Après les faux-sujets et faux-débats sur «l’accaparement des terres», les «Chinois investisseurs» et maintenant les taxes foncières qui augmentent parlera-t-on un jour à la suite des trois Sommets sur l’alimentation des vrais enjeux et des vrais débats pour l’agriculture et l’agroalimentaire au Québec ? L’avenir de la gestion des plans conjoints !
«L’accaparement» et les Chinois !
Après des pages et des pages dans les médias sur le soi-disant «accaparement des terres» alors que 50 % de la zone verte est inexploitée au Québec, L’UPA est sortie dans les médias avec le thème des «Chinois envahisseurs» au Québec pour effrayer le monde. N’existe-t-il pas une loi claire qui empêche les étrangers d’acheter des terres au Québec? Dans ce débat n’a-t-on pas caché que les plus grands acheteurs de terres sont souvent les agriculteurs qui ont réussi et qui investissent dans ce qu’ils connaissent le mieux, la terre ? Et c’est très bien ainsi !
Les taxes qui fâchent pourraient mener à une plus grande bataille !
On a maintenant depuis quelques semaines un débat qui s’amplifie sur les remboursements de taxes foncières aux producteurs. Il est clair que l’augmentation des taxes fâche notamment dans les secteurs où les terres ont pris une valeur explosive dans les dernières années. Plusieurs discours fusent à droite et à gauche. Il y a ceux qui attaquent frontalement le ministre Paradis et même le premier ministre Couillard qui doutent tous deux de l’augmentation réelle des taxes pour les producteurs. Il y a ceux, comme les membres de l’Union paysanne, qui se réjouissent de ne plus avoir à payer de membership à l’UPA. Et il y a ceux qui se questionnent sur le véritable grand changement de ce décret ! Il y a ceux qui craignent un conflit à venir dans les villages entre ruraux et urbains.
Pour Paradis et Couillard, leur action est équitable. Le gouvernement de son côté défend son programme qui est augmenté de 22,5 millions de dollars sur trois ans et qui permet à 2500 fermes de plus de s’y inscrire. Paradis et Couillard parlent même d’équilibre de la richesse. « Ça représente 1 % des agriculteurs du Québec, pour un impact moyen de 113 $ » dit le premier ministre.
Le revenu de 5000 $ au cœur du débat !
Le revenu de 5000 $ est au cœur du débat ! L’UPA insiste sur le fait que, même s’il suffira avec le nouveau décret de s’inscrire au MAPAQ et d’être en zone verte pour obtenir un remboursement, il n’en demeure pas moins que selon la loi, pour obtenir un remboursement de taxes, un producteur devra encore payer sa cotisation à l’UPA s’il a des revenus supérieurs à 5000 $. Est-ce donc à dire que pour permettre à un large éventail de producteurs de toucher un remboursement de taxes sans payer leur cotisation à L’UPA, il faudrait aller plus loin dans la modernisation du système ?
Faudra-t-il alors toucher au sacro-saint monopole syndical et à la loi de 1972 sur le monopole syndical ? Une étape à franchir pour laquelle on ne connaît pas encore les véritables intentions du ministre Paradis ni les impacts positifs ou négatifs pour l'agriculture québécoise.
Un décret qui questionne !
Si certains comme à l’Union paysanne se réjouissent du nouveau décret qui permettra à un agriculteur d’être seulement inscrit au MAPAQ et en zone verte pour avoir son remboursement de taxes, c’est peut-être parce que nombre de producteurs de ce regroupement sont des gentlemen-farmers au revenu inférieur à 5000 $ ou parce qu’ils espèrent qu’il ne s’agit que de la première marche franchie par le ministre de l’Agriculture dans une réforme qu’ils attendent depuis des années ?
Certains critiquent d’ailleurs aussi ce décret qui pourrait finalement être plus utile aux grands propriétaires de chevaux qu’aux «véritables producteurs» si le gouvernement ne va pas jusqu’à bouger sur une modification à la loi syndicale de 1972.
Ce décret n’est-il fait que pour plaire aux gentlemen-farmers ou est-il la cheville d’une articulation beaucoup plus grande au sein du gouvernement ? Une plus grande bataille fondée sur un vrai sujet ( la gestion des plans conjoints) est-elle en gestation ? Car le véritable débat au-delà du pluralisme agricole ne réside-t-il pas plus dans la gestion des plans conjoints que dans le pluralisme lui-même ? Qui demain aura la responsabilité des prélevés actuellement gérés par le syndicat unique tel que le stipule la règle législative ?
Et si les plans conjoints étaient le véritable nerf de la guerre ?
On sait que trois grandes journées de consultation ( consommateurs/transformateurs/producteurs) sont étalées sur huit mois et que la première a eu lieu le 21 octobre dernier. Les deux autres se tiendront en février et mai 2017. Ces journées seront-elles l’occasion de mettre le vrai sujet sur la table ? La gestion des plans conjoints !
Plusieurs questions se posent : quel appui gardera le ministre Paradis au sein du gouvernement (même s’il a à ce jour le soutien du premier ministre en personne), lorsque les élections approcheront en 2018 ? Et surtout le ministre Paradis osera-t-il, suite aux divers Sommets de l’alimentation, faire le débat sur la réforme de la gestion des plans conjoints qui restent la manne financière des fédérations et du syndicat bien au-delà des cotisations ?
Que demain le Québec se targue de permettre la liberté syndicale aux producteurs et donne la place à l’existence officielle de l’Union paysanne ou du Conseil des entrepreneurs agricoles est une chose, mais le véritable pouvoir ne réside-t-il pas dans le contrôle des prélevés financiers sur les productions ? Un choix de société se pose pour les prochaines années: ces revenus importants doivent-ils être sous le contrôle exclusif d’un ou des syndicats ou de plusieurs acteurs de la société civile, dont les consommateurs/citoyens par exemple ?
Voilà des questions auxquelles ils faudra répondre !
Voilà un débat à venir bien plus grand que la chicane orchestrée autour de «l’accaparement »des terres, des Chinois ou de l’augmentation des taxes !