«Y’a tu du lait icitte?»: S’il n’y a rien à redire sur la qualité de la publicité du lait qui est en onde depuis les fêtes, il est toutefois intéressant de s’interroger sur le coût de cette opération et de toutes celles liées au marketing du lait et du fromage pour un total de plus ou moins 100 millions de dollars. Nous avons demandé à un expert, à un producteur et à François Dumontier, directeur-adjoint aux relations publiques et gouvernementales de PLQ (La Fédération des Producteurs de Lait) de nous donner quelques chiffres, qui parlent d’eux-mêmes ! C’est toujours un plaisir de revoir «Dodo» à l’écran, mais à quel prix !
«La pub récente que j'ai vue a pour but (je pense) de convaincre les consommateurs de chez nous que nos fromages sont aussi bons que les fromages importés en prévision de l'entrée de nouveaux fromages suite au CETA», de nous dire l’expert du secteur privé à qui nous avons parlé.
Des prélèvements par litre de lait depuis toujours pour payer la pub !
Cet expert dans un échange avec La Vie agricole nous a précisé qu’à sa connaissance en référence aux chiffres qu’il a connus ces dernières années dans le monde de l’industrie laitière, les producteurs payeraient à leur Fédération (FPLQ) 0.125$ (ou 1.25 cent) sur chaque litre de lait vendu pour payer la promotion et publicité des producteurs alors qu’au Québec la moyenne que reçoit le producteur de lait serait d’environ 75 cents le litre. Le montant amassé au Canada par les prélèvements de 1,25 cent du litre est ensuite, nous dit-il, reparti grosso modo, en fonction de la population des provinces (les consommateurs) sachant qu’au Québec, le lait produit est d’environ 37% et la population du Québec est d’environ 23%.
Encore plus d’argent aujourd’hui à la publicité dit Breault
Ce calcul est validé par un producteur laitier, Adrien Breault, à la tête d’une exploitation de 400 vaches au Québec, à qui nous avons parlé. Adrien Breault va dans le même sens que l’expert approché mais précise que le montant prélevé est aujourd’hui plus élevé et nous déclare : « Le coût de la publicité est même aujourd’hui plus élevé que ce que vous a dit l’expert à qui vous avez parlé. Actuellement on parle d’un coût de 1,48 $ l’hectolitre (1,48 cent le litre)».
De retour vers notre expert, il nous rappelle qu’ «Au Canada le budget total pour la publicité serait donc (y compris le Québec) d’environ 123 millions de $ ( une cinquantaine de millions de dollars juste au Québec). Tout un beau montant pour inciter à boire du lait ! Le Centre d'information de statistique laitière nous dit que le Canada a produit un total de 83 millions d'hectolitres de lait en l'année laitière 2015-16. En multipliant donc 83 millions d’hectolitres par 1,48$, on parle bien de 123 millions de dollars pour la publicité canadienne sur le lait et les produits laitiers. On sait aussi que pour la dernière année laitière le prix moyen d'un hectolitre (standard) de lait était de 74$. L'année précédente c'était un peu plus de 75$. Comme, 1,48$ sur 74$ donne 2%, nous pouvons confirmer que 2% de tout lait payé va à la promotion et publicité ( soit 123 M $). On peut en conclure donc que 2% du revenu brut d'une ferme va à la publicité». Que fait-on de tout cet argent ?
De la pub et même de la recherche !
De son côté François Dumontier de PLQ reconnait effectivement possible de faire un lien entre le message véhiculé dans les publicités sur le lait et les fromages et l’Accord de libre-échange Canada-Europe et admet aussi qu’il se dépense selon lui un montant global de 80 millions de dollars de publicité pour le Canada dont 40 millions au Québec mais dit-il : « De ces 40 millions de dollars 20 millions seulement servent à la promotion par la publicité et l’autre 20 millions de dollars est attribué à la recherche et au développement.» ( voir l’entrevue ci-jointe). Étrange de prélever de l’argent pour la promotion et de s’en servir pour la recherche et le développement diront certains !
Les montants d’argent prélevés pour la promotion sont élevés. Les producteurs savent-ils vraiment comment tout cela est ventilé ? Voilà des questions auxquelles il faudra peut-être un jour répondre ?
À lire sous peu sur ce site les entrevues avec le producteur Adrien Breault et le directeur-adjoint aux relations publiques de PLQ, François Dumontier.