1957 qui a créé la Communauté économique européenne (CEE) des six signalait son intention d’assurer « une action commune, le progrès économique et social en éliminant les barrières qui divisent l’Europe ».

Un défi pratiquement insurmontable d’unir de façon fonctionnelle des pays capitalistes et démocratiques tout en respectant la légitimité de leurs autonomies, leurs géographies, leurs systèmes politiques, leurs religions, leurs minorités, leurs identités culturelles, etc. a été réalisé, et l’est encore aujourd’hui, par des hommes et des femmes visionnaires et de grands talents.

En 2016, l’ Union européenne (UE) c’est 28 pays, 500 millions de consommateurs à haut niveau de vie, 45 langues, presque le quart de la richesse mondiale. En PIB elle réalise environ 36% du commerce mondial et consacre 27% de son PIB aux financements sociaux.

On a parfois tendance à oublier que l’UE déborde largement son continent et s’étend à l’Amérique du Nord avec les îles Saint-Pierre et Miquelon, les Antilles avec la Guadeloupe et la Martinique, l’Afrique avec la Réunion, l’Amérique du Sud avec la Guyane et l’Asie avec la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie.

Depuis ses débuts l’UE fonctionne avec un Parlement (législatif) dont le siège est à Strasbourg et dont les décisions sont parfois à l’unanimité et parfois à la « majorité qualifiée », un Conseil des ministres (législatif, codécisions avec le Parlement) à Bruxelles et au Luxembourg et dont le Président est Donald Tusk, une Commission (exécutif) située à Bruxelles dont le Président est Jean Claude Junker et une Cour de justice située au Luxembourg.

L’UE est le résultat évolutif d’une série de traités : Rome (1957),  l’Acte unique européen (1986), Maastricht (1992), Amsterdam (1997), Nice (2001) et Lisbonne (2007).

Notons en particulier quelques-unes des nombreuses réalisations de l’UE qui nous intéresse au Canada dont leur politique d’atténuer les disparités économiques tout en visant l’accroissement des particularités culturelles et la « Charte européenne des langues régionales ou minoritaires » qui confère à ces langues « dans la vie privée et publique … un droit imprescriptible ».   Les membres ne sont pas tous tenus d’y adhérer, mais la présence de la Charte impose une certaine autorité morale à tous.

Sur la base de sa courte histoire de 60 ans, l’Union européenne, ce Nouveau Monde constitué de vieux pays, pourrait augmenter sa puissance mondiale et continuer d’être un modèle à suivre pour d’autres régions du globe. J’estime qu’elle survivra à la mode mondiale récente qui pointe plutôt vers la balkanisation.

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