En agriculture, le modèle de l’accroissement obsessionnel perpétuel de la production, qui outrepasse totalement les seuls besoins de l’autosuffisance alimentaire, se transpose dans un modèle très précis prôné par les grands pantins de la mondialisation, celui de la ferme-usine.
L’Accord économique et commercial global (AÉCG) va mener au règne des grosses fermes, de grande densité, pratiquant la monoculture. La production de masse entraîne une viande qui, en plus d’être de moins bonne qualité, est aussi moins chère. Qui dit viande moins chère dit donc aussi plus de consommation irréfléchie, ce qui est loin d’être positif pour l’environnement. Il ne faudrait pas, pour autant, reprocher aux agriculteurs cette situation : leur réalité est ardue et ils doivent composer avec une situation extrêmement difficile dont les tenants et aboutissants leur échappent, en plus de voir leur mode de vie traditionnel être de plus en plus bouleversé. C’est aux pouvoirs publics de refuser les dogmes de la mondialisation et d’offrir des alternatives écoresponsables, ainsi qu’un cadre plus humain.
La politique de la monoculture est prônée depuis longtemps par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, cherchant à forcer les pays en développement à se spécialiser dans les cultures les plus exportables. Il s’agit de la culture d’une seule espèce de production, qui peut aussi être animale, au détriment de la diversité et des écosystèmes, reposant sur l’idée qu’une surspécialisation dans un domaine précis résultera rapidement sur des gains de productivité. Cette dernière n’est pas fausse, mais relève encore une fois d’une logique à court terme, car la monoculture épuise les nutriments du sol et s’oppose à la biodiversité. Par le manque de diversité dans les plantes à butiner, ne s’agissant que d’une seule culture, les abeilles s’en trouvent menacées et leur disparition nuit alors à l’avenir de la production agricole. Un véritable cercle vicieux.
Le géant Monsanto a poussé le cynisme encore plus loin, en utilisant la propriété intellectuelle pour protéger ses ventes et en créant une plante transgénique. Monsanto détient dès lors un objet technologique soumis aux brevets. L’atout principal de la plante transgénique est de résister au RoundUp, un herbicide total, également une propriété de Monsanto. Il s’agit donc, en somme, de tout détruire pour être en mesure d’offrir le seul produit pouvant résistant.
Les problèmes au niveau de la pollution sont très importants, mais ce n’est pas le PIB qui va les enregistrer, ne se contentant que de pointer du doigt les « succès » strictement marchands, soit produire plus, et plus rapidement.
Sur le strict plan économique, le calcul n’est pas meilleur, relevant d’une vulnérabilité totale aux aléas du marché. La recherche du profit spontané peut rapporter dans l’immédiat, mais peut aussi entraîner une chute drastique d’un seul coup. Comment se ressaisir, par exemple, en cas d’effondrement du prix du riz si vous n’avez compté que sur cette production ? Il va sans dire que les principaux gagnants de la spéculation agricole sont les grandes entreprises et leurs actionnaires, qui prennent des décisions depuis des grands centres, éloignés des réalités paysannes. Pour eux, seule comptera l’accumulation de capital. La folie productiviste augmentera nécessairement le nombre d’acteurs impliqués dans la mise en marché, confisquant le pouvoir aux producteurs directement impliqués. À l’inverse, une agriculture familiale et locale sera plus fonctionnelle, car active sur le terrain et utilisant plus adéquatement les richesses naturelles offertes à sa disposition en plus de favoriser davantage l’autoconsommation, et donc la sécurité alimentaire. Autant d’objectifs incompatibles avec la fixation sur l’exportation à tout crin. Le verdict est limpide : le « produis massivement ou meurs » relève de la folie pure et simple et se veut une arme de colonisation des agriculteurs locaux par les puissances de l’argent, souvent étrangères.